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La Cour de cassation calme la psychiatrie sécuritaire

Actualités du droit - Gilles Devers, 3/06/2013

Statuant dans le domaine de la psychiatrie, la Cour de cassation vient...

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Statuant dans le domaine de la psychiatrie, la Cour de cassation vient d’administrer une bienfaisante piqûre de rappel à propos du respect des libertés fondamentales, et le principe est assez simple : quand le patient est en hospitalisation libre… et bien il est libre ! (29 mai 2013, n° 12-21.194, publié). Il nous reste maintenant à coller une camisole aux adeptes de la psychiatrie sécuritaire.

La difficulté d'une prise en charge

under_control_logo_design_by_livewiredstudios-d3a9hhv.jpgLes faits concernent l’hospitalisation libre en psychiatrie, dans une clinique privée de la région de Toulouse. Ces établissements ne reçoivent que des hospitalisations avec consentement, mais la règle posée par la Cour de cassation vaut pour les hospitalisations avec consentement dans les établissements privés chargés d’une mission de service public, ce qui représente 85 % de l’activité. On ne dispose pas de jurisprudence du Conseil d’Etat, pour les établissements publics, mais sans beaucoup m’avancer, je peux dire que la solution retenue serait la même.

La Cour de cassation dit peu de choses de la situation de fait, car elle se prononce sur la seule question qui lui était posée, à savoir la validité ou non d’un protocole interne à l’établissement pour surveiller les allers et venues de patients sortant et entrant de l’établissement.

Le patient avait été hospitalisé dans un contexte dépressif, et l’arrêt ne dit pas s’il y avait un contexte suicidaire. On peut s’en douter, et cela semble ressortir entre les lignes, mais la famille ne discutait plus la question du diagnostic et du traitement. Face au désespoir, la réponse médicale est particulièrement difficile.

Le décès est survenu des suites d’une absorption médicamenteuse de psychotropes, causant un arrêt cardio-respiratoire, et il était acquis par la recherche des causes que le patient s’était procuré une partie des psychotropes ayant servi à ce geste suicidaire à l’occasion d’une sortie non autorisée, et par conséquent non surveillée.

L’argument de la protocolisation

its-all-under-control-photo-1250x1250.jpgOr, le dossier établissait que pour une précédente sortie thérapeutique, il avait fallu une autorisation du psychiatre, et il y avait donc une faille. La famille semblait prête à admettre que le contrôle des entrées et sorties tout au long de la journée pouvait être imparfait. En revanche, elle avait découvert au cours de l’expertise qu’il n’existait pas dans l’établissement de protocole destiné à encadrer ces entrées et sorties. Aussi  pour la famille, la clinique ne s’était pas donné les moyens d’un contrôle qui soit la contrepartie du régime d’autorisation.  

Voici son argument : « Le fait que pour une précédente sortie, une autorisation avait été nécessaire prouve que les mouvements de du patient de la clinique vers l’extérieur étaient soumis à contrôle. Aussi, d’assurer l’efficience de l’obligation de surveillance, la clinique se doit d’établir une protocolisation des règles de sortie de l’établissement, même dans le cadre de l’hospitalisation avec consentement ».

On comprend bien ce qui se joue. L’hospitalisation avait été décidée car les soins à domicile n’étaient plus possible. Pour décider d’une sortie à l’essai, il fallait l’autorisation  du psychiatre. Or, on s’aperçoit que le patient a pu entrer et sortir sans que personne ne s’en inquiète… et ce, car il n’existe aucun protocole pour cet aspect pourtant décisif.  

Un protocole ne peut pas régir une liberté fondamentale

psychiatrie
Le principe jurisprudentiel est qu’en vertu du contrat d’hospitalisation et de soins la liant à son patient, une clinique psychiatrique est tenue d’une obligation de surveillance renforcée. A ce titre, elle est notamment tenue de prendre les mesures nécessaires pour veiller à sa sécurité en fonction de la pathologie du patient, de ses antécédents et de son état du moment (
18 juillet 2000,99-12135, publié). Mais attention : l’obligation de surveillance n’est pas un absolu : elle s’apprécie en fonction de la pathologie du malade et de sa situation administrative (13 octobre 1999, n° 97-16216, publié) 

Aux termes de l’article L. 3211-2 du Code de la santé publique, une personne hospitalisée sous le régime de l’hospitalisation libre pour des troubles mentaux dispose des mêmes droits liés à l’exercice des libertés individuelles que ceux qui sont reconnus aux malades hospitalisés pour d’autres causes.

La Cour de cassation souligne que le principe applicable est alors celui de la liberté d’aller et venir, un principe fondamental du droit, et il ne peut être porté atteinte à cette liberté de manière contraignante par voie de « protocolisation » des règles de sortie de l’établissement.

C’est un vieux principe du droit : il est possible de poser des limites à l’exercice des libertés, dans un cadre individualisé, en mettant en balance le respect de la liberté et les contraintes objectives obligeant à restreindre cette liberté. Le médecin traitant est le seul maître du traitement, et il est tenu de prendre les mesures nécessaires pour que son patient ne compromette pas sa sécurité (1° chambre,10 juin 1997, n° 95-14848). En revanche, toute mesure générale de restriction de la liberté individuelle est abusive.  

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Claude Finkelstein, Présidente de la FNAPSY

Une remarquable fédération qui regroupe 80 associations d'usagers en santé mentale

Au quotidien : reconnaissance de la souffrance psychique, solidarité, respect pour les libertés


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