Le droit des associations et des fondations reconnues d’utilité publique sur le point de bouger
K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Eve Derouesne, Philippe Simon, 21/05/2014
Hier, 20 mai 2014, l’Assemblée nationale a adopté, par 314 voix contre 165, le projet de loi relative à l’économie sociale et solidaire.
Si les associations et les fondations reconnues d’utilité publique sont, sans nul doute, des acteurs de premier rang de l’économie sociale et solidaire, tel n’est pas leur seul champ d’intervention économique.
Quoiqu’il en soit, c’est bien dans les dispositions de la future loi relative à l’économie sociale et solidaire qu’ont été insérées des dispositions importantes pour tout le tissu associatif tous secteurs confondus.
Dans cet article, nous nous bornerons à témoigner de deux évolutions.
La première tient à l’instauration d’un cadre juridique légal facilitant les fusions d’associations ou les scissions (article 41).
A cet effet, plusieurs mesures sont prises afin de :
- fixer le processus à suivre en vue de l’approbation de l’opération, selon des principes analogues à ceux appliqués en droit des sociétés, et dont la pratique s’inspirait largement jusqu’ici :
o si la fusion conduit à créer une nouvelle association, nécessité d’une adoption de délibérations concordantes par les associations dissoutes du fait de la fusion, en revanche, pas de nécessité de faire approuver l’opération par cette dernière ;
o nécessité de faire précéder l’adoption des délibérations de l’examen d’un rapport établi par un commissaire à la fusion, à la scission ou aux apports lorsque la valeur totale de l’ensemble des apports sera d’un montant au moins égal à un seuil fixé par décret ; les opérations portant sur des apports d’une valeur inférieure à ce seuil pourront ainsi être formellement dispensées de cette formalité dont, par précaution, on pouvait hésiter à se passer jusqu’ici (les parties à ces « petites » fusions restant toutefois libres de recourir à l’expertise si le contexte le requiert);
- mais aussi en préciser les effets :
o transmission universelle du patrimoine des associations dissoutes au bénéficie de la nouvelle association créée du fait de la fusion (c’est la qualification que retenait la jurisprudence (par exemple Cass. Com 12 juillet 2004 ; No 03-12672) pour cette forme particulière de dévolution ;
o obtention de la qualité de plein droit de membres de l’association résultant de la fusion pour les membres des associations dissoutes ; ce principe part de la succession de l’association absorbante dans les droits et obligations de la société absorbée à l’égard des membres de cette dernière (naturellement les membres de l’association absorbée sont libres de rester membres de l’absorbante ou d’en démissionner) ;
o date de prise d’effet de la fusion, proposée à titre supplétif sauf stipulations contraire du traité d’apport, par exemple, si la fusion conduit à créer une nouvelle association, à la date de publication au journal officiel de la déclaration de cette nouvelle association.
- Enfin, si la loi n’a pas prévu un transfert automatique des autorisations administratives ou autres actes administratifs dont étaient titulaires l’association dissoute – ce qui aurait porté une atteinte trop forte au caractère intuitu personae de ces actes administratifs, le législateur a cherché à apporter certains tempéraments par la création d’un dispositif de rescrit permettant à une association bénéficiant d’une autorisation administrative, d’un agrément, d’un conventionnement ou d’une habilitation et participant à la scission ou à un apport partiel d’actif, de saisir en amont l’autorité administrative qui se prononcera sur sa demande.
L’on peut penser que cet article trouvera une application toute particulière en matière sportive pour la validation préalable par la fédération sportive délégataire d’un transfert de numéro d’affiliation. En effet, la fédération sportive en tant qu’organisme chargé de la gestion d’un service public administratif doit être considérée comme une autorité administrative au sens de la loi du 12 avril 2000 et rien ne justifie qu’il en soit autrement au sens de la loi du 1er juillet 1901 et le numéro d’affiliation constitue une habilitation en ce qu’il est une condition pour participer à une compétition sportive nationale officielle.
A noter que ce cadre juridique est décliné également pour les fondations reconnues d’utilité publique (article 48 bis) avec, en outre, une disposition de nature à favoriser la transformation des associations en fondation reconnues d’utilité publique (article 46 ter).
L’ensemble de ces dispositions va incontestablement dans le bon sens car tous les acteurs qui ont eu un jour à mener une opération de fusion d’association ont pu mesurer à quel point celle-ci ne pouvait être menée que par tâtonnement en procédant par analogie - dans des conditions plus ou moins aisées - avec le droit des sociétés.
La seconde tient à l’insertion d’une définition normative de la subvention publique dans la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations (article 40AA).
« – Art. 9-1. – Constituent des subventions, au sens de la présente loi, les contributions facultatives de toute nature, notamment financières, matérielles ou en personnel, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires.
« Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. »
Plus précisément, il s’agit d’éviter tout processus de confusion entre les subventions publiques et les autres flux financiers versés par les autorités administratives afin de ne pas attraire les conventions d’objectifs signées avec le bénéficiaire de la subvention dans le champ des contrats de la commande publique et, consécutivement, d’éviter qu’elles se retrouvent soumises à des règles de publicité et de mise en concurrence.
La loi semble ainsi poursuivre à notre sens plus un objectif de rassérènement du milieu associatif que de sécurisation juridique, la situation contentieuse s’étant stabilisée ces dernières années sous l’impulsion des décisions de principe du Conseil d’Etat. Se trouvent d’ailleurs justement ici codifiés les critères jurisprudentiels de l’initiative et de l’absence de contrepartie directe et individualisée qui avaient été identifiés par la juge administratif (voir notamment CE, 6 avril 2007, commune d’Aix-en-Provence, req. 284736 ; CE, 26 mars 2008, Région de la Réunion, req. N°284412).
En conclusion, reste donc à suivre attentivement la suite du processus parlementaire pour vérifier que les évolutions annoncées ci-dessus figureront bien dans la loi définitivement adoptée. En effet, compte tenu des amendements votés par les députés, le projet de loi va repartir devant le Sénat qui l’avait adopté, en première lecture, en novembre dernier.
Quoiqu’il en soit, c’est bien dans les dispositions de la future loi relative à l’économie sociale et solidaire qu’ont été insérées des dispositions importantes pour tout le tissu associatif tous secteurs confondus.
Dans cet article, nous nous bornerons à témoigner de deux évolutions.
La première tient à l’instauration d’un cadre juridique légal facilitant les fusions d’associations ou les scissions (article 41).
A cet effet, plusieurs mesures sont prises afin de :
- fixer le processus à suivre en vue de l’approbation de l’opération, selon des principes analogues à ceux appliqués en droit des sociétés, et dont la pratique s’inspirait largement jusqu’ici :
o si la fusion conduit à créer une nouvelle association, nécessité d’une adoption de délibérations concordantes par les associations dissoutes du fait de la fusion, en revanche, pas de nécessité de faire approuver l’opération par cette dernière ;
o nécessité de faire précéder l’adoption des délibérations de l’examen d’un rapport établi par un commissaire à la fusion, à la scission ou aux apports lorsque la valeur totale de l’ensemble des apports sera d’un montant au moins égal à un seuil fixé par décret ; les opérations portant sur des apports d’une valeur inférieure à ce seuil pourront ainsi être formellement dispensées de cette formalité dont, par précaution, on pouvait hésiter à se passer jusqu’ici (les parties à ces « petites » fusions restant toutefois libres de recourir à l’expertise si le contexte le requiert);
- mais aussi en préciser les effets :
o transmission universelle du patrimoine des associations dissoutes au bénéficie de la nouvelle association créée du fait de la fusion (c’est la qualification que retenait la jurisprudence (par exemple Cass. Com 12 juillet 2004 ; No 03-12672) pour cette forme particulière de dévolution ;
o obtention de la qualité de plein droit de membres de l’association résultant de la fusion pour les membres des associations dissoutes ; ce principe part de la succession de l’association absorbante dans les droits et obligations de la société absorbée à l’égard des membres de cette dernière (naturellement les membres de l’association absorbée sont libres de rester membres de l’absorbante ou d’en démissionner) ;
o date de prise d’effet de la fusion, proposée à titre supplétif sauf stipulations contraire du traité d’apport, par exemple, si la fusion conduit à créer une nouvelle association, à la date de publication au journal officiel de la déclaration de cette nouvelle association.
- Enfin, si la loi n’a pas prévu un transfert automatique des autorisations administratives ou autres actes administratifs dont étaient titulaires l’association dissoute – ce qui aurait porté une atteinte trop forte au caractère intuitu personae de ces actes administratifs, le législateur a cherché à apporter certains tempéraments par la création d’un dispositif de rescrit permettant à une association bénéficiant d’une autorisation administrative, d’un agrément, d’un conventionnement ou d’une habilitation et participant à la scission ou à un apport partiel d’actif, de saisir en amont l’autorité administrative qui se prononcera sur sa demande.
L’on peut penser que cet article trouvera une application toute particulière en matière sportive pour la validation préalable par la fédération sportive délégataire d’un transfert de numéro d’affiliation. En effet, la fédération sportive en tant qu’organisme chargé de la gestion d’un service public administratif doit être considérée comme une autorité administrative au sens de la loi du 12 avril 2000 et rien ne justifie qu’il en soit autrement au sens de la loi du 1er juillet 1901 et le numéro d’affiliation constitue une habilitation en ce qu’il est une condition pour participer à une compétition sportive nationale officielle.
A noter que ce cadre juridique est décliné également pour les fondations reconnues d’utilité publique (article 48 bis) avec, en outre, une disposition de nature à favoriser la transformation des associations en fondation reconnues d’utilité publique (article 46 ter).
L’ensemble de ces dispositions va incontestablement dans le bon sens car tous les acteurs qui ont eu un jour à mener une opération de fusion d’association ont pu mesurer à quel point celle-ci ne pouvait être menée que par tâtonnement en procédant par analogie - dans des conditions plus ou moins aisées - avec le droit des sociétés.
La seconde tient à l’insertion d’une définition normative de la subvention publique dans la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations (article 40AA).
« – Art. 9-1. – Constituent des subventions, au sens de la présente loi, les contributions facultatives de toute nature, notamment financières, matérielles ou en personnel, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires.
« Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. »
Plus précisément, il s’agit d’éviter tout processus de confusion entre les subventions publiques et les autres flux financiers versés par les autorités administratives afin de ne pas attraire les conventions d’objectifs signées avec le bénéficiaire de la subvention dans le champ des contrats de la commande publique et, consécutivement, d’éviter qu’elles se retrouvent soumises à des règles de publicité et de mise en concurrence.
La loi semble ainsi poursuivre à notre sens plus un objectif de rassérènement du milieu associatif que de sécurisation juridique, la situation contentieuse s’étant stabilisée ces dernières années sous l’impulsion des décisions de principe du Conseil d’Etat. Se trouvent d’ailleurs justement ici codifiés les critères jurisprudentiels de l’initiative et de l’absence de contrepartie directe et individualisée qui avaient été identifiés par la juge administratif (voir notamment CE, 6 avril 2007, commune d’Aix-en-Provence, req. 284736 ; CE, 26 mars 2008, Région de la Réunion, req. N°284412).
En conclusion, reste donc à suivre attentivement la suite du processus parlementaire pour vérifier que les évolutions annoncées ci-dessus figureront bien dans la loi définitivement adoptée. En effet, compte tenu des amendements votés par les députés, le projet de loi va repartir devant le Sénat qui l’avait adopté, en première lecture, en novembre dernier.