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Hollande, Sarkozy ou Fillon : qui passera à la trappe ?

Justice au singulier - philippe.bilger, 9/05/2013

On est encore loin de 2016. Mais que le pouvoir socialiste, hollandais continue à administrer, à gouverner sans élan ni efficacité, que la droite traditionnelle persiste à ne rien apprendre et à tout oublier, on aura alors tristement le retour de Nicolas Sarkozy ou l'apothéose sombre du FN. Et François Fillon passera à la trappe.

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La remarquable émission de Franz-Olivier Giesbert (FOG) sur le quinquennat de Nicolas Sarkozy (France 3), en dehors du bilan dont chacune des séquences choisies est judicieuse, a offert des perspectives d'espoir.

Parce que des paroles et des personnalités se sont libérées, notamment celles de François Fillon (FF), et qu'on a eu droit enfin à un début de courage intellectuel et politique mettant en cause, certes avec beaucoup de retenue et d'élégance, le comportement et la stratégie présidentiels du vaincu de 2012.

Le seul qui soit demeuré dans une sorte d'autisme a été évidemment Henri Guaino dont on a l'impression qu'il saborderait son être s'il doutait si peu que ce fût de la qualité de ces cinq dernières années et de leur inspirateur.

La différence exprimée par FF au sujet de sa vision des rapports avec le FN et de celle de NS m'a donné envie d'emblée d'écrire un billet sur la primaire UMP de 2016 et de le titrer : Je tremble pour Fillon !

Projet qui a été évidemment confirmé par l'affirmation de l'ancien Premier ministre qu'il se présenterait, quoi qu'il se passe, à l'élection de 2017, en réalité à la primaire de 2016 a-t-il précisé (20 minutes, Le Monde).

Même s'il est hasardeux, quatre ans avant l'échéance, de s'abandonner à des prévisions, il est plus que vraisemblable que François Hollande (FH) se représentera en 2017, la déception peut-être éprouvée à l'issue d'un quinquennat ne dissuadant ni les partisans d'aspirer à une réélection ni le président sortant de s'estimer encore nécessaire pour la France. Dans un cadre républicain, le cours normal des choses et l'exercice du Pouvoir devraient conduire inéluctablement le président d'aujourd'hui à devenir le candidat de demain, mais blessé par les épreuves, enrichi de ses expériences et certain donc de mieux répondre à l'attente de ses concitoyens.

Pour la droite, il est fondamental que la majorité courageuse de l'UMP parvienne à imposer le système de la primaire en 2016, et pour tous les candidats. C'est au nom de cette exigence qu'il convient de se battre pour favoriser l'ampleur de la primaire pour la mairie de Paris car il serait à craindre qu'on profitât de la faiblesse quantitative de cette dernière pour mettre en cause la nécessité de celle de 2016.

Actuellement, pour cette joute capitale à venir, nous savons que FF y participera, que Xavier Bertrand en sera et que NS ne parvient plus à dissimuler son envie d'en découdre d'abord avec FH, accessoirement avec FF dont il a mal supporté les piques rares mais blessantes parce que visant et touchant juste.

Je ne crois pas que cette échéance sera déjà celle de ces personnalités qui ont largement dépassé le stade des promesses et dont on attend beaucoup parce qu'elles n'ignorent pas que la droite est en miettes et que, faute d'un renouveau éthique, intellectuel et politique, le socialisme de pouvoir, la gauche de responsabilité n'auront pas, en face d'eux, une authentique et intelligente Opposition.

Je songe notamment à NKM et à Bruno Le Maire. 2022 sera leur horizon et peut-être, si la primaire en 2021 reste d'actualité, François Baroin et Jean-François Copé (JFC) croiseront leur parcours. En compagnie d'autres qui aujourd'hui gardent leurs rêves et leur ambition pour eux.

JFC, si on peut lui faire confiance, a assuré qu'en 2016 il s'effacerait derrière NS. Le marché qui a été le leur à une certaine époque ne rend pas inconcevable cet engagement et je suis persuadé que JFC aura fort à faire et se donnera beaucoup de mal pour convaincre l'UMP qu'une primaire en 2016 serait une offense à NS.

Espérons tout de même une empoignade loyale où le couple Sarkozy-Copé n'aura pas en amont détruit toute chance de succès pour FF qui dans tous les cas aura une partie extrêmement difficile à livrer.

La singularité de 2017 pourrait être de provoquer un affrontement entre un président sortant d'une part et d'autre part un ancien président battu ou son Premier ministre ayant participé durant cinq ans à l'exercice du Pouvoir avec lui.

J'essaie d'imaginer quelle pourrait être l'argumentation de FF en 2016. Il arguera d'une lucidité plus immédiate, d'un comportement plus calme, plus serein et d'une méthode moins erratique. Ces évidences que sa pratique de Premier ministre a mises en lumière seront-elles suffisantes pour faire oublier tout ce à quoi il a adhéré et qu'au moins officiellement il a validé ?

Qu'il ait souffert sous l'emprise de NS, au moins avant sa reconduction puisqu'après il s'est coulé complètement dans le moule présidentiel, ne l'exonérera pas de la charge d'avoir à se justifier. Pourquoi ce président supporté durant cinq ans est-il devenu un candidat qui mériterait d'être éliminé, et par lui qui l'a servi avec tant de fidélité et si peu de dissidence ? Interrogation que FF prendra de plein fouet et qui sera mortelle pour sa cause s'il n'y répond pas victorieusement.

Il pourra soutenir que dans leur duo, NS commandait et qu'il exécutait, qu'il serait donc inéquitable de lui imputer à charge des actions, des entreprises et des attitudes face auxquelles il avait été forcément impuissant. N'ayant été que le serviteur du maître jusqu'en 2012, le "collaborateur" à vrai dire, n'est-il pas normal qu'il aspire à devenir le maître à son tour ?

Je n'ai pas l'impression que FF s'apprête à user de ce registre mais il semble plutôt faire fond sur la déclaration initiale de NS annonçant son retrait après sa défaite et donc croire à sa sincérité alors que son propos est aussi plausible que sa tentation de monastère en 2007 dévoyée sur le yacht de Bolloré.

NS, avec son effacement ostensible depuis le mois de mai 2012 puis sa frénésie de moins en moins effacée de revenir, ne laisse plus personne dans le doute. Il est parvenu de la sorte à stériliser l'avenir de la droite qui le veut sans l'espérer, à couper court à toute autre ambition dangereuse et à s'accommoder des procédures judiciaires qui surgissent des tréfonds de son quinquennat. Ailleurs qu'en France, elles le briseraient, même non condamné. Chez nous, c'est une aura sulfureuse, que tous jugent vraisemblable, voire probable, mais qui le parfume au lieu de l'accabler.

FF a perçu l'obligation d'accélérer le rythme pour déchirer la nasse et éviter le piège que la fausse indécision de NS lui tendait. Il a recouvré du jeu, de la liberté. Mais est-il entré vraiment dans la peau de celui qui veut à toute force être élu comme président de notre pays ou face à l'irrésistible énergie de NS pour gagner la session de rattrapage, va-t-il céder ? Apparemment l'UMP n'a pas encore compris que NS a fait battre la droite, et non pas que la droite l'a battu comme le laissait entendre la seconde partie de l'émission de FOG.

J'avoue mon inquiétude devant un NS déchaîné, un Fillon risquant d'être tétanisé et un Hollande fragilisé par cinq ans difficiles.

Et il y aura le FN.

On n'a pas pardonné à FF d'avoir constaté que pour lui ce parti était en dehors des limites du pacte républicain alors que pour NS, il était à combattre parce qu'il affaiblissait la droite et qu'il la faisait perdre. Morale contre politique ! Peut-on une seconde s'illusionner et rêver d'une UMP optant pour FF contre NS ? On sait bien que sur ce plan la cause est entendue et que le second verra son argumentation ratifiée.

On est encore loin de 2016. Mais que le pouvoir socialiste, hollandais continue à administrer, à gouverner sans élan ni efficacité, que la droite traditionnelle persiste à ne rien apprendre et à tout oublier, on aura alors tristement le retour de NS ou l'apothéose sombre du FN.

Et FF passera à la trappe.


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