Le tribunal administratif de Strasbourg enjoint au maire d'une commune de retirer 125 silhouettes féminines disposées dans différents espaces publics du territoire de la commune
droit des collectivités territoriales - actualités et miscellane - Luc BARTMANN, 10/08/2017
Le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg avait été saisi par par une association féministe, Les Effronté-e-s, qui soutenait que les panneaux en contreplaqué, représentant des accessoires ou des éléments du corps féminin ainsi que des silhouettes de femmes, disposés par la commune de Dannemarie dans les espaces publics, constituait une atteinte grave et manifestement illégale au principe d’égalité entre les hommes et les femmes et à la dignité de la personne humaine.
Le juge des référés a statué sur ce recours par une ordonnance du 9 août 2017.
Il a reconnu que le principe d’égalité entre les hommes et les femmes, qui a valeur constitutionnelle en application du Préambule de 1946 auquel se réfère le Préambule de la Constitution de 1958, a la nature d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, instituant le référé-liberté.
Il a jugé que ces représentations de silhouettes féminines ou d’éléments du corps féminin illustrent une conception de la femme, inspirée par des stéréotypes et la réduisant de façon caricaturale, et parfois graveleuse, à une fonction d’objet sexuel. Il en a déduit que leur disposition par une commune dans ses espaces publics, et notamment le long de ses voies publiques, constitue une atteinte grave au principe d’égalité entre les hommes et les femmes et est manifestement contraire à la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, dont l’article 1er engage les collectivités territoriales à mettre en œuvre une politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes et, en particulier, à mener des actions destinées à prévenir et à lutter contre les stéréotypes sexistes.
Il a, enfin estimé que la seule présence sur la voie publique de ces illustrations qui dévalorisent les femmes cause un trouble à l’ordre public qui justifie que le juge des référés prescrive, dans le cadre de la procédure particulière prévue par l’article 521-2 du code de justice administrative, toutes les mesures de nature à faire cesser, à brève échéance, cette atteinte.
Le juge des référés a, en conséquence, ordonné le retrait sous astreinte des panneaux litigieux dans un délai de huit jours sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Dans un communiqué, le maire de Dannemarie, indique que « la commune a fait valoir son droit d’appel de cette décision auprès du Conseil d’État à Paris ». Il estime que « dans cette affaire plusieurs points sont litigieux et méritent une révision ».
Ses arguments portent sur la forme : « Comment une Présidente d’association peut-elle agir en justice sans délégation, soit donnée par ses Statuts, soit par une assemblée générale ? C’est un des points fondamentaux pour toute action en justice qui ne peut être ignoré même en cas d’urgence ! » Ce défaut d’habilitation à agir avait été soulevé par l'avocat de la commune, mais le tribunal ne l'a pas retenue estimant que les contraintes spécifiques du référé n’exigeait pas une telle habilitation. Sur ce point, l'ordonnance ne fait qu’appliquer la jurisprudence du Conseil d’État qui est citée textuellement (arrêt du 7 juillet 2004 ; arrêt du 30 mai 2016). Ce moyen d'appel ne prospérera donc pas.
Le maire estime en outre, que sur le fond : « Le juge établit une hiérarchie dans les libertés fondamentales, entre la liberté d’expression, la liberté artistique et le principe d’égalité hommes-femmes. Il décrète que cette dernière dépasse toutes les autres et que la non application de la loi de 2014 cause un trouble à l’ordre public (Atteinte à la dignité et stéréotypes sexistes). Et cela pour toutes les 125 figurines sans exception (donc un soulier à talon, un chapeau, un sac, Betty Boop, est un trouble à l’ordre public) ! » Il en conclut qu’il « ne peut plus y avoir d’activité artistique sans une égalité homme-femme. »
Affaire à suivre.
Dans un communiqué, le maire de Dannemarie, indique que « la commune a fait valoir son droit d’appel de cette décision auprès du Conseil d’État à Paris ». Il estime que « dans cette affaire plusieurs points sont litigieux et méritent une révision ».
Ses arguments portent sur la forme : « Comment une Présidente d’association peut-elle agir en justice sans délégation, soit donnée par ses Statuts, soit par une assemblée générale ? C’est un des points fondamentaux pour toute action en justice qui ne peut être ignoré même en cas d’urgence ! » Ce défaut d’habilitation à agir avait été soulevé par l'avocat de la commune, mais le tribunal ne l'a pas retenue estimant que les contraintes spécifiques du référé n’exigeait pas une telle habilitation. Sur ce point, l'ordonnance ne fait qu’appliquer la jurisprudence du Conseil d’État qui est citée textuellement (arrêt du 7 juillet 2004 ; arrêt du 30 mai 2016). Ce moyen d'appel ne prospérera donc pas.
Le maire estime en outre, que sur le fond : « Le juge établit une hiérarchie dans les libertés fondamentales, entre la liberté d’expression, la liberté artistique et le principe d’égalité hommes-femmes. Il décrète que cette dernière dépasse toutes les autres et que la non application de la loi de 2014 cause un trouble à l’ordre public (Atteinte à la dignité et stéréotypes sexistes). Et cela pour toutes les 125 figurines sans exception (donc un soulier à talon, un chapeau, un sac, Betty Boop, est un trouble à l’ordre public) ! » Il en conclut qu’il « ne peut plus y avoir d’activité artistique sans une égalité homme-femme. »
Affaire à suivre.