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Conseil d’État, 318549

- wikisource:fr, 22/03/2010


Conseil d’État
19 mars 2010


Section du contentieux – Laurent A. – 318549


M. Frédéric Lenica, rapporteur public




Visas

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet et 16 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour M. Laurent A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’État :

  1. d’annuler l’arrêt du 7 novembre 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, sur sa requête et sur celle de la Fédération française de cyclisme, a, d’une part, annulé le jugement du 23 novembre 2004 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 7 décembre 2001 du conseil fédéral d’appel de la Fédération française de cyclisme lui infligeant une sanction disciplinaire en application du règlement antidopage de l’Union cycliste internationale et rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Fédération française de cyclisme à lui verser une somme de 695 167,57 euros à titre de dommages et intérêts, et, d’autre part, a rejeté les conclusions de sa requête tendant à ce que la Fédération française de cyclisme soit condamnée à lui verser une somme globale de 890 000 euros au titre de ses préjudices ;
  2. réglant l’affaire au fond, de réformer ce jugement et de faire droit aux conclusions de ses demandes ;
  3. de mettre à la charge de la Fédération française de cyclisme le versement de la somme de 3 000 euros à la SCP Vier - Barthélemy - Matuchansky au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les observations, enregistrées le 4 février 2010, présentées par le ministre de la santé et des sports ;

Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Motifs

Considérant qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que M. A, coureur cycliste professionnel, a fait l’objet, le 9 mai 2001 à l’occasion de sa participation à la course cycliste du Tour de Romandie, épreuve se déroulant sur le territoire suisse et inscrite au calendrier international de l’Union cycliste internationale, d’un contrôle antidopage qui a révélé dans ses urines la présence d’érythropoïétine ; que ce contrôle positif ayant été confirmé par une seconde analyse, l’Union cycliste internationale a transmis le dossier d’instruction ouvert à l’encontre de M. A à la Fédération française de cyclisme afin que cette fédération mette en œuvre, en application de l’article 68 du règlement du contrôle antidopage de l’Union cycliste internationale, la procédure disciplinaire prévue aux articles 69 et suivants de ce règlement ; que, par une décision du 7 décembre 2001, le conseil fédéral d’appel de la Fédération française de cyclisme a infligé à M. A une peine de suspension d’une durée d’un an, assortie d’une disqualification du Tour de Romandie de 2001 et d’une amende de 2 000 francs suisses, en application de l’article 90 du règlement du contrôle antidopage de l’Union cycliste internationale, et fixé le terme de la période de suspension au 31 janvier 2003 par application de l’article 94 de ce règlement ;

Considérant que les décisions prises par une personne privée chargée de l’exécution d’une mission de service public à caractère administratif présentent le caractère d’actes administratifs si elles procèdent de la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique conférées à cette personne pour l’accomplissement de la mission de service public qui lui a été confiée ; que l’exercice du pouvoir disciplinaire par une association à l’égard de ses membres est inhérent à l’organisation de cette association et ne traduit pas, par lui-même, l’exercice de prérogatives de puissance publique qui nécessairement auraient été conférées à cette association pour l’accomplissement d’une mission de service public ;

Considérant qu’aux termes de l’article 17 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, alors applicable : « I. Dans chaque discipline sportive et pour une durée déterminée, une seule fédération agréée reçoit délégation du ministre chargé des sports pour organiser les compétitions sportives à l’issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux (…) » ; qu’en confiant ainsi, à titre exclusif, aux fédérations sportives ayant reçu délégation la mission d’organiser des compétitions sur le territoire national, le législateur a chargé ces fédérations de l’exécution d’une mission de service public à caractère administratif ; que si les décisions procédant de l’usage par ces fédérations des prérogatives de puissance publique qui leur ont été conférées pour l’accomplissement de cette mission de service public présentent le caractère d’actes administratifs, il en va autrement pour les décisions qui ne sont pas prises pour les besoins de ce service public à caractère administratif ; que la décision par laquelle le conseil fédéral d’appel de la Fédération française de cyclisme, association de droit privé, a infligé, en statuant sur la demande de l’Union cycliste internationale, association de droit suisse dont la Fédération française de cyclisme est membre et en faisant application des dispositions du règlement du contrôle antidopage de l’Union cycliste internationale, une sanction disciplinaire à M. A à raison de faits commis à l’occasion d’une compétition qui ne s’est pas déroulée sur le territoire national, n’a pas été prise dans le cadre de la mission de service public confiée à la Fédération française de cyclisme en vertu de l’article 17 de la loi du 16 juillet 1984 et ne présente, par suite, pas le caractère d’un acte administratif ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la cour administrative d’appel de Paris, en déclinant la compétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions de M. A tendant à l’annulation de la décision du conseil fédéral d’appel de la Fédération française de cyclisme et à la condamnation de cette fédération à lui verser des dommages et intérêts à raison de l’illégalité de cette décision, n’a pas commis d’erreur de droit ;

Considérant que si M. A critique le motif par lequel la cour administrative d’appel a relevé qu’en vertu de l’article 84 du règlement de l’Union cycliste internationale une procédure d’arbitrage était susceptible d’être engagée devant un tribunal arbitral constitué conformément aux statuts et règlements du tribunal arbitral du sport, il résulte des termes mêmes de l’arrêt attaqué que ce motif présente un caractère surabondant ; que, dès lors, le moyen du pourvoi dirigé contre ce motif est inopérant ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Vier-Barthélemy-Matuchansky, avocat de M. A ;

DÉCIDE

Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Laurent A et à la Fédération française de cyclisme. Copie en sera adressée, pour information, à l’Union cycliste internationale et à la ministre de la santé et des sports.


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