Cour de cassation, 07-45.321
- wikisource:fr, 9/02/2010
10 novembre 2009
Visas
Demanderesse à la cassation : Association Salon Vacances Loisirs
Défendeur à la cassation : M. X…
La Cour de cassation, Chambre sociale, a rendu l’arrêt suivant :
Motifs
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 8 octobre 2007), que M. X… a été engagé à compter du 10 janvier 1989 en qualité d’agent d’entretien, gardien de l’établissement et chauffeur par l’association des colonies de vacances et œuvres de plein air de la ville de Salon de Provence (devenue l’association Salon Vacances Loisirs) qui gère un centre de vacances à Lus-la-Croix-Haute ; qu’au cours du mois de juin 2001, un nouveau directeur a pris la direction de l’établissement de Lus-la-Croix-Haute ; que M. X… a été en arrêt de travail du 21 août 2003 au 27 novembre 2003 puis à compter du 10 mai 2004 ; qu’à l’occasion du second examen médical de reprise, le médecin du travail l’a déclaré « inapte médicalement et définitivement à tous postes à Lus-La-Croix-Haute » précisant qu’il « serait apte à un poste sans contact avec son directeur actuel » ; que le salarié a été licencié pour inaptitude physique, le 9 mai 2005 ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir la condamnation de l’employeur au paiement de diverses sommes à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages-intérêts pour préjudice moral résultant de la détérioration des conditions de travail à l’origine directe de son inaptitude ;
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt d’avoir dit le licenciement nul et de l’avoir condamné au paiement de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
- qu’une méthode de gestion du personnel conduisant à donner des directives à un cadre subordonné par l’intermédiaire de tableaux ou à communiquer des ordres directement à un exécutant ne caractérise pas un harcèlement moral, lequel suppose des agissements répétés de harcèlement qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en l’espèce, en se bornant à relever que la méthode de gestion de M. Y…, directeur du centre de loisirs dans lequel M. X… exerçait les fonctions de directeur technique, et qui consistait à communiquer parfois avec celui-ci à l’aide de tableaux ou de donner des directives au salarié placé sous l’autorité de M. X… indiquait une mise à l’écart et un mépris envers ce dernier, pour en déduire que le licenciement du salarié était nul, en ce qu’il aurait eu pour origine le comportement de M. Y…, sans caractériser précisément des agissements répétés de harcèlement moral à l’encontre du salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-32-5, L. 122-49 et L. 122-51 du code du travail ;
- que l’employeur qui a pris des dispositions en vue de prévenir les actes de harcèlement d’un subordonné envers un de ses salariés ne peut se voir imputer les conséquences du licenciement pour inaptitude physique de ce dernier qui résulterait des actes en cause ; qu’en l’occurrence, la cour d’appel a constaté qu’après que M. X… se fut plaint pour la première fois, par courrier en date du 29 août 2003, du comportement de M. Y…, la présidente de l’association Salon Vacances Loisirs s’était efforcée à partir d’un courrier en date du 13 septembre 2003 de remédier aux difficultés ressenties par M. X… dans ses conditions de travail ; que l’arrêt attaqué a encore relevé que lorsque M. X… a réitéré ses critiques à l’encontre de M. Y… par courrier du 30 août 2004, la direction de l’association avait, par courrier du 10 septembre 2004, une fois encore indiqué qu’elle prendrait les mesures propres à prévenir tout acte de harcèlement ; qu’en affirmant néanmoins que le licenciement de M. X… pour inaptitude, en ce qu’il avait pour origine le harcèlement moral dont celui-ci avait été victime de la part de M. Y…, était nul, la cour d’appel a violé les articles L. 122-32-5, L. 122-49 et L. 122-51 du code du travail ;
Mais attendu que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Et attendu que la cour d’appel a relevé que le directeur de l’établissement soumettait les salariés à une pression continuelle, des reproches incessants, des ordres et contre-ordres dans l’intention de diviser l’équipe se traduisant, en ce qui concerne M. X…, par sa mise à l’écart, un mépris affiché à son égard, une absence de dialogue caractérisée par une communication par l’intermédiaire d’un tableau, et ayant entraîné un état très dépressif ; qu’ayant constaté que ces agissement répétés portaient atteinte aux droits et à la dignité du salarié et altéraient sa santé, elle a ainsi caractérisé un harcèlement moral, quand bien même l’employeur aurait pu prendre des dispositions en vue de le faire cesser ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l’association Salon Vacances Loisirs aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille neuf.