Action française
- Wikipedia, 3/02/2012
L’Action française, parfois désignée sous l'acronyme AF, représente à la fois une école de pensée et un mouvement politique nationaliste, d'extrême droite, qui s’est développé dans la première moitié du XXe siècle en France.
Fondée en 1898 par Henri Vaugeois et Maurice Pujo sur une position antidreyfusarde, l’Action française devient monarchiste sous l'influence de Charles Maurras et de sa doctrine du nationalisme intégral, dite également « maurassisme ». Ainsi, d’une rhétorique nationaliste, républicaine et antisémite, l’AF évolue vers une idéologie antisémite, contre-révolutionnaire, antirépublicaine et anti-individualiste, sur fond de positivisme et de transformisme. Dès lors, le mouvement revendique une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée.
Les structures de l’AF sont diverses : une revue qui deviendra par la suite un journal quotidien ; des hommes de main, les Camelots du roi, qui s'organisent en fédération tout comme les étudiants d'AF ; une ligue politique ; une maison d'édition, la Nouvelle Librairie nationale ; une commission de propagande pour le soutien financier ; un cercle de Dames et de Jeunes Filles royalistes ; un Institut d'étude politique qui est l'école de pensée de l'Action française ; un groupe de réflexion, le Cercle Proudhon ; une bibliothèque, une librairie, une salle de sport et même au niveau régional, un théâtre.
Dans les années 1908-1914, l’Action française participe largement au « réveil national » dont le but est d’alerter la population et le gouvernement sur la menace allemande. Mais la guerre finit par éclater en 1914 ; elle causera la mort de millions de personnes dont quelques centaines dans les rangs de l’Action française. Après la guerre, le mouvement connaît son apogée. Il entame toutefois assez vite un lent déclin, qui commence avec la condamnation par le pape Pie XI en 1926, imité en 1937 par le « comte de Paris », alors fils du prétendant orléaniste au trône de France. Entre temps, l’Action française a participé entre autres à la crise du 6 février 1934 qui lui a d'ailleurs causé quelques victimes et quelques départs.
Après la défaite de 1940, l'Action française se rallie avec enthousiasme à Pétain et à sa Révolution nationale. Elle acquiesce à l'essentiel de la politique mise en œuvre par le régime de Vichy, dont le statut des Juifs et ne prend pas parti contre la politique de collaboration, malgré sa germanophobie de principe. Certains de ses militants et sympathisants vont plus loin en adoptant une attitude ouvertement pro-allemande et collaborationniste, attitude rejetée par la direction du mouvement qui invoque le slogan : « la France seule ». L'Action française dénonce violemment la Résistance intérieure et la France Libre, mais certains de ses militants et sympathisants choisissent malgré tout de soutenir De Gaulle ou le général Giraud.
Le mouvement sort déconsidéré de la Seconde Guerre mondiale, du fait de son soutien au régime de Vichy et d'une complicité de fait avec l'occupant ; Maurras et Pujo sont ainsi condamnés pour « intelligence avec l'ennemi » et emprisonnés. Le quotidien L'Action française cesse de paraître et l'utilisation de son titre est interdite. Plusieurs publications et mouvements politiques en ont par la suite revendiqué l'héritage, voire utilisé le nom.
Création
L'Action française naît en pleine affaire Dreyfus. Le 8 avril 1898 s'organise un petit Comité d'action française où Henri Vaugeois, professeur de philosophie au collège de Coulommiers, et Maurice Pujo coudoient le capitaine Caplain-Cortambert[1] et le colonel de Villebois-Mareuil[2]. L'idée de créer le mouvement est lancée par Maurice Pujo le 19 décembre 1898[3].
Au moment où s'ouvre l'affaire Dreyfus, Maurice Pujo appartient avec Henri Vaugeois à l’Union pour l'Action morale que dirige Paul Desjardins, cercle d'intellectuels qui veulent « instaurer le règne de la Vertu et de la Morale »[A 1],[4] dans la société. Vaugeois et Pujo, ne cautionnant pas le soutien de l’Union au capitaine Dreyfus, décident de partir[note 1]. Vaugeois et Pujo se préoccupent de créer un groupement qui serait une Union pour l'Action française.
Fin 1898 est créée la Ligue de la patrie française (antidreyfusarde), pour s'opposer à la Ligue des droits de l'Homme (dreyfusarde) qui vient juste d'être créée. Certains des fondateurs de l'Action française participent à la Ligue de la patrie française, mais ce n'est pas le même mouvement.
En avril 1899, un premier comité s'organise, bientôt rejoint par Maurice Barrès[3] et Henri Vaugeois. Puis, le 20 juin 1899, le mouvement naît officiellement lors d'une conférence donnée par Vaugeois, rue d’Athènes à Paris, présidée par François Césaire de Mahy, sous le titre : « L'Action française ». La Revue d'Action française est fondée au mois de juillet[3]. Il s'agit pour les fondateurs de l'Action française de tirer la leçon du fiasco de la Ligue de la patrie française qu'ils estiment faible sur le plan doctrinal en dépit de son succès (cent mille adhésions recueillies en 24 heures et le patronage de la moitié de l'Académie française)[C 1]. Le but est d'effectuer une réforme intellectuelle du nationalisme. Jamais le mouvement ne s'écartera de la préoccupation doctrinale de ses origines[C 1].
Le premier numéro de cette revue bimensuelle de petit format et de couverture grise fait état du compte-rendu de la réunion publique faite par Vaugeois. Le second numéro, auquel commence la pagination, paraît le 1er août 1899. Lors de son premier éditorial, Vaugeois intitule « Réaction d'abord » son article manifeste. Vaugeois était alors républicain ; sa revue le fut, tout en acceptant la collaboration du monarchiste Charles Maurras mais aussi des républicains, des catholiques et des libres penseurs[C 1]. Leur mot d'ordre est « la seule France » et leur leitmotiv est de réagir contre l'anarchie qu'ils déclarent « résulter de la proclamation sans précaution ni contrepartie » des droits de l'homme[C 1]. Dès 1899, la revue qu'ils publient s'affirme antisémite, hostile à la démocratie[A 2] et rejette « la liberté comme base de l'ordre social »[A 3].
Le rôle de l'affaire Dreyfus
L'Action française est, dès sa création, radicalement engagée dans le camp antidreyfusard. Elle se félicite de sa condamnation et conteste le décret de grâce qui lui est ultérieurement accordé, dans la mesure où, par antisémitisme[note 2], elle voit en lui la quintessence du « Juif traître[note 3] ». Justifiant le « faux Henry », après que celui-ci fut découvert[note 4], Maurras poursuit Dreyfus de ses invectives. Ne s'intéressant pas, au fond, à la question effective de l'innocence ou de la culpabilité de Dreyfus, qui devait selon lui être sacrifié à l'intérêt national[D 1], il généralise le cas Dreyfus en dénonçant ses défenseurs[D 2].
L'Enquête sur la monarchie
Les deux premiers fascicules de l’Enquête sur la monarchie paraissent en 1900 dans les colonnes de la Gazette de France sous la plume de Charles Maurras (le troisième paraîtra en 1903). L'idée de ce qui, selon Raoul Girardet, constitue sans doute « la dernière des grandes utopies politiques du XIXe siècle français[H 1] », est de diffuser les conclusions expérimentales auxquelles Maurras est parvenu et de privilégier une clientèle issue des rangs d’un parti royaliste en désarroi mais essentiellement de religion catholique. Il y affirme que « l'ouvrier, le serviteur, le chef de la défense et de la grandeur françaises ne peut être que le descendant des Chefs fondateurs et conservateurs, le Roi ». La légitimité du pouvoir monarchique en France repose pour Maurras sur sa capacité à assurer le salut public[5].
En disciple d’Auguste Comte, Maurras entend que « le pouvoir spirituel » soit le dénominateur commun à partir duquel la société pourra se reconstruire et définit le royalisme comme « une union nationale supérieure à toute division de partis » et accueillante aux « libertins de gauche », comme aux catholiques de droite. Il déclare notamment à Barrès son ambition de « conquérir au royalisme non seulement l’Action, mais vous-même et la France entière[6] ».
Le nationalisme maurrassien va dès lors s’articuler et se définir comme la volonté de restaurer un pouvoir fort dont le but est de rendre la nation à elle-même en rétablissant les fondements de l’État, l’armée, la magistrature, l’Église, et ce, en excluant les étrangers, nomades, immigrés sans racines, qui « campent » sur le territoire national, c’est-à-dire ce qu'il appelle les « quatre États confédérés », à savoir les juifs, les protestants, les francs-maçons et les métèques[7]. Depuis la mort du comte de Chambord en 1883, le sentiment royaliste était frappé à mort dont le déclin s'était précipité avec le soutien au boulangisme et avec la mort du comte de Paris (1894)[C 2]. Son fils ne parvenait pas à susciter d'enthousiasme ni à être crédible en tant qu'héritier de la Maison de France. Le zèle, « la conviction têtue et la force persuasive » de Maurras, alors âgé de 32 ans, et le ralliement d'une poignée de jeunes hommes allaient régénérer « le vieux tronc et lui infuser une sève nouvelle » : un néoroyalisme plus combatif et plus jeune mais sans « l'attachement quasi-religieux à la personne du roi »[C 2], un royalisme positiviste[C 3].
Au sein du mouvement, Charles Maurras insuffle une nouvelle idéologie, le nationalisme intégral, qui reprend des éléments traditionnels. Dans le vocabulaire de l'Action française, le nationalisme intégral a toujours désigné le nationalisme qui conclut à la monarchie. L'historien René Rémond, dans son ouvrage de référence sur les droites françaises, souligne que l'Action française demeurera toujours plus nationaliste que monarchiste et plus monarchiste que royaliste[C 4]. À partir de 1903, l'Action française est dotée de ses deux traits fondamentaux (le nationalisme et le monarchisme) et a ainsi amalgamé dans son idéologie « deux des trois courants de la Droite française »[C 3]. Le mouvement se fait désormais le vecteur « d'une monarchie héréditaire, antiparlementaire et décentralisée » avec le soutien de figures des lettres françaises d'alors tels Paul Bourget et Jules Lemaître[C 2],[8].
L’autorité croissante de Maurras et de son nationalisme intégral finit par éloigner les derniers partisans républicains de l'Action française ou bien de les convertir au monarchisme (Vaugeois, Pujo, Lucien Moreau, Jules Lemaître)[7] bien qu'une partie de la clientèle catholique visée répugne à adhérer à ce nouveau royalisme. Les nationalistes républicains ne furent pas exclus de la Revue d'Action française, mais ils s'éloignèrent. Caplain résigna ses fonctions d'administrateur de la revue. La liste des collaborateurs où Barrès figurait au verso de la couverture, avec d'autres républicains nationalistes, disparut le 15 février 1903[9].
Un mouvement attaché au catholicisme
Le début du XXe siècle est marqué par un fort courant anticlérical, la République française cherchant à élever un rempart de sécularisation entre l’Église et la société. Ce qui apparaît aux yeux de certains catholiques comme une « invasion laïque[10] » conduit ainsi à la loi de Séparation des Églises et de l'État en 1905[note 5]. « Après avoir mis Dieu hors de l'école, le bloc républicain décide de le pousser hors de l'État[note 6] »[G 1]. Un « malaise catholique » se fait ainsi jour, les catholiques se sentant assiégés, « exilés dans leur patrie » selon l'expression de Michel Lagrée et, comme le note Véronique Auzépy-Chavagnac, la plupart sont opposés au gouvernement. C'est dans ce contexte particulier que l'Action française est créée.
En réaction à la mise en place progressive de la laïcité, des catholiques s'opposent au gouvernement et organisent des manifestations.
La plupart des membres de l'Action française sont élevés dans le milieu catholique. Comme l'écrivait René Rémond dans la préface de l'ouvrage de Véronique Auzépy-Chavagnac, ces derniers « retrouvent les valeurs d'ordre, d'autorité, de tradition qui définissaient le catholicisme intransigeant du XIXe siècle, héritage du combat contre la Révolution et ses principes jugés pernicieux, réactivé par Maurras et légitimé par une lecture fondamentale de Saint-Thomas d'Aquin ».
Au début du XXe siècle, les catholiques voient en l'Action française un retour à l'expression politique qui leur donne une doctrine pour faire face à la laïcisation de la société. Nombre de catholiques se sentent en effet comme dépossédés de leur citoyenneté et l'AF est là pour rétablir leurs droits sur la nation. L'équilibre politique et la santé du corps social sont menés d'après le mouvement maurrassien par l'Église. La condamnation du Sillon par Rome en 1910[11] augmente d'autant plus l'intérêt des catholiques pour l'Action française.
Charles Maurras poursuit par ailleurs une œuvre littéraire néoclassique, écrivant ainsi Le Chemin du paradis en 1894 et Anthinéa en 1901. Ces deux ouvrages lui font craindre une condamnation par l'Index. Malgré cela, les catholiques ne rejettent pas le mouvement d'Action française, ce qui peut s'expliquer en deux points :
- les sympathisants du mouvement maurrassien ne lisent pas forcément Maurras ;
- beaucoup de catholiques faisaient la différence entre l'œuvre du mouvement et celle de l'homme.
Le cardinal Billot raisonnait d'ailleurs ainsi quand il essayait de persuader Pie X de ne pas condamner l'AF pour ces écrits : « Les livres de Maurras n'ont rien à voir avec l'Action française[12]. »
La violence est utilisée par les Camelots du Roi dans de nombreuses manifestations. Les catholiques qui la promeuvent la justifient en l'apparentant à celle utilisée par Jésus-Christ quand il chassait les marchands du Temple[G 2].
Lignes directrices de la politique d'Action française
Charles Maurras, le chef du mouvement d'Action française, distingue le « pays réel » du « pays légal » (les institutions républicaines). Ces expressions lui servaient à affirmer dans les débuts de la Troisième République que la vie politique française (« pays légal ») serait totalement étrangère aux préoccupations et aux besoins de la France.
Le principe électoral et le suffrage universel
L'Action française pense que le vote nécessite une formation en science politique. Maurras en parlait ainsi : « La politique est une science parce qu'elle est un métier ou plutôt un art. Cet art de servir l'intérêt général suppose instruction, éducation, apprentissage, compétence. » Il continue : « les électeurs sont incapables de se prononcer en faveur du bien public, incompétents pour le discerner, inaptes à désigner les bons gouvernants[13].
Maurras pense que le suffrage universel est conservateur : « Nous n'avons jamais songé à supprimer le suffrage universel, dit-il. On peut dire que le suffrage universel doit élire une représentation et non un gouvernement, sans vouloir supprimer ce suffrage, et en voulant tout le contraire. Car ce suffrage, entre bien des vertus ou bien des vices, possède une propriété fondamentale, inhérente à son être même : Le suffrage universel est conservateur [...] »[note 7] ».
L'Action française s'oppose violemment à la démocratie, à la République, et au parlementarisme : « L'ultime recours de la restauration nationale résidait dans le coup d'État »[A 4], Maurras écrit d'ailleurs « la démocratie c'est le mal, la démocratie c'est la mort[13] ».
Mais en 1910, Maurras salue l'arrivée des femmes dans le cycle des études supérieures[D 3]. Considérant qu'elles seraient plus sensibles aux arguments traditionalistes et catholiques que les hommes, il demande le droit de vote des femmes[D 3] dès 1919, qui ne leur a été accordé que par l'ordonnance du 21 avril 1944 du Gouvernement provisoire de la République française.
C'est avec une conviction raisonnée que l'Action française, animée d'un esprit social hérité des enseignements catholiques, ouvrier de par ses positions contre-révolutionnaires[note 8] et prolétaire[note 9], expose à partir de 1908 « la nécessité d'incorporer le prolétariat à la société, de donner aux ouvriers de la grande industrie des garanties sérieuses qui fissent parti du statut national. » Ainsi, déjà favorable au corporatisme, elle devient sur le plan économique proche du patronat[B 1].
D'ailleurs, dans les années 1909-1910, déçu par la CGT, Georges Sorel se rapproche un temps de l'Action française — sans toutefois en partager le nationalisme ni la visée politique. Ses idées inspirent les initiateurs du Cercle Proudhon formé en décembre 1911 afin de rassembler syndicalistes révolutionnaires et monarchistes autour de l'instauration de salut publique d'une monarchie fédérative, donc sociale. Des tentatives de rapprochement avec le « syndicalisme jaune » de Pierre Biétry sont également effectuées[14]. Mais ces efforts pour gagner le monde ouvrier demeurent toutefois vains[15].
L'antisémitisme d'État
Dès sa création, l'Action française proclame un antisémitisme virulent contre Dreyfus. Puis, Charles Maurras lui influe une doctrine en théorisant une nouvelle forme d'antisémitisme, l'« antisémitisme d'Etat » pour qui, cette forme serait différente de l'« antisémitisme de peau »[16].
La Grande guerre modifie quelque peu ce statut. C'est la naissance des qualificatifs « juifs bien nés » et « juifs mal nés ». Les premiers sont les “patriotes” ou “Juifs français” qui ont montré qu'ils pouvaient « s'amender » du fait de leur engagement pendant la guerre, les seconds sont les Juifs étrangers. Cette distinction est appréciée par la plupart des « israélites[F 1] » : les Juifs français pensent en effet avoir acquis « un titre de propriété [français] définitif » pour eux et leur descendance[F 2]. Ainsi, l'antisémitisme de l'Action française évolue en déplaçant sa cible à l'extérieur des frontières[F 3].
Un exemple de ce changement : attaqué sur son extrémisme dans les années 1930, L'Étudiant français définit l'antisémitisme par le « refus » d'ouvrir « tout grand aux juifs internationaux les avenues du pouvoir en France »[F 4].
Selon Catherine Nicault, spécialiste de l’histoire des Juifs en France dans l’entre-deux-guerres, le regard des « Français israélites » à l'égard de cet « antisémitisme d'État » y est sensible voire transparent :
- « Hormis les antifascistes qui considèrent que les disciples de Maurras comptent au nombre des “pires ennemis des Juifs”, les “Français israélites” ont tendance à ne pas les mettre tout à fait dans le même sac que les autres. Il est apparu que la minorité juive “autochtone”, écrit-elle, profondément patriote, fait preuve d'une sensibilité, voire d'une porosité sans équivalent à l'égard des thématiques du nationalisme intégral et de l'AF. D'où des attitudes de compromis, une attirance, voire une imprégnation dans certaines de ses marges[F 5]. »
Dans les années 1930, l'argumentaire de Charles Maurras qui souhaite se démarquer de l'Allemagne hitlérienne se réfère à l'Histoire mais est aussi antisémite. Ainsi comme le souligne Carole Reynaud-Paligot[note 10], Maurras fait la distinction « entre l'antisémitisme allemand dont il expliquait la “tradition de brutalité” par les fondements biologiques de la notion de race, par l'idéologie de la race pure et un antisémitisme français à qui il déniait son caractère raciste en raison de son absence de fondements biologiques ». Afin d'imager ses propos, elle donne une citation de Maurras qui fait la lumière sur l'antisémitisme de l'Action française :
- « En pleine Occupation, nous avons publiquement dit au professeur anthropologue et philoboche Montandon que nous n'étions pas pour la petite sauce raciste de son “antisémitisme de peau”. Il ne s'agit pas de dire “Mort aux Juifs” qui ont droit à la vie comme toutes les créatures mais : “À bas les Juifs” parce qu'ils sont montés trop haut chez nous. Notre antisémitisme d'État consiste à leur reprendre. à leur interdire ce qu'ils ont pris de trop et en premier lieu, la nationalité française, alors qu'ils en ont une et indélébile, et qu'ils gardent toujours en fait. Qu'elle leur suffise donc ! Elle eut ses gloires et elle vient de récupérer un beau territoire au Proche-Orient [...] »[17].
Une certaine idée du pacifisme
L'Action française a toujours voué son existence au salut matériel de la patrie française. C'est dans cette logique qu'elle a toujours dénoncé le désarmement car pour elle, le désarmement tue la paix. Elle s'explique en autres dans un numéro spécial pour les élections législatives d'avril 1932 : « Tous les candidats vous diront qu'ils sont partisans de la paix. Mais pour faire la paix, il faut en prendre les moyens ! Ces moyens sont au nombre de deux : La force qui empêche les agressions et la sagesse qui prévient les causes de conflit. » [réf. souhaitée]
Maurras explique plus en détail son idée du pacifisme dans un article consacré au rapports franco-allemands dans l'entre-deux-guerres : « Les temps de l'arme haute sont ceux qui nous font respecter. Les temps de l'arme basse sont ceux qui nous font envahir. La guerre vient de l'arme basse. La paix vient du relèvement de notre arme. Il est inutile de tenter de soutenir le contraire. Le mot de paix armée signifie la paix respectée. Paix désarmée veut dire paix violée [...] ». [réf. souhaitée]
Les moyens de l'action : presse, Ligue d'Action française et Camelots du Roi
Fondation d'un journal quotidien
La Revue d'Action française est remplacée par Action française quotidienne, organe du nationalisme intégral, qui paraît pour la première fois le 21 mars 1908. Sa devise est une citation du duc d'Orléans : « Tout ce qui est national est nôtre ». Ce quotidien exista « jusqu'à l'été 1944, où il connut une fin abrupte, en même temps que le régime qu'il avait contribué à inspirer[A 5] ».
portant, entre autres décorations, la plaque de chevalier de l'ordre du Saint Esprit et, autour du cou, l'insigne de l'ordre de la Toison d'or.
Beaucoup de donateurs sont de la noblesse ; en 1912, le prétendant orléaniste au trône donne 1 000 francs par mois[A 6]. Mais cette presse — qui envoyait des milliers d'abonnements gratuits et qui devait payer les amendes aux tribunaux pour les articles diffamatoires qu'elle publiait — était fortement déficitaire et faisait régulièrement appel à des souscriptions pour lutter « contre l'or juif »[A 6]. Entre 1920 et 1926, « les pertes du journal s'élevèrent à près de cinq millions de francs ». Le milliardaire François Coty donna 2 millions de francs à l'Action française entre 1924 et 1928[A 7]. Entre 1930 et 1935, la perte moyenne dépassait le million de francs par an[A 8]. Finalement, « la seule période où le budget de l'Action française paraisse s'être trouvé en équilibre, c'est peu avant qu'il ait cessé de paraître, à Lyon, quand les ventes furent assurées et les autres activités en panne »[A 9], après avoir refusé, en 1941, les subventions du ministère de l'Information de Vichy dont bénéficiait la presse repliée dans la zone libre[A 10].
De nouvelles personnalités rejoignent les rangs du mouvement, telles le polémiste et romancier Léon Daudet, l'historien Jacques Bainville, le critique Jules Lemaître, l'écrivain Paul Bourget, l'économiste Georges Valois, etc.
On peut lire dans l'article initial :
- « Nous apportons à la France la Monarchie. La Monarchie est la condition de la paix publique. La Monarchie est la condition de toute renaissance de la tradition et de l'unité dans notre pays. C'est pour l'amour de cette unité, de cet ordre, que commence aujourd'hui notre guerre quotidienne au principe de la division et du mal, au principe du trouble et du déchirement, au principe républicain.
À bas la République ! et, pour que vive la France, vive le Roi[2] ! »
Suivaient les signatures d'Henri Vaugeois, Léon Daudet, Charles Maurras, Léon de Montesquiou, Lucien Moreau, Jacques Bainville, Louis Dimier, Bernard de Vesins, Robert de Boisfleury, Paul Robain, Frédéric Delebecque et Maurice Pujo.
Dès lors, l'ensemble de la presse maurrassienne rencontre un certain succès[18]. L'année 1908 voit aussi la naissance de la Revue critique des idées et des livres, qui est, jusqu'à la guerre, le « laboratoire d'idées » et l'organe littéraire du mouvement maurrassien.
Peu avant la condamnation papale, le quotidien vit son apogée. Ainsi, beaucoup d'officiers de l'Armée française sensibles au nationalisme intégral de Maurras[19] lisent le journal. En 1926, alors que le journal tire à près de 100 000 exemplaires[E 1], le journal nationaliste compte, selon Eugen Weber, 45 000 abonnés et le même nombre d'acheteurs au numéro[A 11] auxquels il faut ajouter les 25 000 abonnés du supplément du dimanche, L'Action française agricole[E 1]. En 1920, son tirage n'était que 60 000 exemplaires[20] Le 5 février 1934, le tirage atteint une pointe de 200 000 exemplaires[20]. Mais en 1939, il est revenu à 45 000 exemplaires.
Mais en cette même année, la condamnation romaine entraîne une non-reconduction de beaucoup d'abonnements bien que certains restent fidèles au journal tel le capitaine Philippe de Hautecloque qui sera un lecteur assidu de Bainville et de L'Action française dans les années 1930[21].
Au niveau militaire d’ailleurs, c’est à partir de 1928, qu’une page spéciale contenant la rubrique du général Lavigne-Delville est imprimée le 10 et le 25 de chaque mois formant ainsi la liaison entre presse, armée et pouvoir[22].
Quant à La Revue universelle, elle se vend en 1930 à 9 000 exemplaires[A 11] et La Restauration nationale, organe royaliste présent dans la région de La Rochelle depuis 1928, absorbe L’Écho de Touraine.
La Ligue d'Action française
En 1905 est créée la Ligue d'Action française. Son objectif déclaré est « de renverser la République et de rétablir la monarchie[E 2] ». Les adhérents prêtent serment où ils s'engagent « à combattre tout régime républicain » et à « servir par tous les moyens » la restauration de la monarchie[B 2].
Selon Ariane Chebel d'Appollonia, « la majorité [de ses] effectifs provient de la bourgeoisie » et « la part des ouvriers est très faible et n'ira qu'en diminuant »[E 3]. Paradoxalement, c'est l'effet inverse qui se produit dans le Languedoc méditerranéen : entre 1912 et 1914, une section de commis, une autre d'employés de commerce et un groupement de cheminots d'Action française se développent. Un « théâtre d'Action française » voit même le jour[F 6].
Mais dans son ensemble, l'Action française « devient peu à peu le refuge d'un conservatisme strict »[E 4], comme d'une obéissance souvent aveugle aux dirigeants du mouvement : selon l'historien Jacques Prévotat, « un des traits les plus frappants de l'emprise de l'Action française est la crédulité et la naïveté avec lesquelles les ligueurs accueillent sans l'ombre d'esprit critique les démonstrations des chefs du mouvement[B 3] ».
Concernant les femmes, la plupart des ligues nationalistes, au début du XXe siècle, comme celle de l'Action française, ne leur sont pas ouvertes[23]. Cependant, les liens étroits établis avec les milieux catholiques conservateurs ont permis le contact avec des groupements féminins.
L'Institut et les Camelots du Roi
En février 1906, l'Action française fonde son Institut afin, dit-elle, « de redresser les intelligences qu'ont égarées la littérature et la philosophie du dix-neuvième siècle, la presse, le haut enseignement de l'Université républicaine ». L'Institut, qui se compose de huit chaires, est financé par le colonel Fernand de Parseval[A 12].
L'Action française possède alors un grand prestige[24]. L'historien français Jean Touchard, dans l'article de l’Encyclopædia Universalis qu'il consacre à l'Action française, attribue trois raisons à l'influence du mouvement monarchiste sur l'opinion publique :
- d'abord, la pensée de Maurras « se présente comme un ensemble parfaitement cohérent » ;
- ensuite, une « doctrine d'opposition absolue » ;
- et enfin, « l'incontestable qualité littéraire de l'Action française, la liberté de ton dont témoigne la rubrique littéraire[25] ».
La doctrine de l'Action française attire alors une partie des élites catholiques[1], mais aussi une partie de la jeunesse française de droite[F 7], en particulier dans le « Quartier latin » à Paris[26] comme en témoigne le contingent important de sympathies que fournit l'École nationale des chartes avant et après la Première Guerre mondiale[A 13], de même que l'Institut catholique, les facultés de droit de la capitale et plus modérément celles de médecine et de pharmacie, les Beaux-Arts et la « Khâgne » du lycée Louis-le-Grand sous l'impulsion de André Bellessort[27]. Toutefois, en dépit de la présence de plusieurs normaliens maurrassiens au début des années 1930, tels Robert Brasillach ou Thierry Maulnier[28], l'École normale supérieure de la rue d'Ulm reste pour sa part largement réfractaire aux idées nationalistes[F 8], bien qu'elle ait été un vivier pour les pages littéraires du journal[29].
Les Camelots du Roi naissent de l'intervention de Maxime Real del Sarte qui protestait contre la réhabilitation du capitaine Dreyfus. Initialement destinés à vendre le journal aux portes des églises, ils acquièrent la célébrité par leurs « coups de main » dans la rue. On les voit en effet souvent défiler avec « dans la main une bonne canne, dans la poche un bon livre » selon l'expression de Henri Lagrange. Le recours à la violence est effectivement récurrent[G 3], pour empêcher l'expression d'idées différentes. Ils s'en prennent par ailleurs pour des « prétextes les plus futiles » à des professeurs juifs, comme le recteur Lyon-Caen ou le professeur Wahl[30]. Le doyen Alfred Croiset est également victime de campagnes de l'Action française[A 14].
En juin 1908, la jeunesse de l'Action française manifeste bruyamment contre le transfert des cendres d'Émile Zola au Panthéon de Paris. Les affiches du mouvement proclament alors : « La République est le gouvernement de ces étrangers plus ou moins naturalisés ou métèques, qui ces jours-ci souilleront du cadavre de leur Zola le Panthéon désaffecté ; ils accaparent le sol de la France, ils disputent aux travailleurs de sang français leur juste salaire, ils font voter des lois qui ruinent l'industrie […][note 11] ».
En décembre 1908, l'Affaire Thalamas refait surface : les Camelots veulent empêcher Amédée Thalamas d'assurer un cours libre à la Sorbonne sur « la pédagogie pratique de l'enseignement de l'histoire », perturbent ses cours et agressent le professeur. Thalamas avait déjà été la cible de l'Action française en novembre 1904, alors qu'il était professeur d'histoire au lycée Condorcet, pour avoir selon le mouvement « insulté Jeanne d'Arc » en offrant à ses élèves une vision positiviste de sa vie. Le jeune camelot Georges Bernanos est notamment arrêté pour avoir agressé Thalamas[F 9].
En février 1911, la Comédie-Française affiche une pièce d'Henri Bernstein. Très applaudi sur les théâtres du boulevard, il jouit d'une grande renommée. Son entrée à la Comédie-Française suscite l'opposition de l'Action française. Du 21 février au 2 mars, ses militants troublent les représentations et conspuent le dramaturge, qualifié par eux de « juif déserteur ». Suivent des manifestations nationalistes dont la plupart sont scandées par des « À bas les Juifs ! »[F 10].
Les Camelots du Roi sont aussi présents chez quelques étudiants et lycéens. Ainsi, l'Action française met à leur disposition une salle de réunions, une salle de lecture avec des journaux, des revues et une bibliothèque et crée pour les étudiants une bourse aux livres. Au début des années 1920, l'AF leur propose même un cercle de tennis et ouvre une salle d'armes à leur intention[F 11].
Un rayonnement politique important
De 1900 à 1926, l'influence de l'Action française est considérable et ne peut se jauger au seul tirage de son journal et encore moins aux effectifs des Camelots du Roi[C 5]. En effet, l'Action française se développe par delà les frontières françaises. Ainsi, peut-on voir une influence voire sa présence en Belgique, en Suisse, en Italie, en Espagne, en Roumanie mais aussi en Amérique du Sud et au Canada français.
De 1900 à 1914
En France
À ses débuts, l'influence de l'Action française se situe dans les salons provinciaux et repose sur certaines notabilités. Héritière des idées sociales de l’Église, elle tente de se rapprocher du prolétariat, ce qui donne naissance en 1911 au Cercle Proudhon. C'est dans ces années que l'AF obtient sa notoriété.
Si liée que soit la doctrine royaliste, elle n'est pas indivisible en ce sens que sans y adhérer on peut s'en inspirer partiellement. L'Action française possède ainsi des zones d'influence, un rayonnement bien plus étendu que le cercle de ses militants.
À l'étranger
Dans la période de l'avant-guerre, l'AF n'est pas très développée à l'étranger. La réputation de l'Action française à l'étranger commence, en Suisse Romande, dans les années 1908-1909. Le journal quotidien vient alors d'être lancé et il y est fortement lu et commenté, principalement via les actions des Camelots du roi qui impressionne une partie de la jeunesse intellectuelle, comme les frères Cingria[J 1]. La jeunesse étudiante romande commence dès lors à être influencée, telle La Salévia, association genevoise d'étudiants catholiques[31]. Il faut aussi noter la création, en 1910 à Lausanne et en 1911 à Genève, d'un groupe franco-suisse d'AF[J 2]. Quant à la Belgique, l'Action française y est présente à Gand et à Bruxelles sans toutefois y être adaptée voir en étant « caractérisée par une complète marginalité » jusqu'en 1914, selon le mot de l'historien Eric Defoort. Il faut aussi ajouter un groupe romain en 1912[J 2] et un groupe londonien dès 1914[J 3], auxquels s'ajoutent des mentions de Charles Maurras en Espagne et au Canada français, qui commence a y être connu. Ainsi, à la veille du premier conflit mondial, l'Action française « reste hors de France un phénomène marginal »[J 3].
À partir de 1918
Si les lendemains du premier conflit mondial marquent l'acmé de l'influence de l'Action française en France, il apparaît que vis-à-vis de l'étranger, le premier conflit mondial coïncide avec une croissance de son expansion[J 3].
En France
De ce fait, dans les années 1930, les étudiants français sont largement sensibles aux thèses nationalistes et patriotiques de l'Action française[32]. « L'enseignement de Maurras séduit de larges fractions de la jeunesse »[C 5].
Plus largement, à cette époque, selon Eugen Weber, bien des Français « sont maurrassiens sans le savoir »[33]. « Le général de Gaulle lui-même a été marqué par l'influence de Maurras qui d'ailleurs est resté germanophobe jusqu'à la fin. »[34]
Comme le relève René Rémond, l'Action française est importante aux yeux de l'Histoire : « [Elle a] rajeuni un royalisme déclinant, renouvelé sa doctrine, doté d'un système de pensée la passion nationaliste et tenté une synthèse originale de leurs apports même contraire »[C 5].
La philosophie réactionnaire apportée par l'Action française imprègne donc une partie de l'opinion française[C 5] facilitant le recrutement. Ainsi, de nouvelles générations arrivent : Robert Brasillach, Thierry Maulnier ou encore Lucien Rebatet. Mais plus tard, elle est frappée par de multiples dissidences. Georges Valois trouve la position de l'AF trop archaïque. Plus tenté par le fascisme que par le monarchisme maurrassien, il veut un chef qui combatte les financiers et les hommes politiques. Il se sépare donc de l’Action française pour fonder le Faisceau, premier parti fasciste français, entraînant environ 2 000 adhérents avec lui. À la suite, Louis Dimier se brouille avec Charles Maurras et décide alors de quitter la vie politique. Des éléments monarchistes comme le Dr Martin ou Eugène Deloncle, lassés du conservatisme de la ligue et souhaitant une action directe, s'éloignent du mouvement maurassien pour fonder la Cagoule, dont l'action est dénoncée par les dirigeants de l'Action française.
En 1934, l'Action française rassemblait 60 000 adhérents, dont 7 000 dans la région parisienne[35].
Hors de France
Le développement de l'Action française n'est pas propre à la France. Ainsi, le maurrassisme continue de se développer en Espagne où l'Acción Española, de sensiblité maurrassienne, joue un rôle important durant les années 1930[J 4].
Un mouvement alerte à l'aube de la Première Guerre mondiale
L’Avant-Guerre
Les années 1908-1914 sont des années de fort développement pour l'Action française. La jeunesse, les ligueurs, les Dames et les Jeunes Filles, le journal, réagissent sans trêve ni merci contre l’antimilitarisme, l’antipatriotisme et le désarmement, ce que l’Action française considérait comme « la décomposition et l’affaiblissement de l’esprit national qui ont suivi l’affaire Dreyfus. » Dans ces années l'idéologie de l'Action française se constitue comme un nationalisme antisémite, théorisant l'antisémitisme d'état et multipliant les insultes contre les Juifs dans son organe de presse[36].
Contexte historique
En 1906, Georges Clemenceau assure pour la première fois la présidence du Conseil. Avec son gouvernement et son ministre de la Guerre, le général Picquart, il appuie la révolution Jeune-Turque. Cette révolution a pour conséquences l’annexion en 1908 de la Bosnie-Herzégovine occupée depuis 1878, par l'empereur d'Autriche, roi de Hongrie, l’agitation des nationalismes orientaux ainsi que la subversion de l’Orient, facteurs non négligeables des tensions qui règnent alors en Europe.
En 1907-1908, alors que Clemenceau et Picquart occupent toujours les mêmes postes, le budget militaire français ne cesse de diminuer alors que celui de l’Empire allemand ne cesse de s'accroître : l’Allemagne dépense 431 millions de plus que la France[37]. Les cabinets suivants (Briand, Monis, Caillaux) ne modifient en rien cette baisse budgétaire.
Quelques années plus tard, en novembre 1911, la France, dans le but de tempérer la crise d'Agadir, cède à l'Allemagne, une partie du Congo français, en échange de la reconnaissance du protectorat français sur le Maroc. A court terme, l'effet attendu est positif mais à moyen terme cela n'est pas le cas. Ainsi, après le compromis d'Agadir, l'Allemagne cesse de s'intéresser au Maroc pour mieux s'intéresser aux évènements qui se déroulent alors en Orient. En effet, l'annexion de la Bosnie-Herzégovine, conséquence de la Révolution turque, cristallise la haine des Serbes et des panslavistes à l’égard de l'État habsbourgeois en précipitant certains orthodoxes ou serbocrates Serbes, dans le terrorisme. C'est le cas de Gavrilo Princip, assassin de l'archiduc François Ferdinand, héritier du trône des Habsbourg et de son épouse Sophie. Leur assassinat à Sarajevo, le 28 juin 1914, servit de prétexte au déclenchement de la Première Guerre mondiale.
Le coup d'Agadir, la Révolution Jeune-Turque, l'annexion de la Bosnie-Herzégovine, sont vus par Maurice Barrès, Albert de Mun et les dirigeants de l’Action française, parmi lesquels on peut citer Maurras, Daudet et Bainville, comme des facteurs déclenchants d'un hypothétique péril imminent. Ils sonnent alors l’alerte, s’efforcent d’instruire les pouvoirs publics pour avertir la population française et étrangère dans les colonnes de leur journal.
Selon René Girault, les années 1910-1912 marquent le « réveil national » français face à la menace allemande, l'Action française y participant largement[38]. Parmi les premiers « réveillés », on peut citer le socialiste Marcel Sembat qui écrit en 1913, le pamphlet « Faites un roi, sinon faites la paix » dans lequel « il soutient que le patriotisme belliqueux ne peut convenir à un républicain, à plus forte raison à un socialiste[39]». Un autre socialiste, Charles Andler, dénonce en 1913 la volonté d’agression de l’Allemagne.
Les élections législatives de 1914 ont pour thème « la folie des armements ».
« Depuis que la Monarchie est tombée », écrit Charles Maurras dans le discours préface (1909) du Petit Manuel de l’Enquête sur la Monarchie (1928), « le cœur du pays est ouvert, l’Étranger est entré trois fois dans la capitale, il l’a menacée une quatrième fois, et, si l’on en cherche la cause, on voit que la Démocratie parlementaire ou plébiscitaire n’a cessé d’y contribuer, tantôt, comme en 1792, par l’imprudente volonté de son initiative guerrière, tantôt, comme en 1914, par un désarmement qui provoquait l’initiative de l’ennemi. »
Le rapport Humbert
En 1912 puis en 1913, l’Action française soutient les cabinets Raymond Poincaré et Louis Barthou qui essayent de redresser le budget militaire. Puis, le gouvernement retourne aux mains des radicaux et des socialistes qui, malgré l’assassinat de Gaston Calmette, protestent contre la loi des trois ans.
Les 13 et 14 juillet, à la tribune du Sénat, Charles Humbert révèle les résultats de la politique menée jusque-là [note 12] Après cette séance, Georges Clemenceau s’écrie : « Depuis 1870, je n’ai pas assisté à une séance du Parlement aussi émouvante, aussi angoissante… La vérité, c’est que nous ne sommes ni défendus ni gouvernés. »[40]
À quinze jours des hostilités, la France, selon le commentaire de Maurras, était mise en face du vrai.
La Guerre dans la littérature d’Action française
Jacques Bainville dans ses articles qui ont formé ses livres Le Coup d’Agadir et La Guerre d’Orient, considérait qu'en cédant le Congo, la France aurait surexcité les appétits germaniques. À la même époque, L’Avant-Guerre de Léon Daudet expliquerait « avec preuves et documents irréfutables, que l'invasion commerciale et industrielle allemande couvre un vaste réseau d'espionnage. »[41]. L'ouvrage est sous-tendu par un « antisémitisme délirant » et théorise un complot de l'« Anti-France » se situant dans la lignée de Drumont[36]. Selon l'auteur nationaliste Louis Marchand, écrivant dans les années 1920, il s'en serait suivi une offensive morale des Allemands tournée contre Daudet, Maurras et l'Action française[42].
Charles Maurras, quant à lui, décrivait avant l'heure les conséquences du prochain holocauste : « Cinq-cent mille jeunes Français couchés froids et sanglants sur leur terre mal défendue. »[43] Il témoignera plus tard, devant la Cour de justice du Rhône, de l'œuvre accomplie par l'Action française :
« Maurice Pujo imprima à ses Camelots du Roi, à ses Étudiants d'Action Française, aux fonctionnaires d'élite de nos ligues, ce magnifique esprit national, civique, militaire, qui fit reflamber dans la nouvelle jeunesse une âme de patriotisme combattif et pur. Avec Marius Plateau et Maxime Réal del Sarte, on peut dire que, de 1908 à 1914, six années de batailles de rues et de prétoires, six années de prison et de triomphe, restaurèrent le moral national de toutes les classes de la nation. Car les jeunes ouvriers, les jeunes employés étaient aussi nombreux dans leurs rangs, plus nombreux peut-être que les jeunes bourgeois. Ce vieux sang français se réveillait de tous les purs sangs de ses hérédités, mais roulant des métaux d'une vaillance et une générosité inconnues. Le nom de Jeanne d'Arc, son oriflamme, sa devise, les fleurs que l'on apportait à ses statues, comme à des autels, restent le symbole historique de cette époque de feu. Mais on avait commencé par punir Thalamas, on finissait, comme il le fallait bien, par soutenir le gouvernement qui tenait le drapeau et l'épée de la France. Quand M. Barthou fit voter la loi de trois ans, il disait : “Cela n'aurait pas été possible sans les Camelots du Roi”, c'est-à-dire l'Action française, qui tinrent en respect l'anarchie révolutionnaire[44]. »
— Charles Maurras devant la Cour de justice du Rhône, Le Procès de Charles Maurras - Cour de justice de Lyon, janvier 1945.
La Grande Guerre
Fidèle à elle-même, quand la guerre éclate en 1914, l'Action française oublie ses idées et se range derrière la nation française. Ainsi va-t-elle faire écho à Raymond Poincaré qui préconise l'Union sacrée. Dans ses Mémoires, à la date du 28 octobre 1917, on peut lire : « Depuis le début de la guerre, Léon Daudet et Charles Maurras ont oublié leur haine contre la République et les républicains, pour ne plus penser qu’à la France » [45]
Le Bonnet rouge
Le complot des panoplies
Morts et disparus
L'entre-deux-guerres
Affaires intérieures
L'apogée électoral : 1919-1924
L'Action française atteint son apogée au lendemain de la Première Guerre mondiale et reçoit l'hommage public de Raymond Poincaré[46],[F 12]. Aux élections législatives de 1919, les listes d'Union nationale, soutenues par l'Action française, obtiennent 30 élus, dont Léon Daudet à Paris, ainsi que des royalistes légitimistes et des conservateurs[B 4], parmi lesquels Xavier de Magallon, Victor Rochereau, Xavier Vallat, etc[A 15]. Autour de la ligue gravite aussi un Comité des Dames et de nombreux sympathisants antiféministes comme Marthe Borély. L'influence intellectuelle de Maurras est à son zénith alors que Jacques Bainville et Henri Massis fondent la Revue universelle dans laquelle débutent Jean Cocteau, Pierre Drieu La Rochelle ou encore Henry de Montherlant[46].
En 1924, l'Action française prône un « Bloc de droite »[B 5], mais la force du sentiment républicain empêchait de passer d'une alliance de fait à la Chambre à une coalition assumée en période électorale[A 16]. L'Action française se voit donc contrainte d'affronter isolée les élections de 1924, échec cuisant qui montre alors « l'inefficacité de l'Action française en matière électorale[A 17] » en dehors de circonstances exceptionnelles comme celles de 1919.
Procès et prison
La lettre à Shrameck
Le 9 juin 1925, l'article quotidien de Charles Maurras est remplacé par deux lettres ouvertes. La première est adressée au préfet de police de Paris, Alfred Morin et la seconde au ministre de l'Intérieur, Abraham Schrameck[47].
Ces lettres ouvertes font suite à une série d'attentats qui eurent lieu à l'encontre des royalistes et plus généralement des patriotes. Maurras énumère au préfet de police les divers attentats : celui des anarchistes Germaine Berton et Georges Taupin, de Maria Bonnefoy, etc. « Sept cadavres en moins de six mois, sept hommes massacrés par la révolution amie de Blum et de Schrameck, il faut avouer que c'est excessif », « nos amis [...] estiment être allé un peu trop souvent au cimetière », ces morts « forment une pléiade funèbre qu'il est tout à fait inutile de laisser s'accroître. »
La lettre adressée au ministre de l'Intérieur fait état de la politique qu'il mène ou plutôt qu'il ne mène pas contre la pègre. Maurras demandera donc le meurtre de Schrameck : « Il suffira d'essayer de nous désarmer et de nous livrer à vos bourreaux chinois. Vous subirez la peine à laquelle vous serez condamné. C’est sans haine et sans crainte que je donnerai l’ordre de verser votre sang de chien s’il vous arrive d’abuser de la force publique pour ouvrir les écluses du sang français sous les balles et les poignards de vos chers bandits de Moscou. »
Cette lettre est cependant plus connue pour la véhémence antisémite de Maurras vis-à-vis d'Abraham Schrameck.
Léon Daudet : prison, libération et exil
Condamnation par la Papauté (1926-1939)
Le 27 août 1926, L'Aquitaine, semaine religieuse du diocèse de Bordeaux, publiait une lettre du cardinal Andrieu. Celle-ci dénonçait la question de Dieu traitée par les dirigeants de l'AF dans leurs livres et articles alors qu'ils s'y déclarent athées ou agnostiques. Le 5 septembre, Pie XI écrit au cardinal Andrieu. S'il le félicite de sa « vigilance paternelle, il s'exprime avec plus de mesure en n'émettant qu'une simple mise en garde »[48].
Après la mise à l'Index de certaines œuvres ouvertement agnostiques de Maurras, Rome condamne l'Action française le 29 décembre 1926. L'ensemble des ouvrages de Maurras ainsi que le quotidien sont mis à l'Index par décret du Saint-Office. Le 8 mars 1927, les adhérents de l'Action française sont interdits de sacrements. Ceci porte un coup très dur au mouvement. En effet, en froid avec la République, beaucoup de catholiques avaient adhéré ou sympathisé avec les idées de l’Action française mais cette condamnation romaine entraîne le départ de pléthore d’entre eux, les détournant de l’engagement antirépublicain au bénéfice d’un engagement répondant à l’action catholique promue par Pie XI. Ainsi, bien qu’elle soit restée l’organisation la plus importante au défilé de Jeanne d’Arc de 1927, son journal quotidien voit ses abonnements baisser en nombre important.
Au niveau de l’épiscopat, entre 1926 et 1939, les partisans de Maurras se trouvent peu à peu remplacés par de jeunes prélats moins engagés politiquement. En 1936, la guerre d’Espagne ravive l’anticommunisme au sein de l’Église. De nombreux ecclésiastiques, par l’intermédiaire des carmélites de Lisieux, font campagne à Rome en faveur d’une réconciliation avec l’Action française, qui aboutit en juillet 1939 à la levée de l’interdit par le nouveau pape Pie XII.
À l'occasion du décès de Pie XI, Pierre-Henri Simon écrit que la condamnation de l'Action française avait été, selon lui, « un des actes doctrinaux et disciplinaires les plus considérables du pontificat. »[note 13]. Le principal reproche fait par Rome au nationalisme intégral était de subordonner la religion à la politique et au nationalisme, car Charles Maurras, rationaliste, se définissait comme agnostique, et ne soutenait le catholicisme que comme le moyen d'unifier la Nation[réf. souhaitée].
L'interdiction faite aux catholiques de lire L'Action française provoque une chute du tirage du journal qui perd la moitié de ses lecteurs entre 1925 et 1928[A 18]. La levée de la condamnation en 1939 ne permet cependant pas au journal et au mouvement de retrouver l'audience perdue.
Les années 1930, l'Action française au cœur des controverses
En mars 1925, c'est l'affaire George Scelle qui commence à inscrire le mouvement maurrassien dans une ligne de controverses qui ne cessera plus. Cette première affaire rassemble autour de l'Action française de nombreuses organisations hostiles aux ministères radicaux-socialistes[49].
Dans un contexte de crise économique et de scandales politiques — notamment l'affaire Stavisky —, les ligueurs d'Action française sont au premier rang de la manifestation antiparlementaire du 6 février 1934[50],[51],[note 14] qui vise avant tout à protester contre la révocation par Édouard Daladier, nouveau président du Conseil, du préfet de police de Paris, Jean Chiappe[52], du fait de sa proximité avec l'extrême droite[53]. Cette révocation est aussi liée à la découverte par Daladier que Chiappe a freiné l'instruction de l'affaire Stavisky. La manifestation dégénère en combat de rue[54], notamment au pont de Solférino. Le colonel de la Rocque, à la tête de la plus importante des organisations présentes, les Croix-de-Feu, gagne l'esplanade des Invalides mais refuse le coup de force. L'objectif de l'Action française, prendre par la force le contrôle de la Chambre des députés et renverser la République, n'est finalement pas atteint. L'absence de coordination préalable entre les différentes ligues et leur rivalité font de cette journée un échec : s'ils échouent, la violence des affrontements fait une vingtaine de morts parmi les militants d'Action française[B 6], soit deux tiers des victimes[E 1]. Cet échec voit le départ de beaucoup de membres actifs comme Jacques Renouvin, convaincus finalement que la Ligue est impuissante et vouée à la sclérose doctrinale[E 1]. Le lendemain, le 7 février 1934 au matin, le journal L'Action française est saisi chez tous ses dépositaires à Paris et dans le département de la Seine, sur ordre du nouveau préfet de police. L'AF engage alors une instance contre le préfet devant la Justice, accordée par la suite par le Tribunal des conflits qui juge que la mesure incriminée constituait une voie de fait[55],[note 15]. Par la suite, l'Action française crée le groupement L'Ordre français avec deux autres ligues d'extrême droite : Solidarité française et les Jeunesses patriotes[A 19].
De janvier à mars 1935, les grèves dans les facultés de médecine contre la présence d'étudiants étrangers sont marquées par une série de manifestations organisées par l'Action française ; les noms de professeurs à consonance étrangère ou juive sont conspués et les slogans proclament « Dehors les métèques »[F 13]. Le jeune François Mitterrand, alors étudiant à l'École libre des sciences politiques, participe notamment au cortège du 1er février 1935.
Le 9 avril 1935, Maurras publie dans L'Action française un violent article antisémite contre Léon Blum, qu'il traite de « détritus humain », ajoutant : « C'est un homme à fusiller, mais dans le dos[56] ».
Le 9 février 1936 meurt l'historien et journaliste Jacques Bainville, académicien et grande figure de l'Action française. Ses obsèques ont lieu quatre jours plus tard, le 13 février, et rassemblent près de 10 000 personnes, le maréchal Pétain et le maréchal Franchet d'Espérey, d'anciens ministres, des ambassadeurs, des académiciens, des sympathisants d'Action française, des Camelots du Roi, mais aussi des opposants au mouvement. Alors que la foule attend le passage du cortège funèbre, la voiture de Léon Blum traverse le boulevard Saint-Germain et s'arrête en face. Un groupe d'anciens Camelots, exclus de l'Action française et mené par Jean Filliol (futur fondateur du CSAR), suit le cortège indépendamment de toute délégation d'Action française[A 20],[note 16]. L'ayant reconnu, il profite de l'occasion pour l'attaquer violemment : « Blum — qui avait quand même 64 ans — est attaqué et roué de coups. Il est blessé à la tempe par un coup de barre de fer »[57]. Sauvé par l'intervention d'ouvriers qui travaillaient sur un chantier rue de l'Université, Blum, « bless[é] légèrement[A 21] », parvient à échapper au lynchage, le visage couvert de sang[58]. Interrogé par la police, il lui dira qu'il lui est impossible de reconnaître ses agresseurs[59]. Le conseil des ministres se réunit d'urgence et décrète par la voix d'Albert Sarraut la dissolution de la Ligue d'Action française, de la Fédération nationale des Camelots du Roi et de la Fédération nationale des étudiants d'Action française avec effet immédiat, en application d'une loi contre les ligues votée un mois plus tôt.
À la suite de la dissolution, des perquisitions sont menées dans les locaux de l'Action française, où l'on retrouve le chapeau de Blum[60], et au domicile de Maurice Pujo, Charles Maurras, Maxime Real del Sarte, Lucien Lacour, François de Lassus, Georges Calzant et Pierre Juhel[61]. Dans un sentiment de vengeance et de haine, le 19 février, le quotidien monarchiste profère de nouvelles menaces antisémites : « À bas les Juifs ! Ceux qu'on avait le tort d'admettre à égalité affichent une ridicule ambition de nous dominer. On les mettra au pas, et la petite peine n'ira pas sans plaisir[A 22] », menaces qui s'amplifieront lors de la victoire du Front populaire en mai, Maurras dénonçant un « cabinet juif ». L'Action française, quant à elle, y voit l'œuvre d'un complot juif[62] et « la riposte du youpin »[A 22].
En juillet, L'Action française accuse à tort Roger Salengro d'avoir déserté pendant la Première Guerre mondiale et joue un rôle majeur dans la violente campagne de diffamation menée, avec le quotidien d'extrême droite Gringoire, contre le ministre de l'Intérieur du Front populaire. Découragé, saisi par « le dégoût d'avoir à lutter contre une calomnie insupportable »[A 23], Salengro se suicide le 18 novembre 1936[63]. Cette accusation se révèlera infondée.
Politique extérieure : Les paradoxes de l'antigermanisme, entre appel au réarmement et pacifisme de droite
Les années 20, ou maintenir définitivement l'Allemagne à terre
L'Action française continua après la Grande Guerre à développer un antigermanisme affirmé dès ses origines : pour elle, « quel que fût son régime [...] l'Allemagne était l'ennemie de la France[A 24] ». Ainsi, considérant que c'était l'unification de l'Allemagne réalisée par Bismarck qui avait créé au sein du peuple allemand un nationalisme si agressif qu'il avait fini par menacer l'existence même de la France, elle réclama que le Traité de Versailles s'inspire des traités de Westphalie et répartisse le peuple allemand entre plusieurs États, plusieurs Allemagnes, ce que Maurras nommait « la paix Bainville ». Cependant, l'Action française eut beau réclamer l'annexion du Landau, de la Sarre et l'établissement d'un protectorat français sur la Rhénanie[E 5], le Traité de Versailles ne répondit pas à ses attentes sur ce point, se contentant de prévoir l'occupation de la rive gauche du Rhin (Rhénanie) par les Alliés pour quinze ans.
Jacques Bainville fut le plus prestigieux relais de cette volonté perpétuelle de l'Action Française de dénoncer un germanisme qui, écrivait Bainville, « existe en dehors de l'histoire, au-delà des frontières ou des coutumes, une idée, une idéologie qui peut revendiquer Riga aussi bien que Strasbourg, la Bohême non moins aisément que l'Autriche : ce nationalisme idéaliste tend aux ambitions infinies »[A 25]. Dans ce cadre, il réclamait les garanties les plus concrètes pour contraindre l'Allemagne à respecter les traités qui avaient clôturé la Grande Guerre, quitte, en échange, « à se concilier les Allemands aux dépens des nouvelles nationalités nées sur ses frontières orientales »[A 26].
L'obsession, chez les partisans d'Action française, de contenir la puissance allemande, trouva rapidement une première occasion de s'inquiéter : isolées depuis la fin de la guerre, l'Allemagne et l'URSS conclurent en 1922 à Rapallo un traité les liant par une union diplomatique, militaire et commerciale, ce qui renforça « Bainville dans la conviction que le bolchevisme et le pangermanisme [prétendaient] à l'hégémonie européenne »[E 5]. Dans la même logique anti-germanique l'AF était hostile à la politique de rapprochement franco-allemand engagée par Briand, politique jugée laxiste par les royalistes car trop passive, « un pacifisme sentimental et purement verbal »[I 1].
Confrontée aux difficultés de l'Allemagne à payer ses réparations de guerre, défaut qui déstabilisait les finances françaises, la France décida de faire pression sur elle en s'engageant, le 11 janvier 1923, dans l'occupation de la Ruhr, centre métallurgique de l’Allemagne sur la rive droite du Rhin. L’Action française soutint l'expédition. La situation économique et financière de l'Allemagne demeura cependant très difficile et, en juillet 1924, pour lutter contre l’hyper-inflation qui mettait en danger la survie de la République de Weimar, fut organisée aux États-Unis, une commission dite « des réparations » présidée par Charles Dawes, qui élabora un plan de sauvetage. Ce « plan Dawes », prévoyait d’imposer le paiement par l’Allemagne d’importantes réparations à ses anciens adversaires et de soumettre la liquidation et le versement de ces sommes à un contrôle politique. Il visait également la fin de l'occupation de la Ruhr. Confrontée à de graves difficultés financières comme à la pression de ses alliés, la France finit par accepter les propositions du Plan Dawes et retira ses troupes : le 25 août 1925, l'armée française avait évacué la Ruhr. L’Action française commença alors une campagne critique à l'égard de ce retrait qu'elle jugeait précipité.
Mais en 1929, au plan relativement autoritaire de Dawes, arrivé à son terme, se substitua, sous la pression américaine, le « plan Young »[note 17]. Plus enclin à ménager l'Allemagne, il transformait sa dette politique, directement prélevée sur les recettes allemandes (douanes notamment) par les gouvernements créanciers, en une dette commerciale, garantie par l’État allemand et dont le paiement devait s'échelonner sur 59 ans jusqu'à 1988[A 27]. Les alliés ne disposaient plus dès lors de leviers économiques ou financiers pour faire pression sur l'Allemagne. Mieux, « une fois que le gouvernement allemand aurait donné son accord à ce plan, il pouvait prétendre s'être acquitté des conditions du traité de paix et pouvait demander qu'il fût mis fin aux mesures coercitives destinées (antérieurement) à en assurer l'exécution - en d'autres termes, il pouvait demander l'évacuation de la Rhénanie entière »[A 28]. Le Royaume-Uni approuva cette option et le gouvernement français, soucieux de démontrer les bonnes dispositions de la France, également. L’Action Française, fermement opposée au plan Young, organisa plusieurs manifestations : ainsi, durant les discussions à la Chambre des députés, elle largua des tracts par avion au-dessus de Paris pour alerter l‘opinion. Cependant, la mesure fut définitivement approuvée le 5 avril 1930 : dès le lendemain, l’Action Française, sous la plume de Charles Maurras, se désolait de cet abandon des gages concrets au profit de promesses qui risquaient fort, selon lui, de n’être jamais tenues[note 18].
Un an plus tard, en mars 1931, l'AF s'inquiéta d'un projet d'union douanière entre l’Allemagne et l’Autriche, qu'elle voyait comme la confirmation de l'erreur qu'aurait constitué l’abandon du plan Dawes et l’évacuation de la Ruhr par les troupes françaises : il semblait préfigurer l'union de l'Allemagne et de l'Autriche, interdite par les Alliés lors du traité d’armistice de 1919[I 1].
Sympathies pour le fascisme italien
La dictature fasciste italienne était perçue positivement par l'Action française d'abord pour la politique qu'elle menait au-delà des Alpes. Mussolini était ainsi fort estimé : « la sympathie, l'admiration de l'Action française allaient toutes entières à Mussolini[A 29]. » Si un Léon Daudet reprochait au Duce d'être trop modéré[A 30] et affirmait à son propos que « l'Action française, elle aussi, s'emparerait du pouvoir par la force, et que l'épuration faite par les fascistes ne serait rien à côté de ce dont la France serait témoin alors[A 31] », Charles Maurras appréciait la dimension hiérarchique, antiparlementaire et antisocialiste du fascisme italien[A 31].
On passait ainsi plus ou moins sous silence les importantes divergences entre les deux mouvements : s'ils avaient tous deux les mêmes ennemis, s'ils étaient issus de la même réaction antidémocratique, ils se séparaient sur la question de la place de l'État : « alors que l'Action française mettait l'accent sur les dangers de la centralisation et du pouvoir de l'État, Mussolini visait à s'emparer de l'État pour utiliser le pouvoir jusqu'à ses dernières limites ; il existait une différence radicale entre l'anti-étatisme maurrassien et la statolatrie fasciste »[A 31].
Mais c'est surtout comme allié potentiel face à la montée en puissance de l'Allemagne, que l'Italie fasciste intéressait l'Action Française. Jacques Bainville y voyait le seul allié possible face aux ennemis de la France, l'Allemagne et la Russie soviétique, thèse qu'il développa dans son ouvrage Les Conséquences politiques de la paix[64]. L'Action française combina alors ultrapacifisme et volonté de créer une coalition franco-italienne ou « Union Latine » qui serait dirigée contre l'Allemagne[65]. Ainsi l'Action française approuva-t-elle en janvier les accords signés à Rome entre Pierre Laval et Benito Mussolini et soutint Mussolini durant la guerre d'Éthiopie[A 32]. Dans cette perspective, l'engagement antifasciste du nouveau président du Conseil Léon Blum dans l'affaire d'Éthiopie amena Maurras, en juin 1936, à dénoncer dans ses articles le « complot judéo-communiste » dirigé par Blum et à appeler au meurtre de ce dernier[66].
Les autres régimes autoritaires méditerranéens étaient également appréciés de l'Action Française du fait qu'ils étaient contre-révolutionnaires. Elle soutenait le régime de Salazar, le dictateur du Portugal sous l'égide du maréchal Carmona. Également contre-révolutionnaire, le général Francisco Franco était admiré par Maurras qui affirma: « il y a peu d'esprits plus ordonnés, de volontés plus conservatrices, plus humaines et attentives à la peine du peuple[2] ». L'Action française soutint son putsch contre la République espagnole en organisant et en participant à la Bandera Jeanne d'Arc.
L'Action française et le nazisme
Une menace nazie régulièrement dénoncée
La préoccupation constante de la menace que représenterait l'Allemagne pour la France qui caractérise l'Action française la rendait particulièrement sensible à la montée du nazisme : dès 1930, alors même qu’Adolf Hitler était encore loin du pouvoir, l’Action française signalait ce mouvement dans ses colonnes comme « un des plus grands dangers pour la France »[A 33]. Jusqu'au déclenchement de la guerre, l'Action française ne cessa de souligner la menace que constituait pour la France la volonté de construire une Allemagne forte qu'affichait, dans la continuité de la vision bismarckienne[67], le nationalisme hitlérien, « incarnation de la dictature césarienne et de l'individualisme démocratique »[E 6]. Dès lors, Maurras milita pour la publication d'une traduction non expurgée de Mein Kampf afin de mieux cerner l’idéologie nazie et sensibiliser la population française aux dangers qui la menacaient outre-Rhin[A 34].
Les ambivalences de l'AF vis-à-vis de la politique nazie
Le péril que faisait peser l'Allemagne nazie sur l'avenir de la France préoccupait l'AF. Mais elle n'avait que peu d'intérêt pour les implications de la doctrine national-socialiste à l'intérieur des frontières allemandes et tournait en dérision l'indignation facile contre l'antisémitisme d'Hitler[A 35]. Rien ne justifiait que l'on se préoccupât d'« aider les communistes souffrant sous la tyrannie de Goering » ou de condamner des autodafés qui s'appliquaient à des ouvrages « dans la lignée de Marx ou d'André Gide »[A 36]. Comme le souligne Eugen Weber, « l'égoïsme sacré avait plus de poids que la réalité des camps de concentration »[A 36]. L'Action Française se signala ainsi par son indifférence aux catégories de population persécutées par le régime nazi : si, après l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler en janvier 1933, L'Action française, sous la signature de Georges Gaudy, publia un article sur « la vie affreuse des prisonniers dans les camps de concentration », elle considérait qu'il s'agissait strictement d'une affaire allemande[A 37]. Les victimes du nazisme réfugiées en France dès le mois de juin étaient alors décrites comme une « invasion judéo-maçonnique » dans le journal[68],[note 19], et quand Léon Blum, qualifié à cette occasion par Léon Daudet d'« Hébreu sanguinaire »[69], proposa en août 1933 un boycott économique et moral de l'Allemagne à la suite des premières persécutions nazies, l'Action Française condamna sa proposition, tout en refusant de sauver des « communistes » et des « Juifs » et négligeant le fait que c'était « précisément ce [qu'elle] avait réclamé pendant si longtemps », le réarmement en moins[A 37].
Mais l'antisémitisme et la xénophobie de l'Action française ne signifient pas son adhésion à la doctrine nazie. D'ailleurs, le mouvement royaliste distinguait l'antisémitisme hitlérien de son « antisémitisme d'État » qui visait à la discriminer les juifs sans viser leur élimination physique[D 4] et approuva en 1937 la publication de l'encyclique Mit brennender Sorge par le pape Pie XI, qui condamnait différents points de l'idéologie nazie[D 5]. De fait, comme l'écrit Eugen Weber, « l'Action française n'avait aucune sympathie particulière pour la théorie nazie, encore moins pour les hommes qui l'appliquaient »[A 35]. Cependant, les réticences de l'Action française face aux théories nazies ne reposaient pas sur une quelconque compassion pour les victimes du régime hitlérien[A 38]. C'est avant tout par la primauté que le nazisme accordait à la race et à l'État qu'il était incompatible avec le corpus théorique de l'Action française, hostile à l'étatisme et mal à l'aise à l'idée d'une nation fondée sur une identité raciale biologique commune[A 35].
Pourtant, le développement du nazisme ne fut pas sans exercer une certain fascination sur les membres de l'Action française. Comme le souligne Eugen Weber, « sous l'hostilité invariable, on discerne des traces de respect à l'égard d'un ennemi de taille » et dont l'antimarxisme radical séduisait[A 39]. Même si Maurras ne cessa de prévenir ses amis et disciples contre les dangers de ce qu'il appelait avec mépris l'« hitléromanie de la Droite », il ne fut pas toujours suivi par certains d'entre-eux, prompts à avancer que le régime nazi, régime autoritaire par excellence, n'était pas sans incarner une révolution autoritaire considérée comme un fondement de la doctrine d'Action française ; comme le souligne Eugen Weber, « quelques-une d'entre-eux comptèrent même parmi les partisans principaux du Führer »[A 40]. Pendant toutes les années 30, Maurras dans ce domaine ne changea pas de point de vue : la tentation de miser sur Hitler, voire de le flatter suffisamment pour envisager une alliance commune contre la Russie soviétique était une grossière erreur, qui condamnerait la France à l'esclavage et à la ruine. Il le soulignait : « aucun antidémocratisme ni antisémitisme ne valent ce prix »[A 41]. Mais ses mises en garde, contrairement à ses débordements de haine contre les juifs, la République ou les communistes, n'étaient que peu écoutées. Comme le souligne Eugen Weber, le peu d'impact de Maurras sur ses fidèles à ce propos s'explique par l'impasse idéologique dans laquelle il se trouva jusqu'à la fin. De fait, il « refusait d'accepter les conséquences de ses observations : jamais pro-Allemand, Maurras ne pouvait tout simplement pas se résoudre à surmonter sa profonde et bouillante aversion pour les ennemis de l'Allemagne » (les démocrates et les Soviétiques)[A 42].
C'est ce qui explique la mansuétude de Maurras – et au-delà, de l'Action Française – à l'égard de ceux de ses amis ou disciples qui adoptaient une posture plus ou moins germanophile ou pro-nazi et se félicitaient du triomphe nazi en Allemagne[E 7],[A 43]. S'il désapprouvait une telle attitude en général, il n'en fit jamais directement le reproche, jusqu'à ce qu'ils sombrent pendant l'occupation dans un collaborationnisme assumé, aux hommes qui dirigeaient par exemple la rédaction de Je Suis Partout, alors même que ces personnages, se présentant ouvertement comme ses disciples, auraient pu être particulièrement sensibles à telle prise de position[E 7],[A 44]. Le fait qu'il se soit refusé pendant si longtemps à les désavouer peut, selon Eugen Weber, « être attribué, en définitive, au fait qu'il croyait, au fond, qu'essentiellement ils avaient raison » et que tout valait mieux que de laisser la France entraînée dans un conflit avec un « anticommunisme militant » (l'Allemagne nazie) dont le seul bénéficiaire serait l'Union soviétique[A 44].
Au-delà de cette commune hostilité épidermique au bolchevisme soviétique, la question des convergences entre nazisme et doctrine d'Action Française a fait débat parmi les historiens. Ainsi, pour Ariane Chebel d'Appollonia, tout en affichant son hostilité au nazisme allemand, l'Action Française dispose de points communs avec celui-ci : « le nationalisme intégral théorisé par Maurras comporte certains éléments proches de l'hitlérisme » à savoir « la révolution autoritaire, [...] les notions de régénérescence nationale et d'intégrité, l'opposition entre le nombre et la qualité, l'antisémitisme »[E 7]. De même, Colette Peter Capitan distingue certains éléments irrationnels communs entre nazisme et nationalisme intégral, notamment « la valorisation de la force et de l'énergie », tout en soulignant que si « la vocation populaire du nazisme, l'idée hitlérienne de la soumission aux lois de la nature, donnaient au national-socialisme un pouvoir d'agression rare, le conservatisme bourgeois de l'Action française lui faisait peu à peu préférer le goût de l'ordre à l'audace ou à l'esprit d'aventure »[E 8]. François Furet pour sa part estime que Maurras « est étranger à l'esprit du fascisme, qui est révolutionnaire, ouvert sur une société fraternelle qui est à construire et non pas sur un regret du monde hiérarchique. Le modèle de la monarchie absolue française est constamment présent chez Maurras, alors que toute référence à un régime passé est inexistante chez Mussolini, ou Hitler[70] ». Au final, ces portraits de ce qu'était l'Action française peuvent expliquer l'incohérence fondamentale – et déterminante pour son avenir – entre pensée et action de la Ligue, son incapacité à se déterminer entre les deux seules options disponibles : se joindre aux Soviétiques pour combattre l'éternel ennemi allemand ou à l'inverse renoncer à sa germanophobie de principe pour abattre, au côté de l'Allemagne nazie, le communisme exécré[A 45]. Dès lors qu'il refusait de faire un choix, il ne restait à Maurras que celui du repli sur La Seule France, selon le titre de l'ouvrage qu'il publia en 1941[71] : c'est la position qu'il adopta sous l'occupation allemande.
Volonté isolationniste et pacifisme de droite
Le danger que représentait l'Allemagne nazie pour la France, constamment souligné par Maurras, amena l’Action Française à réclamer sans cesse un nouveau renforcement des capacités militaires françaises, notamment l’allongement du service militaire, réforme obtenue en 1935 après le plébiscite de la Sarre, où 99 % des votants, après quinze ans d'occupation française, s'exprimèrent en faveur du rattachement à l'Allemagne[A 46].
Pourtant, l'Action Française se manifestait par ailleurs par son souci d'éviter un affrontement militaire qui lui paraissait alors « suicidaire », la France n'étant, selon elle, jamais suffisamment préparée à la déferlante germanique[A 47]. Ainsi, Maurras refusait l'idée de « faire la guerre à Hitler » parce que « cette guerre [la France] la perdrait »[J 5].
Ce discours se fondait sur une logique de défiance généralisée.
- Défiance vis-à-vis de l'intérieur d'une part : L'Action française ne pouvait admettre qu'à un quelconque moment des politiciens républicains par ailleurs voués aux gémonies aient correctement préparé le pays à l'affrontement qui se profilait avec l'Allemagne nazie[A 48],[A 49]. Ils étaient systématiquement jugés responsables de la dégradation de la situation de la France en Europe soit parce qu'ils avaient fait preuve de faiblesse face aux provocations nazies[A 50], soit parce qu'au contraire ils leur avaient donné l'occasion de s'exprimer par un discours inutilement agressif : ainsi, quand en avril 1936 Hitler porta la durée du service militaire à deux ans, l'Action Française imputa la responsabilité de cette décision aux attaques antifascistes du Front Populaire[A 51]. Mieux, laissant « le préjugé embrumer une vision lucide et claire à l'origine »[A 52], les royalistes mirent régulièrement à mal les programmes de réarmement engagés par les divers gouvernements des années 30, réarmement qu'ils réclamaient pourtant par ailleurs à cor et à cri : quand tel ou tel ministre soulignait voire dramatisait les risques de guerre pour augmenter les crédits militaires, les royalistes de l'AF, loin de les soutenir, dénonçaient des « fauteurs de guerre »[A 50] qui, au service de l'Etranger (notamment la Russie soviétique), des juifs et des francs-maçons, ne visaient qu'à jeter la France dans un conflit qui assurerait sa définitive ruine[A 53].
- Défiance vis-à-vis de l'étranger d'autre part : même si la géopolitique semblait désigner comme des alliés « naturels » les voisins orientaux de l'Allemagne (notamment la Tchécoslovaquie) dans la mesure où ils permettraient d'ouvrir, en cas d'agression allemande, ce second front qui empêcherait Hitler de déverser toutes ses forces sur le territoire français, l'Action Française considérait avec suspicion l'intérêt d'une telle alliance de revers, dans la mesure où elle entraînerait la France dans un conflit hasardeux qui ne correspondrait pas à la défense de ses intérêts vitaux[A 34]. D'où le refus de se sentir tenu par les obligations contractées avec les Tchèques[A 54]. D'où plus largement la volonté de s'en remettre à une stratégie purement défensive et réduite à la surface du territoire national[A 50]. Comme le souligne Eugen Weber, « ils en étaient venus à croire que le seul espoir restant à la France résidait dans l'isolement délibéré, au risque même de perdre les quelques alliances qui lui restaient »[A 50] et ne se préoccupaient plus dès lors que d'établir « une solide chaîne de mitrailleuses bien graissées »[A 37] apte, selon eux, à garder la France des entreprises nazies. Maurras en était persuadé, comme Bainville à la veille de mourir : la France ne pouvait compter que sur elle-même, les alliances orientales avec des pays de trop peu d'envergure ne pouvant « aboutir qu'à une offensive allemande sur la France, alors que l'aide que fournissaient ces alliés serait toujours inférieure à celle qu'ils exigeaient de la France »[A 55]. Pourtant, un pays disposait de l'envergure nécessaire pour équivaloir, à l'est, à la puissance française à l'ouest ; ce pays, qui aurait pu s'allier à la France pour contenir la puissance allemande, c'était l'URSS. Mais l'antimarxisme viscéral de l'Action Française lui interdisait d'envisager un quelconque lien avec une Russie soviétique en laquelle on ne pouvait, selon Maurras, avoir confiance[A 56]. D'autant qu'une éventuelle victoire conjointe avec les Soviétiques contre l'Allemagne aurait eu, pour les militants d'AF, beaucoup d'inconvénients : les principes exécrés du marxisme en seraient sortis plus puissants encore, alors même que la défaite nazie « signifierait l'effondrement des systèmes autoritaires constituant le rempart le plus solide contre la révolution bolchevique et, peut-être, contre la bolchevisation de l'Europe »[A 57]. En outre, une alliance franco-soviétique tournerait le regard de l'Allemagne vers la France, « que les nazis auraient à liquider avant de régler leurs comptes aux Russes »[A 34]. Mieux valait s'abstenir, et tourner, en lui laissant les mains libres à l'est, l'énergie allemande vers la conquête des steppes russes, « périlleuse aventure que les Occidentaux pourraient regarder tranquillement du haut des remparts »[A 58] comme le laissaient espérer le 6 décembre 1938 la signature des accords Ribbentrop-Bonnet. On sait ce qu'il advint : las de solliciter l'alliance des démocraties occidentales contre l'Allemagne nazie, Staline s'entendit avec elle, démontrant l'inanité du « machiavélisme niais de ceux qui espéraient lâcher l'Allemagne sur les Russes »[A 59].
Dès lors, le choix d'un isolationnisme plus ou moins intégral étant fait[A 50], la seule solution résidait pour l'Action Française dans une politique d'armement et de préparation militaire toujours plus poussée de la France[A 29],[A 55]. En la matière, Maurras se voulait exemplaire : après Munich, il lança l'idée d'une souscription nationale « pour la liberté du ciel de France » en faveur de l'aviation militaire[D 6]. En attendant que cette préparation fut jugée suffisante, on devait éviter à tout prix de s'engager dans un affrontement militaire périlleux avec l'Allemagne nazie[72]. Ce pacifisme de droite n'était pas uniquement le fruit des circonstances. Dès les lendemains de la Première guerre mondiale, Jacques Bainville développait une thèse selon laquelle la Gauche, parti de la Révolution s'identifiait au parti de la Guerre, qu'elle avait soutenue et provoquée depuis un siècle et demi, contrairement à la monarchie, parti de la Paix, et seul régime apte à l'assurer[A 60].
Cette logique pacifiste et isolationniste[A 61], ce refus obstiné de l'AF, à chaque fois que l'éventualité d'un affrontement se dessinait, de refuser la guerre, s'exprima de manière emblématique lors de la crise germano-tchèque de l'automne 1938. Le mouvement « combattit à l'avant garde d'une offensive concertée en vue de dégager la France » de ses devoirs vis-à-vis de Prague[A 61], titrant le 27 septembre de toute la largeur de sa Une : « À bas la guerre ! ». Léon Daudet se déchaîna, évoquant, en référence à Jacques Bonhomme, « Jacques Couillonné, le cobaye de la démocratie sanguinaire qui doit aller crever sur un signe de tête d'un juif qui l'a en horreur dans un obscur et lointain patelin dont il n'a pas la moindre notion »[A 61],[note 20]. Dès lors, très logiquement, l'Action française fustigea toute fermeté belliqueuse[note 21] et apporta son soutien aux volontés conciliatrices de Neville Chamberlain, la guerre étant, « Maurras y insistait, pour les hommes de Moscou ou pour les juifs »[A 62] et applaudit bruyamment les accords de Munich[A 63],[73]. Ainsi, « la nouvelle du plus abject recul de l'Occident fut accueillie comme celle d'une victoire - et c'en était une dans une certaine mesure, celle des auxiliaires d'Hitler, conscients ou inconscients, dont le virulent, le persistant pilonnage avait forcé certains hommes d'État de l'Occident à faire machine arrière, aidé certains autres à se laisser faire »[A 62] analyse Eugen Weber.
Même si Maurras reconnaissait que Munich était une défaite pour la France[A 64], il considérait que c'était « une défaite pour éviter un désastre »[74],[75]. Il persista, pour les mêmes raisons, dans ce refus de l'interventionnisme quand Hitler s'empara en mars 1939 des dernières dépouilles de la Tchécoslovaquie[A 65] et même quand, fin août 1939, le pacte germano-soviétique, en levant l'hypothèque russe, rendit plus qu'évidente une prochaine offensive allemande sur la Pologne et sur Dantzig. Il convenait qu'il était nécessaire « qu'on se hérisse de défenses, qu'on mobilise et qu'on remobilise. [...] Mais marcher avant que l'on ait marché sur nous, [c'était] une autre affaire... »[A 59]. Pour lui, ni la Pologne, ni les « principes anglais » ne justifiaient que l'on fonce tête baissée au combat[A 59] : la France devait persister dans la recherche de la voie étroite qui préserverait - pour elle - la paix[A 66]. Ce « pacifisme de droite » et la défense de l'« état d'esprit munichois » par l'Action française provoqua, au sein du mouvement, le départ de jeunes militants comme Jacques Renouvin, Honoré d'Estienne d'Orves ou encore Guillain de Bénouville qui, sans renier leur foi monarchiste, rejettaient ce « néo-pacifisme »[H 2],[note 22]. Ce ne fut que lorsque la guerre fut officiellement déclarée que l'Action française se résigna, le 2 septembre, à soutenir le combat qui s'engageait[A 66].
Sous l'occupation allemande
Un mouvement essentiellement pétainiste
Après l'invasion et la victoire allemande de juin 1940, militants et sympathisants de l’Action française se divisent en trois tendances inégales[note 23] :
- Une large majorité de pétainistes
Une tendance nettement majoritaire se conforme à la ligne officielle du mouvement et suit Charles Maurras dans son soutien au Maréchal Pétain et au Régime de Vichy. C'est ce courant, violemment antigaulliste, qui continue à publier le journal à Poitiers, à Limoges et enfin à Lyon jusqu'à son interdiction suite à la Libération de la France à l'été 1944. On peut citer parmi ces personnages Maurice Pujo, Marie De Roux ou encore Léon Daudet. Charles Maurras conserve cette position pétainiste tout au long du conflit, comptant sur Vichy pour procéder à « un assainissement en profondeur à l'abri de toute influence étrangère, une revanche sur la Révolution de 1789 et une restauration des élites sociales écartées par la démocratie, qu'il déteste », et régler ainsi ses comptes avec ses adversaires, « hommes politiques de la troisième République, francs-maçons, juifs »[76].
- Des collaborationnistes
D'autres, réprouvés par Maurras et condamnés fermement par l'Action française en les excluant, deviennent collaborationnistes, comme Charles Lesca ou Jean Loustau ou encore le milicien Henry Charbonneau. Ils côtoient de nombreux anciens militants ayant quitté depuis plus ou moins longtemps l'Action française, comme par exemple Louis Darquier de Pellepoix qui a rompu avec Maurras en 1936 ou Claude Jeantet, Jean-Henri Azéma et Paul Chack qui ont adhéré au PPF entre 1937 et 1939. Certains amis combattront sous l'uniforme allemand dans la LVF puis la Division SS Charlemagne[A 67] — comme Jean Loustau, militant de l'Action française, qui fut volontaire dans la Division Charlemagne[77] — ou dans la Milice, comme Joseph Darnand, son dirigeant, ancien militant d'AF. Quelques militants font partie de l'Agence de presse Inter-France, dont l'action est dénoncée par Maurras, ou de l'équipe de Je suis partout, tels Robert Brasillach ou Lucien Rebatet[note 24].
- Des résistants
D'autres enfin, « aventuriers sociaux » ou militants « en rupture de ban »[78], rejoignent la Résistance et se rapprochent du général de Gaulle[79],[80], certains se réclamant du général Giraud : Jacques Renouvin, Pierre de Bénouville, Gilbert Renault (le colonel Rémy)[81], Paul Dungler, Luc Robet, Daniel Cordier, Paul Armbruster, Maurice Dutheil de la Rochère (1870-1944) maurrassien et ami d’enfance de Maurras, le docteur Henri Martin, Aristide Corre, le capitaine Hubert de Lagarde, le colonel Raymond du Jonchay, François de Grossouvre, Robert Buron, Fernand Bonnier de la Chapelle, Alexandre Sanguinetti, le cinéaste royaliste Willy Holt, Michel de Camaret, le duc et vieux maurrassien Gabriel de Choiseul-Praslin par exemple[82],[83],[84],[note 25].
Pour Maurras, soutenir les Alliés était critiquable dans la mesure où « si les Anglo-Américains devaient gagner, cela signifierait le retour des francs-maçons, des Juifs et de tout le personnel politique éliminé en 1940 ». Ainsi, considérant l'engagement dans la résistance de personnalités d'Action française comme « un choix opposé critiquable », Maurras se déclare-t-il « antigaulliste » et son verbe devient-il de plus en plus violent suite à la politique d'attentats menée par les résistants communistes[D 7] et la mort de plusieurs membres de l'Action française et de ses amis[A 68], utilisant dès lors le terme de « terroristes ». Maurras « exigeait des otages et des exécutions, […] recommandait la mise à mort des gaullistes faits prisonniers, sans autre forme de procès, […] déclarait que si “la peine de mort n'était pas suffisante pour mettre un terme aux activités des gaullistes, il fallait se saisir des membres de leur famille comme otages et exécuter ceux-ci” »[A 69].
La « divine surprise » de l'arrivée au pouvoir du maréchal Pétain et le combat pour la « France seule »
Maurras, qui considère l'arrivée au pouvoir du maréchal Pétain comme une « divine surprise », prône à son égard une « obéissance inconditionnelle »[85]. L'Action française voit ainsi « dans le Maréchal Pétain un homme doublement providentiel », les évènements lui permettant « de jeter bas la République et de fonder, sinon un régime monarchique, du moins un régime basé sur les traditions et les règles qui firent la force de la monarchie »[86].
L'universitaire et spécialiste israélien de l'antisémitisme Simon Epstein critique la tendance à surestimer le poids des maurassiens dans la Révolution nationale et il parle de « maurrassification intempestive » de la collaboration[87].
À titre d'exemple, Simon Epstein cite le second statut des Juifs beaucoup élaboré par Joseph Barthélémy, venu d'horizons opposés à l'Action française et qui fut beaucoup plus drastique que le premier élaboré par le maurrassien Raphaël Alibert. Au plan institutionnel, la place d'Alibert fut prise par Lucien Romier au conseil national de Vichy dreyfusard et hostile à Maurras. Ignorer Barthélémy et Romier pour ne parler que d'Alibert, c'est camoufler selon Simon Epstein l'apport des autres courants de pensée à l'élaboration et à la pratique vichyssoise[88]. Au conseil national de Vichy, les parlementaires et syndicalistes de gauche occupent une place importante. Les racines républicaines de Vichy sont encore plus visibles si on prend en compte le corps préfectoral et les hauts fonctionnaires[89]. L'antisémitisme n'est pas une spécificité de l'Action française et si Charles Maurras lui-même accueille avec enthousiasme les premières lois antisémites du régime, qu'il salue dans le quotidien du nationalisme intégral comme l'accomplissement des causes de l'Action française[F 14], le durcissement et la radicalisation de l'antisémitisme ne sont pas le faite de proches de l'Action française.
De plus, les maurrassiens de Vichy comptent parmi les pétainistes antiallemands et donc les moins favorables à la politique de collaboration. Pour Simon Epstein, ce point est rarement mentionné et cela est dû selon lui au fait que ceux qu'il appelle « les doctrinaires de la continuité ne se préoccupent pas des allemands qui ne font que de rares incursions dans leurs écrits car ils cherchent avant-tout l'origine des maux qu'ils décrivent dans une permanence franco-française ».
Vichy n'attend pas longtemps pour se délester des maurrassiens y exerçant quelques responsabilités[90] : dès 1941, Raphaël Alibert, ministre de la Justice, Paul Baudouin ministre des affaires étrangères, Georges Groussard, ancien cagoulard qui commande les groupes de protection de Vichy et qui procéda à l'arrestation de Laval trop favorable à l'Allemagne et s'orienta vers la Résistance quittent Vichy. Ceux qui ne sont pas partis quitteront le gouvernement lors du retour de Laval en 1942 : Pierre Caziot, Serge Huard, Yves Bouthillier, René Gillouin, Henry du Moulin de Labarthète, Xavier Vallat, c'est-à-dire avant l'entrée des partisans d'une franche collaboration avec l'Allemagne nationale-socialiste. Ces maurassiens étaient mal vus des amis de Pierre Laval qui les accusent d'avoir favorisé son renvoi, des Allemands qui n'apprécient pas leur hostilité à la collaboration, des collaborationnistes qui les accusent d'être réactionnaires à l'intérieur et germanophobes à l'extérieur[91].
Pour Maurras, le soutien à Pétain est une nécessité imposée par les circonstances, mais il est hostile au collaborationnisme. Ainsi, il considère « les gaullistes et la presse [collaborationniste] de Paris comme les deux versants d'un complot révolutionnaire de l'Étranger visant à anéantir la nation[note 26],[92] ».
Charles Maurras fut donc une cible privilégiée de la presse pro-hitlérienne parisienne qui l'accusait de prôner l'attentisme et d'être opposé à tout renforcement de la collaboration[note 27]. En effet Maurras défend la thèse de la France seule, celle-ci devant se tenir à la fois à l'écart de l'Allemagne et des Alliés. Il ne prône pas de collaboration politique ou d'aider miltairement l'Allemagne. Les Dreyfusards collaborateurs tels Armand Charpentier et René de la Marmande attaquent régulièrement ses positions[93]. Les pacifistes des années 1920 reprochaient à Maurras d'être hostile au rapprochement franco-allemand. Devenus collaborateurs, ces pacifistes témoigneront d'une ténacité idéologique et d'une constance argumentaires remarquables, puisqu'ils lui feront le même reproche sous l'Occupation[94].
Après la seconde guerre mondiale, Charles Maurras fera le point sur ses rapports avec Philippe Pétain et démentira avoir exercé une influence sur lui[95] : après avoir rappelé qu'ils se voyaient à peine avant 1939 (selon Jacques Madaule, Philippe Pétain s'opposa à l'élection à l'Académie française de Charles Maurras, et il félicita François Mauriac d'avoir fait campagne conte lui[96]), il protesta contre la « la fable intéressée qui fait de moi une espèce d'inspirateur ou d'Éminence grise du Maréchal. Sa doctrine est sa doctrine. Elle reste républicaine. La mienne est restée royaliste. Elles ont des contacts parce qu'elles tendent à réformer les mêmes situations vicieuses et à remédier aux mêmes faiblesses de l'État. (...) L'identité des problèmes ainsi posée rend compte de la parenté des solutions. L'épouvantable détresse des temps ne pouvait étouffer l'espérance que me donnait le remplacement du pouvoir civil impersonnel et irresponsable, par un pouvoir personnel, nominatif, unitaire et militaire ». Le projet de constitution du 30 janvier 1944 que prépara le Maréchal Pétain était d'ailleurs explicitement républicain même s'il renforçait le rôle du chef de l'Etat, président de la République. Charles Maurras considérait cette orientation préférable impliquant un exécutif fort à celle du régime précédent et il avait confiance en Philippe Pétain pour ne pas engager militairement la France aux côtés de l'Allemagne, ce que souhaitait les collaborationnistes mais cela ne suffit pas à faire du régime de Vichy une émanation idéologique de l'Action française.
Selon Simon Epstein, le thème de l'osmose entre Charles Maurras sera développé par des auteurs aux préoccupations divergentes[97].
- Il s'agit des hagiographes de Pétain qui sont aussi des admirateurs de Maurras tels René benjamin ou Henri Massis qui « idéalisent et sanctifient » le lien qui unit les deux hommes, tout en contestant que l'un ou l'autre aient cherché à servir l'Allemagne.
- Il s'agit, cette fois non pour les célébrer mais pour les critiquer des collaborateurs parisiens, comme Marcel Déat, qui considèrent que Vichy ne fait pas une vraie politique de collaboration et veulent voir dans l'œuvre de Pétain la manifestation d'une pensée réactionnaire et cléricale qu'ils détestent.
- Il s'agit de la presse résistante qui constate que « Maurras soutint Pétain mais en déduit à tort que Pétain fut maurrassien »[98].
- Il s'agit à partir dans les années 1980 et 1990 des défenseurs de l'idée des deux France, soucieux d'amalgamer des tendances politiques différentes.
Maurras n'est, en 1940, « ni germanophile ni philo-nazi, [et] veut considérer que son choix de la “seule France” est compatible avec sa fidélité au maréchal Pétain et à son régime[99] ». Ainsi, Maurras considère Pierre Laval « comme un traître », et plusieurs maurrassiens cagoulards organisent son enlèvement en octobre 1940, même si l'Action française n'a pas joué elle-même un rôle déterminant dans l'opération[A 70].
Le nombre d'adhérents au sens strict de l’Action française n'est jamais très élevé dans l'entourage de Pétain ; selon Olivier Dard, « l'Action française a formé des théoriciens et non des praticiens ; sont issus de ses rangs principalement des écrivains ou des journalistes de renom, mais pas des spécialistes du droit public ou des finances. De fait, [...] les maurrassiens sont largement absents de biens de ministères où s'affirment les technocrates[99]. Si on trouve des sympathisant de l'Action Française au sein de l'administration vichyste, essentiellement à des postes secondaires[A 71], le corps préfectoral comme le gouvernement dirigé par des politiciens de vieille tradition républicaine comme Laval, Flandrin ou Darlan, ne compte guère de maurrassiens avant 1942 et plus du tout après.
Malgré le discours violemment antisémite produit par l'Action française sous l'Occupation[D 8], Maurras déclare, lors de son procès en 1945, ignorer les pratiques d'extermination dans les camps, et tient des paroles de compassion pour les victimes[D 9]. En 1952, « hanté par la crainte de nouveaux cataclysmes », Maurras « désigne les camps d'extermination allemands ou “moscovites” comme les lieux où risquent de périr les nations » et « en constate l'horreur à l'échelle de l'Histoire, mais sans en percevoir la spécificité génocidaire[D 10] ».
Un mouvement déconsidéré et décapité à l'issue de la guerre
L'Action française sort déconsidérée et très affaiblie de la Seconde Guerre mondiale, du fait de « son engagement aux côtés du régime de Vichy et de sa complicité de fait avec l'occupant »[B 7]. Ainsi, en septembre 1944, Maurras est arrêté, accusé d'« intelligence avec l'ennemi [...] en vue de favoriser les entreprises de [l'Allemagne] contre la France »[note 28] puis condamné à la réclusion à perpétuité. À l'énoncé du verdict, il s'écrie : « C'est la revanche de Dreyfus ! »[A 72],[100]. Ce verdict a été critiqué par certains auteurs, comme Olivier Dard[99] ou Stéphane Giocanti[D 11].
Il sera grâcié pour raison de santé peu de temps avant sa mort en 1952. Le mouvement ne retrouvera plus l'audience dont il disposait.
L'Action française se reconstitue néanmoins en juin 1947 autour de Maurice Pujo et Georges Calzant, du journal Aspects de la France, dont le nom reprend les initiales du quotidien L'Action française, et du mouvement « Restauration nationale ».
Après la mort de Maurras, en 1952, deux journaux rivaux, Aspects de la France et La Nation française de Pierre Boutang, se partagent l'héritage maurrassien. Le second, qui rejette le maurrassisme commémoratif, se rapproche du comte de Paris et soutient les grands axes de la politique du général de Gaulle mais il cesse de paraître en 1967[101].
Alain-Gérard Slama écrira que l'Action française et Maurras ont eu une « influence désastreuse » sur l'« intelligentsia de droite » et sur une partie des élites des grands corps en rompant avec « le pragmatisme propre aux droites françaises » par l'élaboration d'« un corps de doctrine sur le modèle des théories socialistes ». « En prônant un antisémitisme d'État qui se voulait dépassionné et exempt de tout délire d'extermination », Maurras par sa brillance intellectuelle a conféré une sorte de « respectabilité intellectuelle » à l'idéologie de « défausse sur le bouc-émissaire juif qui, après l'affaire Dreyfus, est passée de gauche à droite aux approches de la Première Guerre mondiale ». En écartant les juifs de nombreuses activités professionnelles, le maréchal Pétain ne faisait que « s'aligner sur les thèses » maurrassiennes selon lesquelles les juifs étaient « considérés comme des étrangers inassimilables »[102].
De nos jours
Aujourd'hui, l'Action française est dénommée Centre royaliste d'Action française (CRAF). Réparti en sections locales, il diffuse toutes les deux semaines son journal, L'Action française 2000, autrefois appelé Aspects de la France de 1947 à 1992 puis L'Action française hebdo. Les jeunes royalistes du CRAF sont rassemblés autour de l'Action française étudiante (AFE) qui organise une université d'été annuelle depuis 1953, le Camp Maxime-Real del Sarte. Antimondialiste et antilibéral, le mouvement revendique la défense sous toutes ses formes de l'« intérêt national » et prône un nationalisme hérité des idées de Charles Maurras.
Politiquement, le CRAF est un mouvement qui se définit comme « royaliste, nationaliste et souverainiste ». Il souhaite le rétablissement de la monarchie en France avec à sa tête la famille d'Orléans. L'Action française s'oppose à l'Europe fédérale, à la mondialisation ainsi qu'au « système des partis » autour de la défense inconditionnelle de l'« intérêt national ». Le Centre royaliste d'Action française a par ailleurs assaini ses théories en évacuant l'antisémitisme et la xénophobie de ses réflexions qui sont plus d'ordre économique et nationale qu'en rapport avec l'Étranger. On en discute plus vivement et d'une manière plus singulière au sein du Cercle Jacques-Bainville d'Assas qui se veut l'héritier du cercle éponyme, discutant ainsi de géopolitique, de philosophie comme de politique intérieure à travers diverses conférences données à Paris. Créé en 1977 par des étudiants de Paris-II Assas, le Cercle Jacques-Bainville était tombé progressivement en désuétude, ces dernières années. À l'instigation d'un groupe d'étudiants et de jeunes professionnels, le « Cercle Jacques-Bainville » (CJB) a été reformé à la rentrée 2010. En octobre 2011, le CRAF ainsi que sa section étudiante (l'AFE) ont pris une part importante dans des manifestations contre une pièce de théâtre jugée christianophobe ; 17 militants ont été interpellés le premier soir pour avoir tenté de bloquer le théâtre de l'extérieur, dont l'un blessé à la jambe, un car de police lui ayant roulé dessus[103]. Le lendemain ce seront 14 autres qui seront placés en garde à vue[104],[105]. Le CRAF participa à la "marche contre la christianophobie" qui suivit[106].
L'attitude à adopter vis-à-vis du Front national divise les militants du CRAF : une partie des militants du mouvement royaliste considère que les royalistes doivent se tenir à l'écart des partis « républicains ». Pour d'autres, le Front national est le principal parti de la droite souverainiste et nationaliste et voter pour lui constitue un moyen de faire avancer les idées nationalistes. Tandis qu'aux élections présidentielles de 2002 le CRAF soutient Jean-Pierre Chevènement[107], il choisit cette fois-ci de soutenir Jean-Marie Le Pen en 2007[réf. souhaitée]. Pour les élections de 2012, le Centre royaliste d'Action française revendique un « compromis royaliste autour de la monarchie »[108].
Notes et références
Notes
- ↑ Maurice Pujo fera une satire de l’Union pour l'Action morale dans sa pièce Les Nuées (le terme est de Maurras).
-
- — Michel Leymarie, Serge Berstein, La postérité de l'affaire Dreyfus, Presses universitaires du Septentrion, 1998, p. 127
-
- ↑ Robert Paxton écrit ainsi dans Le Fascisme en action (p. 85-86) :
« L'affaire agita la France jusqu'en 1906. Dans le camp des antidreyfusards, qui disaient défendre l'autorité de l'État et l'honneur de l'armée, on trouvait aussi bien des conservateurs que des gens de gauche influencés par les formes traditionnelles du nationalisme anticapitaliste et jacobin et antisémite. [...] La nation a le pas sur toutes les valeurs universelles, proclamait l'antidreyfusard Charles Maurras, dont le mouvement, l'Action française, est parfois considéré comme la première forme authentique de fascisme. »
Il ajoute en note :
« Ernst Nolte estime par exemple que l'Action française est le premier des “trois visages”, dans son ouvrage Les Trois Visages du fascisme (Paris, Hachette, 1992). À l'appui de sa thèse, il y a le nationalisme, l'antisémitisme, l'antiparlementarisme et l'occasionnel anticapitalisme de mouvement, ainsi que son culte de la jeunesse et de l'action [...] ». - ↑ Une affiche, reproduite dans L'Action française, no 3, 23 mars 1908, proclame ainsi :
« Seuls les intéressés, les nigauds et les pauvres primaires ignorants peuvent se soustraire à cette évidence : LA RÉPUBLIQUE C'EST LE MAL.
La République est le gouvernement des Juifs, des Juifs traîtres comme Ullmo et comme Dreyfus, des Juifs voleurs comme le baron Jacques de Reinach, des Juifs corrupteurs du peuple et persécuteurs de la religion catholique, comme l’inventeur juif de la loi du divorce et le juif inventeur de la loi de Séparation. » - ↑ Robert Paxton, op. cit., poursuit ainsi : « La révélation que le document incriminant Dreyfus était fabriqué de toutes pièces ne troubla pas Maurras, qui le taxa de “faux patriotique”. »
- ↑ Voir sur ce point la distinction opérée par René Rémond entre l'inspiration libérale de la société et les aspects anticléricaux de la sécularisation : René Rémond, Religion et société en Europe, Le Seuil, 1998. Sur ces derniers, voir Adrien Dansette, Histoire religieuse de la France contemporaine, Flammarion, 1965.
- ↑ Les deux formules sont de Gérard Cholvy, « Les deux France », dans Histoire religieuse de la France contemporaine, Tome 2, Privat, 1989, p. 172
- ↑ Lire toute l'explication sur le site de l'Assemblée nationale
- ↑ Robert Havard de La Montagne écrit que l'Action française voulait alors « inscrire le droit ouvrier dans les lois. Revendication conforme, observe-t-il, à la doctrine royaliste qui condamne ce fléau de la Révolution, le libéralisme économique amenant la toute-puissance de l'argent. »
Et il ajoute : « Réfractaire aux idées révolutionnaires, l'Action française a toujours visé, entre autres, celles qui avaient inspiré le décret Le Chapelier :
- Si, contre les principes de la Liberté et de la Constitution, des citoyens attachés aux mêmes professions, arts et métiers, prenaient des délibérations ou faisaient des conventions tendant à refuser de concert ou à n'accepter qu'à un prix déterminé le secours de leur industrie ou de leurs travaux, les dites délibérations ou conventions, accompagnées ou non de serments, sont déclarées inconstitutionnelles, attentatoires à la Liberté et à la Déclaration des Droits de l'Homme, et de nul effet.»
- ↑ Contre la « guerre sociale », Maurras voulait en venir à la paix et par conséquent, écrit-il, « à la réalité syndicale, premier germe de l'organisation corporative qui d'elle-même, définit ou suggère un accord : Accord à la fois industriel et moral, fondé sur le genre du travail, inhérent à la personne du travailleur, et qui reconnaît à ceux qui n'ont point de propriété matérielle proprement dite une propriété morale, celle de leur profession ; un droit, celui de leur groupe professionnel. C'est la seule idée, écrivait-il, qui puisse pacifier le travail en lui donnant une loi acceptable pour tous les intéressés. »
- ↑ Voir le chapitre « Maurras et la notion de race » dans Le maurrassisme et la culture. L'Action française : culture, société, politique (III), p. 119
- ↑ Cf. l'affiche reproduite dans L'Action française, no 3, 23 mars 1908.
- ↑ Charles Humbert proclame :
« Si demain nous avions la guerre, notre corps d‘armée, sur le champ de bataille, serait pourvu de 120 canons de 75 » puis il énumère l’artillerie lourde de l‘Allemagne.
Il finit par dire « Qu’avons-nous à opposer aux obusiers de des corps d’armée allemands et à cette formidable artillerie lourde dont je viens de faire l’énumération, et qui, je le répète, est toute moderne, à tir rapide, à grande puissance et munie des derniers perfectionnements ? A peu près rien ! » - ↑ Cité dans Martine Sevegrand, Temps présent: une aventure chrétienne, 1937-1992. Un hebdomadaire, 1937-1947, Temps présent, 2006, 323 p. , p. 80
- ↑ Des milliers de manifestants scandent « À bas les voleurs ! ». Ils se conforment pour certains au mot d’ordre lancé par l’Action française dans un tract distribué le 6 février :
« Ce soir, à l’heure de la sortie des ateliers et des bureaux, ils [les Français] se rassembleront devant la Chambre, au cri de “À bas les voleurs !” pour signifier au Ministère et à ses soutiens parlementaires qu’ils en ont assez de ce régime abject. »
-
- — Cité dans les publications de l'Université de Bourgogne
- — Cité dans les publications de l'Université de Bourgogne
-
- ↑ L’arrêt Action française est au point de départ de la théorie de la voie de fait. Voir, Rec. Lebon, Tribunal des conflits - 8 avril 1935 - Action Française, p. 1226
- ↑ La version des faits est discutée. Ainsi, généralement, l'Action française estime qu'un « écervelé » aurait pu être à l'origine de l'incident. Plusieurs historiens affirment que ce sont des militants d'Action française qui ont agressé Léon Blum.
Eugen Weber, pour sa part, note que « bien que la question précise des responsabilités n'ait jamais été tirée au clair, l'Action française fut mise en cause pour avoir créé le genre de situations où de pareilles violences sur la voie publique étaient possibles. » (op. cit., p. 402) - ↑ du nom de l'expert américain qui l'a mis en place, Owen Young
- ↑
« Voilà donc notre œuvre d’avertissement terminée. Et terminée par un échec. Échec complet sans doute, échec qui semble sans remède… Mais enfin échec tel que la responsabilité en retombe toute entière sur la République, sur les partis républicains, tous ces partis sans exception ayant ratifié, les royalistes seuls flanqués d’honorables exceptions personnelles, ayant dit carrément, clairement, constamment les paroles pleines de bon sens qu’il était important de dire contre cette ruine de la patrie. »
— L'Action française du 6 avril 1930
- ↑ Ce discours n'était pas le seul à l'époque dans la presse française : le journal pacifiste de gauche Redressement par la plume de Ludovic Soretti publiait : « On ne va tout de même pas faire la guerre pour 100 000 Juifs polonais ». Cf. Le Monde juif, Numéros 141 à 146, Centre de documentation juive contemporaine, 1959, p. 78
- ↑ Un peu plus tard, le 25 septembre 1938, il assenait dans l'Action française : « l'affaire actuelle de la Tchécoslovaquie ne nous regarde en rien, ne nous intéresse en rien »
- ↑ Parodiant L'Internationale, L'Action française écrit :
« S'ils s'obstinent, ces cannibales,
À faire de nous des héros,
Il faut que nos premières balles
Soient pour Mandel, Blum et Reynaud » (cf. Georges et Édouard Bonnefous, Histoire de la IIIe République, tome VI, « Vers la guerre : du Front populaire à la conférence de Munich, 1936-1938 », PUF, 1965, p. 345). - ↑ L'expression vient de Simon Epstein dans son livre Un paradoxe français, qui compare ce pacifisme de droite au pacifisme de gauche : « ce “néo-pacifisme” d’extrême-droite est tactique et conjoncturel » , alors que le pacifisme de gauche est “idéologique et structurel” ».
- ↑ D'après certaines recherches historiques récentes, les deux dernières tendances (collaborationniste et résistante) seraient dans des proportions presque égales. Olivier Dard, Michel Leymarie, Neil McWilliam, Le maurassisme et la culture: L'action française. Culture, société, politique (III), Presses Universitaires du Septentrion, 2010, 370 p. , p. 294
- ↑ même si ce dernier rompt violemment avec Maurras et raille l'« Inaction française » en 1942 dans son pamphlet Les Décombres (chapitre VI, p. 111 de l'édition de 1942).
- ↑ L’universitaire Simon Epstein ou l’homme politique Pierre Mendès France ont soutenu que la majeure partie des troupes de l'Action française, surtout les jeunes, furent majoritairement hostiles à l'occupant. Traitant des partis politiques sous l’occupation, Pierre Mendès France observe que toutes les forces politiques se sont scindées en résistants et collaborateurs. Evoquant les maurrassiens, il précise : « L’Action française, sous l’influence directe de Maurras, suit Vichy, mais là encore, la principale partie des troupes a abandonné les chefs. Comme la plupart des anciens Croix-de-Feu, les militants de l’Action française, surtout les éléments jeunes, sont aujourd’hui antiallemands et absolument hostiles à la soumission à l’occupant. »
- ↑ Voir cette distinction, rappelée par Maurice Weyembergh, et évoquée par Henri Massis dans un document inédit : « Ne pas laisser la France entre deux clans : parti d'un étranger et parti d'un autre étranger, voilà ce que Maurras croyait devoir rappeler dans ce Mémorandum : “Il faut toujours tenir distinctes ces deux idées bien différentes : a) La “collaboration”, b) le collaborationnisme. La “collaboration” est forcée ; la défaite, le souci de l'avenir l'imposent. Le collaborationnisme est une propagande, un système, une passion où la nervosité et la fébrilité françaises risquent d'être dupées et qui permet, provoque tout aussitôt, une propagande en sens inverse. Le collaborationnisme fait nécessairement du gaullisme ; il en est le pendant.” » — Henri Massis, Maurras et notre temps, Paris, La Palatine, 1951, t. 2, p. 164.
- ↑ Ainsi, René de Marmande, dreyfusard et collaborateur, ne reniera pas ses combats passés contre Maurras et saluera en janvier 1944 la figure de Jean Jaurès. Il s'est lancé dans la bataille pour Dreyfus parce qu'il était favorable à un rapprochement avec l'Allemagne et hostile à la germanophobie génératrice de guerre pour le continent ; il flétrira cette germanophobie pendant la Seconde Guerre mondiale comme pendant l'Affaire l'Action française et Charles Maurras
- ↑ Stéphane Giocanti qualifie ce chef d'accusation « d'extravagant » dans Maurras. Le chaos et l'ordre, op. cit., p. 468
Références
Ouvrages utilisés
- Véronique Auzépy-Chavagnac, Jean de Fabrègues et la jeune droite catholique : aux sources de la Révolution Nationale, Presses universitaires du Septentrion, 2002 (ISBN 978-2-85939-774-6) (LCCN 2003469096)
- ↑ p. 23
- ↑ p. 31
- ↑ Selon Véronique Auzépy-Chavagnac, « la violence, au moins dans la forme, n'est pas l'apanage de l'Action française à l'époque. L'empoignade à la Chambre n'est pas rare [...] de même les journaux n'hésitent pas à user de l'injure [...]. En bref, la violence verbale et gestuelle faisait alors communément partie de la vie politique. », p. 31
- Ariane Chebel d'Appollonia, L'Extrême-droite en France. De Maurras à Le Pen, Bruxelles, Complexe et PUF, coll. « Questions au XXe siècle », 1987, 1996 (ISBN 978-2-87027-573-3) (LCCN 97156576)
- Olivier Dard, Michel Grunewald, Charles Maurras et l'étranger, l'étranger et Charles Maurras : l'Action française — culture, politique, societé, Volume II, Berne, Peter Lang, Editions scientifiques internationales, coll. « Convergences », 2009, 432 p. (ISBN 978-3-0343-0039-1)
- Stéphane Giocanti, Charles Maurras : le chaos et l'ordre, Paris, Flammarion, coll. « historique », 2006
- ↑ p. 167.
Voir également Michel Winock, La droite depuis 1789 : les hommes, les idées, les réseaux, Seuil, 1995, p. 204 : « Innocent ou coupable, Dreyfus devait être sacrifié à l'intérêt national ». - ↑ p. 167.
- ↑ a et b p. 238
- ↑ p. 385. Ainsi, le 18 février 1937 Maurras écrit dans les colonnes de son quotidien : « L'antisémitisme est un mal. Si l'on entend par là cet antisémitisme de peau qui aboutit au pogrom et qui refuse de considérer dans le Juif une créature humaine pétrie de bien et de mal, dans laquelle le bien peut dominer. On ne me fera pas démordre d'une amitié naturelle pour les Juifs bien nés [patriotes]. Mais il est un antisémitisme politique, un “antisémitisme d'État”, lequel est excellent, parce qu'il prévoit l'autre et en peut détourner les malheurs ».
- ↑ p. 386
- ↑ p. 408 Vingt quotidiens parisiens et cinquante journaux de province relayèrent son appel
- ↑ p. 435
- ↑ « Au moment où les Juifs connaissent en effet la pire persécution de toute l'histoire, où ils sont massacrés dans les camps allemands, par des exécutions, des gaz et des maladies (Maurras ignore évidemment tout cela, comme la plupart des Français occupés), il en reste aux vieilles querelles du XIXe siècle, mélange de clichés, d'animosité et de rancunes », écrit Stéphane Giocanti, p. 448.
- ↑ p. 448.
- ↑ p. 482.
- ↑ p. 458-473.
- Jacques Prévotat, L'Action française, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2004
- Jacques Prévotat, Michel Leymarie (éds), Action française, culture, société, politique, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2008, 434 p. (ISBN 978-2-7574-0043-2) (LCCN 2008420143)
- ↑ Catherine Nicault, « “Les Français israélites” et la Ligue d'Action française », p. 189
- ↑ Ibid.
- ↑ Ibid. Ce tournant est marqué par Laurent Joly, « Le journal L’Action française et les juifs (1914-1944). De l'Union sacrée à la Révolution nationale ».
- ↑ M. de Mello, « De l'extrémisme », L'Étudiant français, 10 mars 1937 ; cité p. 224.
- ↑ Catherine Nicault, op. cit., p. 202
- ↑ p. 273
- ↑ Rosemonde Sanson, « Les jeunesses d'Action française avant la Guerre », p. 205
- ↑ Rosemonde Sanson, p. 213
- ↑ p. 42
- ↑ p. 211.
- ↑ p. 219-220.
- ↑ Sur l'alliance avec Poincaré, voir Jean Garrigues, p. 251
- ↑ Bénédicte Vergez-Chaignon, « L'Action française et les milieux médicaux », p. 116.
- ↑ L'Action française, 21 août 1940 ; cité par Bénédicte Vergez-Chaignon, p. 118
- René Rémond, Les Droites en France, Paris, Aubier-Montaigne, coll. « historique », 1982, 4e éd., 544 p. (ISBN 978-2-7007-0260-6) (LCCN 82156070)
- Jean-François Sirinelli (dir.), Histoire des droites en France, tome I, « Politique », Éditions Gallimard, coll. « Tel », 2006
- (en) Eugen Weber, Action française : royalism and reaction in twentieth century France, Stanford University Press, 1962, 594 p.
- Eugen Weber, L'Action française, Paris, Fayard, coll. « Grandes études historiques », 1985 (ISBN 978-2-213-01678-8)
- ↑ p. 35.
- ↑ p. 39.
- ↑ p. 46.
- ↑ p. 47.
- ↑ p. 19.
- ↑ a et b p. 67.
- ↑ p. 219.
- ↑ p. 404.
- ↑ p. 68.
- ↑ p. 504.
- ↑ a et b p. 212
- ↑ p. 56.
- ↑ p. 83 et 208.
- ↑ p. 73.
- ↑ p. 169.
- ↑ p. 175.
- ↑ p. 178.
- ↑ p. 262 sqq.
- ↑ p. 388.
- ↑ p. 402
- ↑ p. 401
- ↑ a et b p. 414.
- ↑ p. 428-429.
- ↑ p. 309.
- ↑ Cité par Eugen Weber p. 313.
- ↑ p. 311.
- ↑ p. 311-312.
- ↑ p. 312.
- ↑ a et b p. 321.
- ↑ p. 167.
- ↑ a, b et c p. 157.
- ↑ p. 322.
- ↑ p. 314.
- ↑ a, b et c p. 319.
- ↑ a, b et c p. 316.
- ↑ a et b p. 317.
- ↑ a, b et c p. 318.
- ↑ p. 469-470. En novembre 1938, lorsque des pogroms sanglants furent déclenchés en Allemagne suite à l'assassinat à Paris d'un troisième secrétaire de l'ambassade d'Allemagne par un réfugié juif d'Allemagne, l'AF déclara : « le prestige de la France n'est pas menacé quand on brule une synagogue quelque part. On peut bien les brûler toutes, ce n'est pas notre affaire ». La seule crainte exprimée était : « Espérons que personne ne prendra cela comme un prétexte pour nous inonder de juifs au moment où les derniers arrivés sont un péril mortel pour la France. »
- ↑ p. 315-316.
- ↑ p. 461-462.
- ↑ p. 463.
- ↑ p. 328-329.
- ↑ p. 455.
- ↑ a et b p. 463-464.
- ↑ pp. 459-460 et suivantes.
- ↑ p. 320.
- ↑ p. 328. « Le seul conseil qu'ils pouvaient donner était "d'abord et avant tout, pas de guerre ! Puis, armons, armons, armons nous !" »
- ↑ p. 327-328.
- ↑ p. 461. « Ils étaient si persuadés que la France était faible (parce que sous un gouvernement républicain, il ne pouvait en aller autrement), qu'ils sous-estimaient toujours la puissance de leur pays. »
- ↑ a, b, c, d et e p. 461.
- ↑ p. 464.
- ↑ p. 460.
- ↑ p. 460. « L'opinion française devait apprendre à reconnaître par quels moyens une faction étrangère menait la France à ce qui, en fin de compte, serait la guerre, non pas faite dans son intérêt propre, mais pour servir les fins de la conspiration internationale ayant pour objectif la ruine de la France ».
- ↑ p. 467. « Daudet, aussi bien que Maurras, reprenaient à leur compte les arguments de Barthélémy dans Le Temps selon lesquels le traité franco-tchèque de 1925 était partie intégrante du pacte de Locarno. Celui-ci, devenu caduc, n'engageait plus d'aucune façon la France ou l'honneur de la France. Comment pourrait-on reprocher à qui que ce fût d'avoir violé des traités inexistants, demandait Maurras ? »
- ↑ a et b p. 326.
- ↑ p. 309, p. 319, p. 469.
- ↑ p. 469.
- ↑ p. 470-471.
- ↑ a, b et c p. 473.
- ↑ p. 310.
- ↑ a, b et c p. 465.
- ↑ a et b p. 467.
- ↑ p. 467.« "La Paix ! La Paix ! La Paix" criait l'Action française du 30 septembre ».
- ↑ p. 468.
- ↑ p. 471.
- ↑ a et b p. 474.
- ↑ « Maurras ne voulait plus rien avoir de commun avec ses anciens amis ou anciens disciples qui s'en allaient sur cette pente glissante » (p. 495)
- ↑ p. 515
- ↑ p. 509 et 515-516.
- ↑ p. 510-511
- ↑ Eugen Weber mentionne la présence d'« amis » dans des postes qu'il qualifie de « secondaires », comme dans les services de la censure et de l'information, l'Instruction publique, la Légion française des combattants, ou encore à l'École des cadres d'Uriage qui, très nationaliste, fournira après sa dissolution en 1942, « un grand nombre des chefs de la Résistance dans le Sud-Est » (p. 488).
- ↑ Ernst Nolte et Eugen Weber ont pris au mot Maurras, et comparé son procès à celui de Dreyfus ; Weber écrit : « Ici encore, le Tribunal était exceptionnel et loin de raffiner sur le légalisme ; ici également, la culpabilité se présupposait, la condamnation était une conclusion atteinte d'avance ; ici également, des documents importants furent écartés ; jusqu'à l'accusation d'intelligence avec l'ennemi qui était la même et, juridiquement, aussi peu fondé. » Cependant, « si le verdict dans les deux cas fut un verdict de circonstances, de convenance, d'un point de vue “métajuridique” les accusations, dans la seconde affaire, se trouvaient réellement fondées » (p.520)
Autres sources utilisées
- ↑ a et b Jacques Prévotat, « L’Action française et les catholiques. Le tournant de 1908 », Mil neuf cent. Revue d'histoire intellectuelle, no 19, 2001, p. 119-126 (ISBN 978-2-912338-18-1).
- ↑ a, b et c Robert Havard de La Montagne, Histoire de l'Action française, Amiot-Dumont, Paris, 1950.
- ↑ a, b et c Michel Winock, Histoire de l'extrême droite en France, éditions du Seuil, Paris, 1993, p. 98.
- ↑ François Chaubet, « L'Union pour l'action morale et le spiritualisme républicain (1892-1905) », Mil neuf cent. Revue d'histoire intellectuelle, no 17, 1999, p. 67-89.
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- ↑ Stéphane Piolenc, Pour un compromis... royaliste !, L'Action française 2000 n° 2815, Du 21 avril au 4 mai 2011, p. 13.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- (fr) Site officiel du Centre royaliste d'Action française et du bimensuel L'Action française 2000
- (fr) Maurras.net contient une bibliothèque qui reprend divers textes autour de l'Action française et de son histoire.
- (fr) Textes sur l'affaire Dreyfus et l'Action française
- (fr) Cédric Gruat, « 1936 : l’agression filmée de Léon Blum »
- (fr) Maison-Musée Charles Maurras à Martigues
Bibliographie
: Ouvrage utilisé comme source pour la rédaction de cet article
Études historiographiques
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Ouvrages et articles en langues étrangères
- (en) Eugen Weber, Action française: royalism and reaction in twentieth century France, Stanford University Press, 1962, 594 p.
Colloques évoquant l'Action française
- Colloques Charles Maurras organisés par Victor Nguyen (1936-1986) et Georges Souville, Aix-en-Provence, 1968 - 1976.
- Communication au colloque L'éloquence politique en France et en Italie, des années 1870 à nos jours, organisé par l'Université de Paris-X-Nanterre avec la collaboration de l'École française de Rome, octobre 1998.
- Colloque L'Action française : culture, société, politique, organisé à Paris, dans le cadre du Centre d’histoire de Sciences Po, avec le concours de l’Institut de recherches historiques du Septentrion (IRHIS) et du Comité d’histoire parlementaire et politique (CHPP). Sous la direction de Jacques Prévotat et Michel Leymarie. Préparation de René Rémond. 21 - 23 mars 2007.
Résumé par Tony Kunter. - Colloque L’Action Française et l’étranger, organisé par Olivier Dard, Metz, 2008.
- Colloque Le maurrassisme et la culture. L’Action française. Culture, société, politique (III), sous la direction d'Olivier Dard, Michel Leymarie et Neil McWilliam. Organisé dans le cadre du Centre d'histoire de Sciences Po avec le concours de l'Institut de recherches historiques du Septentrion (IRHIS), du Centre régional universitaire lorrain d'Histoire (CRULH, Metz) et de l'université Duke, 25 - 27 mars 2009, Paris.
- Colloque Jacques Bainville 2009 organisé les 13 et 14 mai 2009 à l’université Paul-Verlaine – Metz avec le soutien de la Maison des sciences de l’homme Lorraine ainsi que du Centre régional universitaire lorrain d’histoire et du Centre d’études germaniques interculturelles de Lorraine. Actes du colloque dans Jacques Bainville – Profils et réceptions, études réunies par Olivier Dard et Michel Grunewald (Peter Lang, collection Convergences, Vol. 57), 2009, 268 p. (ISBN 978-3-0343-0364-4)
- Plusieurs autres colloques.
Filmographie
- Archives de l'INA, Reportage sur Le procès de Charles Maurras tel que présenté aux Actualités françaises, 1er janvier 1945.