Affaire Deulin
- Wikipedia, 29/10/2011
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L'Affaire Deulin est une affaire criminelle française qui se déroule en 1987. Janine Deulin âgée de 33 ans s'est suicidée. Cependant, les circonstances étranges du suicide valent à son époux Jean-Pierre Deulin d'être suspecté de meurtre et emprisonné. Le procès a lieu en 1990. Jean-Pierre Deulin est acquitté grâce à son avocat Me Dupond-Moretti. Aujourd'hui même si l'enquête conclut au suicide de Janine Deulin, personne ne sait exactement le pourquoi de son geste.
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L'affaire
Le samedi 20 juin 1987 aux alentours de minuit les Deulin dorment dans leur ferme de Maroilles dans le Nord. Soudain un coup de feu retentit dans la chambre à coucher; Jean-Pierre Deulin se réveille en sursaut et découvre à ses côtés sa femme Janine étendue, baignant dans une mare de sang, morte (tuée avec un fusil). Jean-Pierre Deulin va chercher de l'aide chez ses parents qui habitent à 300 mètres de la maison. Prévenus du suicide de leur belle-fille ces derniers se rendent aussitôt au domicile de leur fils. Là, ils préviennent le médecin du village qui arrive quelques instants plus tard. Sur place le médecin conclut rapidement au suicide de Janine Deulin. Puis Jean-Pierre et ses parents, avec l'aide du menuisier du village (qui est aussi chargé des obsèques) déplacent le corps ensanglanté de Janine dans une autre chambre propre; son corps est ensuite lavé et habillé afin de procéder à la veillée funèbre. Le menuisier du village s'étonne que la belle-famille de la victime n'ait pas appelé en premier les gendarmes. Jean-Pierre Deulin s'empresse par la suite de détruire le fusil qui a servi à la mort de Janine tandis que la mère de Jean-Pierre nettoie les draps ensanglantés du lit conjugal.
Ce n'est qu'à 9 heures du matin le lendemain que Jean-Pierre Deulin appelle la gendarmerie pour signaler le suicide de sa femme Janine (soit 9 heures après les faits ce qui est inhabituel). Les gendarmes se rendent au domicile des Deulin et ont la surprise de constater que tout a été nettoyé (la chambre des Deulin, les draps et la victime). En interrogeant le mari de la victime et les parents de Jean-Pierre Deulin, les gendarmes apprennent que ces derniers ne pouvaient pas et ne voulaient pas laisser l'endroit tel qu'il était, c'est-à-dire sale et ensanglanté. Ils apprennent par la même occasion que Jean-Pierre Deulin s'est débarrassé du fusil. Ils parviennent néanmoins à le retrouver et remarquent que la culasse du fusil se trouve au fond d'un seau rempli d'eau, ce que Jean-Pierre Deulin ne comprend pas.
Le corps de Janine Deulin est emmené à la morgue pour une autopsie tandis que le village de Maroilles apprend avec stupeur la mort de Janine Deulin. Il est prévu aussi que l'enterrement de Janine Deulin ait lieu l'après-midi même (le lendemain de sa mort), ce qui est précipité d'autant que si l'enterrement a lieu il se fera sans corps. Dans le même temps Jean-Pierre Deulin a disparu, personne ne sait où il se trouve. La consternation s'empare des villageois qui ne comprennent absolument pas pourquoi Jean-Pierre est introuvable étant donné que les funérailles de son épouse ont lieu l'après-midi même. Finalement les funérailles n'ont pas lieu et une messe à l'attention de Janine Deulin est dite hors la présence de Jean-Pierre et sans le corps de Janine. Puis en début d'après-midi un accident a lieu près de Maroilles : une voiture verte s'est écrasée violemment contre un muret. Les pompiers et les gendarmes se rendent sur les lieux de l'accident et s'aperçoivent que le conducteur n'est autre que Jean-Pierre Deulin. Celui-ci grièvement blessé est transporté à l'hôpital. Dans la voiture à la recherche de quelconques indices les policiers ramassent un prospectus plié en quatre sur lequel sont écrits quelques mots qui éveillent l'intérêt des policiers. En effet ces mots disent que le conducteur de la voiture a tué sa femme parce qu'elle allait le quitter pour un autre, un représentant « pas très beau ».
L'instruction
Très rapidement les gendarmes et les policiers pensent que Jean-Pierre Deulin a tué sa femme et qu'il avait un mobile. Ils se rendent de surcroit à l'hôpital où Jean-Pierre Deulin, malgré son état, avoue le meurtre de sa femme. Deux jours après l'accident Jean-Pierre Deulin réitère ses aveux devant la juge d'instruction à l'hôpital.
En août 1987, Jean-Pierre Deulin est mis en détention pour l'assassinat de son épouse mais quelque temps plus tard il revient sur ses aveux : ce n'est pas lui qui a tué sa femme mais le prétendu amant de Janine, le représentant « pas très beau ». Il raconte que la nuit de la mort, vers 23 h, ce représentant est entré par effraction dans la chambre à coucher où il a parlé avec Janine; puis cette dernière a dit à son mari qu'elle le quittait pour lui. Sur ces entrefaites le représentant est parti et est revenu plus tard pour tuer Janine. Un récit peu crédible qui renforce les soupçons des policiers sur la culpabilité de Jean-Pierre Deulin. Les policiers recherchent par conséquent le fameux représentant dans la région mais ne débouchent sur aucune piste. De plus Janine Deulin, aux yeux de tous, n'était pas le genre de femme à aguicher les hommes; la piste de l'amant est donc abandonnée.
Par ailleurs le médecin légiste qui a pratiqué l'autopsie confirme que Janine Deulin n'a pas pu se suicider, hypothèse confirmée par les experts en balistique qui examinent le fusil qui a donné la mort à Janine Deulin. En 1989, une reconstitution est organisée sur le lieu du crime pour déterminer si oui ou non Janine Deulin s'est suicidée. La greffière joue le rôle de Janine Deulin et fait semblant de se suicider mais n'arrive pas à appuyer sur la détente, ce qui veut dire que Mme Deulin ne s'est pas donnée la mort. Toutefois Jean-Pierre Deulin fait remarquer que sa femme était beaucoup plus grande que la greffière et que la reconstitution est faussée par cette différence de taille (en effet Janine Deulin mesurait 1 m 61). Cependant les gendarmes croient que Mme Deulin mesurait 1 m 55, voire 1 m 57 (selon la carte d'identité de la défunte) au moment de cette reconstitution et étant donné que la longueur du fusil est de 72 cm, les gendarmes et la juge ont du mal à imaginer que le bras de la défunte mesurait 72 cm. De plus les experts en balistique pensent que Janine Deulin a été tuée à bout portant (le bout du canon du fusil ne touchait pas la peau de Mme Deulin), c'est-à-dire que la distance entre le bout du canon et la peau de la victime est évaluée à 5 cm. Ce qui veut dire qu'il faut que le bras de la victime ait mesuré 77 cm pour qu'elle puisse appuyer sur la détente, ce qui est impossible. Jean-Pierre Deulin est ainsi renvoyé en prison (malgré l'absence de mobile) et attend son procès.
Le procès
Le procès de Jean-Pierre Deulin s'ouvre en mars 1990 et doit durer 2 jours. Entre le premier et le deuxième jour du procès l'avocat de Deulin Me Dupont-Moretti fait une expérience chez lui en présence d'un huissier de justice. Cette expérience vise à démontrer que Madame Deulin s'est bel et bien suicidée. Muni d'un fusil ainsi que de plusieurs liasses de feuilles de papier (1, 5 et 10 feuilles) il tire à bout touchant et laisse sur ces feuilles de papier des traces de corolle dont la forme et le diamètre varient en fonction de l'épaisseur de la liasse, certaines sont similaires à la trace de corolle retrouvée sur le corps de Janine Deulin. Au deuxième jour du procès les experts en balistique expliquent que la longueur totale du fusil est de 75 cm et non de 72 cm; de plus Mme Deulin ne mesurait pas 1 m 55 ni 1 m 57 mais 1 m 61 ce qui renforce l'hypothèse du suicide. En outre après plusieurs analyses des différentes positions dans lesquelles Mme Deulin s'est donné la mort, les experts en balistique sont d'accord pour dire que la seule position possible, au regard de la taille de Janine Deulin (1 m 61) et donc de son bras, dans laquelle elle pouvait se donner la mort est que sa tête était tournée vers la droite et qu'elle a utilisé son majeur pour tirer. Au total la longueur du fusil est estimée à 75 cm et la distance entre le bout du fusil et la peau de la victime est évaluée à 5, voire 6 cm; donc une longueur totale de 81 cm. Par conséquent Janine Deulin a réellement pu se suicider. Par ailleurs le légiste a noté une importante alcoolémie chez Janine Deulin au moment de sa mort (1 g 85) et ceci est assez étrange quand on sait que Janine Deulin ne buvait pas ou rarement. La seule explication fournie à ce mystère est donnée par Me Dupont-Moretti: en effet ce dernier affirme que si Janine a bu autant c'était pour se donner du courage avant de se suicider. Puis le juge demande à Jean-Pierre Deulin pourquoi il a laissé un mot indiquant qu'il avait tué sa femme; ce dernier se défend mal en ne donnant aucune explication sérieuse et n'arrive pas à convaincre l'auditoire. En revanche l'avocat de Jean-Pierre Deulin réussit à expliquer le geste de son client : pour lui Jean-Pierre Deulin dans un état de psychose délirante suite au décès de sa femme peut avoir écrit ces mots qui l'accusent avant de vouloir se suicider. Jean-Pierre Deulin explique également que le soir du drame, vers 22 h 20, il est allé dénombrer ses bêtes pour s'assurer s'il n'en manquait pas. Il dit aussi qu'il a mis 30 minutes pour aller au champ alors que les gendarmes, eux, en faisant le même parcours ont mis 50 minutes. Toutefois Jean-Pierre Deulin explique qu'il a pris un raccourci, d'où ce gain de temps.
Après les deux jours de procès le jury acquitte définitivement Jean-Pierre Deulin. L'intervention de l'avocat de la défense Maitre Dupont-Moretti a été déterminante dans cette affaire. Cet avocat est célèbre pour des acquittements difficiles en particulier, 15 ans plus tard, dans l'Affaire d'Outreau
Jean-Pierre Deulin n'a pas été dédommagé par l'État pour avoir passé presque 3 ans en prison et vit encore aujourd'hui dans sa ferme de Maroilles où il est l'ouvrier du nouveau propriétaire. Ses deux enfants ont été placés sous la tutelle de sa belle-sœur.
Liens externes
- Présumé coupable FR3 24 mars 1992 INA Archives