Jean-Claude Marin
- Wikipedia, 6/02/2012
Jean-Claude Marin, né en 1949 à Saint-Denis, est un haut magistrat français.
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Carrière
En 1977, il est substitut du procureur à Pontoise. En 1985, il est détaché à la commission des marchés à terme de marchandises. En 1988, il devient chef de la section financière du parquet de Paris. L'époque est celle de l'affaire du délit d'initié Pechiney-Triangle. Il est procureur adjoint de 1995 à 2001.
Nommé en 2001 avocat général à la Cour de cassation, il est nommé le 8 août 2002 directeur des affaires criminelles et des grâces, avant de devenir en 2004 procureur de la République de Paris. Il est également enseignant à l'Institut d'études politiques de Paris au sein du Master Droit économique, et à l'Université Paris-Dauphine au sein des Masters 122 (Droit approfondi de l'entreprise) et Masters 214 (Droit des affaires).
Il est nommé, le 27 juillet 2011, procureur général près la Cour de Cassation. Il s'est installé le 16 septembre 2011.
Lors de la rentrée solennelle le 9 janvier 2012, dans son allocution il a émis des critiques au fonctionnement de la Cour de cassation, et donc indirectement à son premier président Vincent Lamanda. [1]
Par le décret du Président de la République du 1 février 2012, il est nommé président du conseil d’administration de l’établissement public chargé du futur Palais de justice de Paris (EPPJP).
Polémiques
La proximité supposée, selon le site bakchich.info, de Jean-Claude Marin avec les partis politiques de la majorité de droite[2], l'exercice de ses fonctions de procureur dans l'affaire Tarnac, son soutien à Julien Dray compromis dans une affaire de détournement de fonds[3], son rôle dans les réformes de la justice du gouvernement Fillon ont suscité les plus vives polémiques.
Jean-Claude Marin et l'affaire Tarnac
À propos de l'affaire Tarnac, des universitaires et des juristes dénoncent l'« inconsistance » des charges retenues, ainsi que le « tour clairement politique » qu'a pris l'affaire, et réclament la libération immédiate de Julien Coupat. La Ligue des droits de l'homme s'inquiète également d'« une procédure qui ne s’embarrasse pas du respect des libertés individuelles, et se déroule sous l’œil de médias alimentés d’informations uniquement à la charge des personnes mises en cause[4].
Lors de la libération du jeune homme, le 29 mai 2009, Jean-Claude Marin, toujours procureur de la République de Paris, déclare « Si la mise en examen d'une personne ne préjuge en rien de sa culpabilité, sa remise en liberté au cours de l'information judiciaire ne saurait être interprétée comme le signe de l'absence ou l'insuffisance de charges contre elle ». La remise en liberté du jeune homme, détenu pendant plus de six mois à la prison de la Santé, donne prise aux plus vives réactions et est souvent interprétée comme le signe manifeste d'un « fiasco judiciaire » : le député PS Arnaud Montebourg déclare notamment que « Julien Coupat, le romantique de Tarnac, coupable de ce qu'il pensait et de ce qu'il avait dans la tête, plutôt que de ce qu'il a fait, symbolise désormais la victime des abus judiciaires du régime »[5].
Jean-Claude Marin et l'affaire Dray
Après son soutien à Julien Dray, Jean-Claude Marin a proposé aux avocats de ce dernier une « procédure sur mesure » pour reprendre la formulation du journal Libération dans son édition du 9 juillet 2009. Le procureur de la République de Paris, Jean-Claude Marin, a annoncé au député de l’Essonne et à ses avocats qu’ils auraient communication du rapport d’enquête préliminaire sur ses comptes, pour qu’il puisse livrer ses observations, avant que le parquet ne décide de la suite à donner à l’affaire. Il est tout à fait inhabituel qu’une enquête préliminaire soit ainsi communiquée. « C’est une expérimentation », a précisé le parquet[6].
Contestant vouloir une « procédure taillée sur mesure » pour Julien Dray, Jean-Claude Marin a exprimé dans le journal Le Monde l'opinion suivante « On n’a pas le droit de continuer à faire de la justice financière au carbone 14, surtout lorsqu’on se trompe de cadavre. » Cette déclaration « énigmatique » (selon le journal Libération) a suscité quelques commentaires négatifs « C’est l’arbitraire le plus total, dénonce ainsi un magistrat du pôle financier. C’est hyperchoquant (sic) pour tous ceux qui ont fait l’objet d’une enquête préliminaire. Certains pourraient saisir la juridiction administrative. Si ce n’est pas une procédure taillée sur mesure, pourquoi l’envisager seulement en matière financière, pourquoi pas aussi en matière de stups, ou de terrorisme ? »[7].
Le 15 décembre 2009, Jean-Claude Marin communique un avis tendant à abandonner les poursuites. Dans son rapport, le procureur de Paris suggère à la chancellerie de ne pas renvoyer Julien Dray devant le tribunal correctionnel et de ne prononcer qu'un simple « rappel à la loi ».
Le journal Le Monde parle d'une « enquête menée au bon vouloir du pouvoir », Le Figaro de « clémence[8] ».
Jean-Claude Marin et la réforme de la justice
Selon Alain Salles, ce serait lui qui aurait écrit la loi Perben II, dont le but était le renforcement des pouvoirs du parquet. Il bénéficiera lui-même de ces pouvoirs en devenant par la suite procureur de Paris, poste qu'il perçoit comme « le plus beau (...) du ministère public »[9].
Par ailleurs, Jean-Claude Marin milite en faveur du projet de réforme que Nicolas Sarkozy a développé devant la Cour de cassation. Il se félicite de la suppression du juge d'instruction tout en ne souhaitant pas l'instauration d'une véritable procédure accusatoire. Cette prise de position est critiquée par Philippe Bilger qui écrit ainsi « Plus jeune, je me souviens avoir été du même avis que Jean-Claude Marin. Parce que probablement l'orgueil est satisfait, voire un peu la vanité, à l'idée qu'on serait le seul responsable, par l'affirmation de soi, de son émancipation. En réalité, aujourd'hui, je crois au contraire qu'il faut commencer par l'instauration de structures dont l'une des finalités essentielles devrait être de protéger n'importe quel professionnel contre les risques prévisibles de sa médiocrité et de sa dépendance »[10].
Jean-Claude Marin et Frédéric Beigbeder
Fin juillet 2009, Jean-Claude Marin est impliqué dans une nouvelle polémique[11],[12]. Le procureur de la République de Paris est en effet placé « en détention non provisoire » au chapitre 27 de Un roman français de Frédéric Beigbeder, paru le 19 août 2009 chez Grasset. Il s'agit en fait d'une « vengeance littéraire » de la part de l'écrivain contre le procureur, à la suite d'une garde à vue subie après avoir été surpris en train de consommer de la cocaïne. C'est à cette occasion que Beigbeder fait la connaissance de Jean-Claude Marin, dont les services sont chargés du dossier.
Or, la presse considère que ce livre a été « censuré » par l'éditeur. Il existe en effet deux versions du Roman français : une première délivrée aux libraires et à la presse en « avant-lecture » au mois de juin 2009, et une seconde destinée à la mise en vente en août de la même année. Entre ces deux moutures, un prudent toilettage des passages concernant Marin a été effectué. La raison avancée par l'éditeur est d'ordre purement juridique (craintes de demande de retrait du livre pour « injures » ou « diffamation »). Par exemple, dans un des passages modifiés, Frédéric Beigbeder écrit que ce doit être « vraiment chiant d'être Jean Claude Marin ».
Des trois pages litigieuses consacrées à Jean-Claude Marin, il ne reste qu'une phrase où Frédéric Beigbeder affirme : « Les mots : Jean, Claude, et Marin, pour les générations à venir seront le symbole de la Biopolitique Aveugle et de la Prohibition Paternaliste ».
Dans un communiqué en date du 28 juillet 2009, Jean-Claude Marin rappelle le déroulement des faits et précise que la procédure suivie était habituelle[13].
Récompensé du prix Renaudot le 2 novembre 2009, Frédéric Beigbeder remercie ironiquement Jean-Claude Marin "pour l'avoir mis en garde à vue"[14].
Clearstream
Du 21 septembre au 23 octobre 2009, il soutient l'accusation au procès Clearstream[15]. Il s'en prend à Dominique de Villepin quelques jours avant le début du procès Clearstream[16].
Au procès Clearstream, Jean-Claude Marin, dans son réquisitoire de procureur de la République, demande une peine de dix-huit mois de prison avec sursis et une amende de 45 000 euros à l’encontre de Dominique de Villepin pour avoir « cautionné par son silence » la manipulation Clearstream. Il avance alors, pour les besoins de son réquisitoire, la notion de « complicité par abstention volontaire », qu'il justifie publiquement avant l’audience, ce qui ne s’était jamais vu[17], suscitant ainsi la colère des avocats de la défense, qui y voient une pure invention hors de tout cadre légal.
Après la relaxe de Dominique de Villepin, il annonce son intention d'interjeter appel, en affirmant n'avoir reçu aucune instruction pour prendre cette décision[18].
Réquisitoire dans l'affaire Chirac
Jean-Claude Marin requiert un non-lieu général au bénéfice de Jacques Chirac dans le dossier des emplois fictifs de la mairie de Paris, estimant qu'il manque l'élément intentionnel. La juge Xavière Simeoni ne suit cependant pas ces réquisitions dans son ordonnance du 30 octobre 2009. La retraite de l'ancien président Jacques Chirac est menacée par cette ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. Cette affaire est venue alimenter la controverse sur l'avenir de la justice en France, au moment où la disparition programmée du juge d'instruction est perçue par certains commentateurs comme une remise en cause de l'indépendance de la justice dans les dossiers « sensibles ». Face à un parquet soumis au pouvoir exécutif, les juges d'instruction semblent vouloir, selon les termes du journal Le Monde, « marquer leur indépendance »[19].
Décorations
- Officier de l'Ordre de la Légion d'honneur depuis le 2 avril 2010.[20]
- Officier de l'Ordre national du Mérite.
Notes et références
- ↑ « Les flèches acérées du procureur général Jean-Claude Marin », Le Monde. 11 janvier 2012.
- ↑ Selon Bakchich info : « Le procureur de la République de Paris, qui vient de demander un supplément d’information dans l’affaire Clearstream, est un homme plein de talents. Doté d’un grand sens politique, il a d’abord été balladurien, pour virer chiraquien, avant de tourner sarkozyste, avec à chaque fois un objectif : sa carrière. Il brigue aujourd’hui le poste de procureur général de Paris. Retour sur un magistrat très au fait du sens du vent. » (Xavier Monnier, « Jean-Claude Marin, un proc’ qui vous veut du bien », Bakchich info, 9 juin 2008). Le procureur a adressé fin 2007 un rapport à la Chancellerie faisant état de scellés judiciaires mettant en cause le financement de la campagne de Balladur en 1995 (www.bakchich.info).
- ↑ « Jean-Claude Marin : “La vie privée de Julien Dray étalée sur la place publique, c'est scandaleux !” », RTL, 23 janvier 2009.
- ↑ « Sabotage SNCF : des intellectuels et la LDH dénoncent la législation antiterroriste », Libération, 27 novembre 2008.
- ↑ Arnaud Montebourg, « Ce romantisme de Tarnac qu'on a jeté en prison », Rue89, 28 mai 2009.
- ↑ Kark Laske, Affaire Dray : une procédure sur mesure ?, Libération, 9 juillet 2009.
- ↑ Karl Laske, « L’affaire Dray, poisson pilote dans la réforme de l’instruction », Libération, 22 juillet 2009.
- ↑ Pascale Robert-Diard, Le Monde du 18 décembre 2009 ; Le Figaro.fr du 17 décembre 2009.
- ↑ Alain Salles, Jean-Claude Marin : l'habileté du droit dans Le Monde du 21/09/2009.
- ↑ Philippe Bilger, « Un magistrat peut-il être vraiment indépendant ? », Marianne 2, 23 février 2009.
- ↑ « Le procureur, l'auteur et les ciseaux de l'éditeur », LeMonde.fr, mis en ligne le 30 juillet 2009.
- ↑ « Le nouveau roman de Beigbeder censuré », NouvelObs.com, mis en ligne le 30 juillet 2009.
- ↑ « La réplique de Jean-Claude Marin à Beigbeder », NouvelObs.com, mis en ligne le 30 juillet 2009.
- ↑ Le Point.fr, consulté le 02/11/2009.
- ↑ Alain Salles, Jean-Claude Marin : l'habileté du droit, Le Monde du 21/09/2009.
- ↑ « Le procureur Jean-Claude Marin s'en prend à Dominique de Villepin », LePoint.fr, consulté le 29/08/2009.
- ↑ « Clearstream, distribution de soufflets » sur LeMonde.fr, consulté le 28/01/2010.
- ↑ « Affaire Clearstream : le parquet fait appel, M. Sarkozy n'est plus partie civile » dans LeMonde.fr, consulté le 29/01/2010.
- ↑ Gérard Davet, « Le mois où les juges ont marqué leur indépendance », Le Monde des 1er-2 novembre 2009
- ↑ Décret du 2 avril 2010, publié le 4 avril 2010 au Journal officiel, NOR: PREX1004884D.