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Denis Vrain-Lucas

- Wikipedia, 27/12/2011

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Vrain-Denis Lucas, dit Vrain-Lucas, est un faussaire littéraire français né à Lanneray (Eure-et-Loir) en 1818 et décédé à Chateaudun en 1882[1]. Il est connu pour être l'auteur de la « collection Chasles », ensemble de faux manuscrits qu'il vendit au mathématicien Michel Chasles.

Sommaire

Sa « formation » : ou comment il devint faussaire

Il fut successivement clerc d'avoué, greffier près le tribunal de Chateaudun puis commis au Bureau des hypothèques. En 1852, il se rendit à Paris et, après avoir vainement tenté d'obtenir un emploi à la Bibliothèque impériale (l'actuelle BnF), entra comme placier dans un cabinet généalogique qui produisait, le cas échéant, de faux titres de noblesse. Il acquit là une habileté extraordinaire à contrefaire les pièces et les écritures.

L'escroquerie qui le rendit célèbre

En 1861 il entreprit, aux dépens du célèbre mathématicien Michel Chasles, membre de l'Institut et originaire, comme lui, d'Eure-et-Loir, l'escroquerie qui le rendit célèbre. Se prétendant détenteur d'une incomparable collection d'autographes, il lui vendit une foule de pièces fausses, et, encouragé par l'extrême naïveté de l'acheteur, lui apporta successivement des lettres de Pythagore, d'Alexandre le Grand à Aristote, de Lazare à saint Pierre, de Marie-Madeleine, de Cléopâtre VII à Jules César. Il restait pourtant en réserve une foule d'autres lettres censées émaner de Judas Iscariote, Ponce Pilate, Jeanne d'Arc, Cicéron et Dante Alighieri — toutes écrites dans un ancien français de fantaisie, encore à peu près lisibles et compréhensibles par les contemporains de Chasles et Vrain-Lucas —. Enfin, deux lettres de Blaise Pascal, semblant établir la preuve que ce dernier aurait découvert la loi de l'attraction universelle avant Isaac Newton[2]. Ceci signifiant que le fait pouvant flatter l'orgueil national, ces lettres furent présentées avec empressement par Chasles, à l'Académie des sciences.

Chasles ayant donc accepté les lettres, et « pressé » par ses confrères académiciens, d'en présenter d'autres, passa commande à Vrain-Lucas de davantage de documents. Ce dernier procéda ainsi à la vente au trop naïf Chasles de centaines de lettres fabriquées selon un procédé de forgerie, lesquelles lettres donc, tout aussi forgées que celles de la première livraison, étaient censées émaner des figures historiques et bibliques parmi les plus renommées de l'histoire.

Polémique sur les « lettres » de Chasles

Une polémique s'ensuivit, où l'Académie française elle-même prit parti pour le mathématicien Chasles. Quand il leur montra les lettres, quelques condisciples de l'académicien observèrent que l'écriture des documents présentés était très différente de celle des lettres qui étaient historiquement certifiées écrites par Pascal.

Chasles, pour avoir voulu défendre l'authenticité des lettres s'est trouvé par la suite, et face aux doutes qui se faisaient jour dans l'esprit des académiciens, forcé d'indiquer que c'était le sieur Vrain-Lucas qui les lui avait vendues. Mais, en 1869, craignant de voir lui échapper des pièces importantes Chasles fit surveiller Vrain-Lucas par la police, qui découvrit l'officine.

Vrain-Lucas est confondu

Arrêté, interrogé et rapidement confondu, le faussaire fit alors des aveux et fut condamné en 1870 par la 6e chambre correctionnelle de la Seine à deux ans d'emprisonnement et 200 francs d'amende. Il avait sur une durée de 16 ans forgé plus de de 27 000 autographes, lettres, documents et manuscrits s'échelonnant de l'Antiquité classique au siècle des Lumières, et au total soutiré près de 140 000 francs or (plus ou moins 50 000 euros) à sa victime. Par suite Chasles a dû témoigner comment il avait été dupé, comment il avait acheté un grand nombre d'autres lettres forgées par Vrain-Lucas et combien il avait payé et donc perdu d'argent lors de cette malheureuse affaire, qui de surcroît l'avait ridiculisé auprès de la communauté scientifique.

Après sa sortie de prison, en 1872, Vrain-Lucas commit d'autres délits (vols, abus de confiance) et fut condammé de nouveau à la prison (1873 et 1876). Sa dernière peine purgée, il regagna l'Eure-et-Loir et se livra au commerce des livres anciens à Chateaudun, où il mourut en 1882.

Références

  1. Date fournie par la notice Autorité personne de la BnF. L'article de M.-L. Prévost cité dans la bibliographie indique 1881.
  2. Newton a-t-il plagié Pascal ?

Autres affaires semblables

Bibliographie

  • Henri Bordier et Émile Mabille, Une fabrique de faux autographes ou Récit de l'affaire Vrain Lucas, Paris, Techener, 1870. Cet ouvrage, dû aux experts désignés par la justice lors du procès de 1870, a été réimprimé avec une préface de Claude Seignolle sous le titre : Vrain Lucas : le parfait secrétaire des gens de lettres, Paris, Éd. Cartouche, 2005 (ISBN 2-915842-05-1). Il a été traduit en anglais par Joseph Rosenblum : Prince of forgers, New Castle (Del.), Oak Knoll Press, 1998 (ISBN 1-884718-51-5).
  • Marie-Laure Prévost, « Vrain Lucas, le Balzac du faux », in Revue de la Bibliothèque nationale de France, n° 13, 2003, pp. 59-69 (disponible en ligne à l'adresse http://editions.bnf.fr/pdf/revue/extrait13.pdf).
  • Après le procès de 1870, les 27 320 faux autographes vendus à Chasles par Vrain-Lucas furent détruits à l'exception d'un petit nombre d'entre eux, qui ont été offerts par Bordier et Mabille « avec la permission de l'autorité judiciaire » au Département des manuscrits de la BnF et réunis en un volume de 180 folios conservé sous la cote N(ouvelles) A(cquisitions) F(rançaises) 709. Les pièces les plus curieuses ont été publiées par Georges Girard : Le parfait secrétaire des grands hommes ou Les lettres de Sapho, Platon, Vercingétorix, Cléopâtre, Marie-Madeleine, Charlemagne, Jeanne d'Arc et autres personnages illustres, mises au jour par Vrain Lucas, Paris, La Cité des livres, 1924. Réimpression : Paris, Éd. Allia, 2002 (ISBN 2-84485-091-X).



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