Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques
- Wikipedia, 31/01/2012
La Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) (anciennement, la Taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers ou TIPP) est la principale taxe perçue en France sur certains produits énergétiques, notamment ceux d'origine pétrolière. C'est un droit d'accise.
Elle tire son origine de la TIP[1] (taxe intérieure pétrolière), mise en place par les lois du 16 et 30 mars 1928 qui organisent l’industrie du raffinage en France. Cette taxe avait pour but de compenser le déclin d’une autre contribution indirecte, l’impôt sur le sel. Elle est largement montée en puissance dans les années 1970, en réaction au choc économique qui a suivi le choc pétrolier de 1973.
Depuis 2005, la France a obtenu une dérogation de la part de l'Union européenne et opère une taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers régionalisée sur les supercarburants sans plomb (95 et 98) et gazole.
En 2011[2], le nom de cette taxe a été changé de taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers à taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, rendant ainsi plus clair le fait qu'elle s’applique aussi à des sources d’énergie qui ne sont pas d’origine pétrolière.
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Principales caractéristiques
Assiette
Cette taxe vise des produits dont la liste est commune à tous les États membres de l'Union européenne (Directive 2003/96/CE du Conseil du 27 octobre 2003 « restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité »)[3].
Reprise en droit français dans les tableaux B et C de l'article 265 du code des douanes, elle précise que seuls sont taxés les usages en tant que carburant ou combustible de chauffage.
La TICPE s'applique à tout produit qui est destiné à être utilisé, qui est mis en vente ou qui est utilisé comme carburant pour moteur, comme additif ou en vue d'accroître le volume final des carburants pour moteur (à ce titre, elle s'applique à tous les biocarburants).
La TICPE s'applique aussi à tout hydrocarbure qui est destiné à être utilisé, qui est utilisé ou qui est mis en vente pour le chauffage, à l'exception du gaz naturel et des combustibles solides tels que le charbon, la tourbe ou le lignite.
Montant
Cette taxe est perçue sur les volumes, et non sur le prix de vente du produit. C'est donc un montant fixe en euros qui est perçu sur chaque unité vendue. Le montant dépend de la nature du produit (essence ou gazole par exemple), mais aussi du type de consommation (usage comme carburant ou pour le chauffage, par exemple). C'est le super qui supporte la TICPE la plus élevée : 0,6069 euro pour un litre de sans plomb en 2011[4].
À une époque où le pétrole était bon marché, la part totale des taxes (TIPP et TVA) a représenté jusqu'à 80 % du prix du "super". Cette part a baissé avec la hausse du pétrole (60 % pour le Super sans plomb, 52 % pour le gazole et 23,7 % pour le fioul domestique en 2007)[5]. La hausse du prix des carburants hors taxes augmente bien le produit de la TVA, mais en revanche n'augmente pas la recette de TICPE.
La TICPE rapporte environ 25 milliards d'euros par an aux finances publiques[6]. À titre de comparaison, la fiscalité des produits pétroliers occupe le 5e ou 6e rang des recettes, derrière la TVA (142,1 milliards d'euros), la CSG (72 milliards d'euros), l’impôt sur le revenu (53,7 milliards d'euros), l’impôt sur les sociétés (44,1 milliards d'euros), à plus ou moins égalité selon les années avec la taxe professionnelle.
Depuis la loi de finances 2006, les régions perçoivent une part importante de la TICPE (en 2007, plus de 6 milliards d'euros sur les 25). Elles ont également la faculté d'en moduler le taux dans une faible mesure (représentant environ 1 % du prix à la pompe)[7]. À partir de 2007 et ce, jusqu’en 2009, les fractions de tarifs régionales augmenteront sensiblement parallèlement aux nouveaux transferts de compétences[8].
Exonérations
Un certain nombre de professions et activités bénéficient d'exonérations partielles ou totales[9] :
- aviation (carburéacteur aéronautique, celui-ci étant il est vrai exporté dans le cas des vols internationaux)
- bateaux, y compris pour la pêche (à l'exclusion de la navigation de plaisance et de sport, ainsi que le transport fluvial)
- taxis (jusqu'à 5 000 litres par véhicule et par an)
- certains commerçants offrant des services d'ambulance en milieu rural
- transport public (jusqu'à 40 000 litres de GPL ou gaz naturel)
- transport routier de voyageurs (15 000 litres par semestre et par autocar)
- transport routier de marchandises (remboursement d'une fraction de la TICPE pour les véhicules de plus de 7,5 tonnes)
- agriculture (réduction de TICPE sur le fioul) (des colorants indélébiles sont utilisés pour rendre toute fraude décelable)
La TIPP flottante
En France entre le 1er octobre 2000 et 21 juillet 2002 été mise en place une TIPP flottante. L'idée était de réduire la TIPP en période de hausse et de l'augmenter en période de baisse pour écrêter les hausses et lisser les baisses. Adoptée sous la pression des consommateurs professionnels, dans l'objectif d'une baisse immédiate du prix du carburant (et, théoriquement, d'une hausse ultérieure), et dans un contexte budgétaire relativement favorable, elle ne dura pas. En effet pour que le système fonctionne, il faut que les périodes de hausse soient compensées par des périodes de baisse, à moins que l'État ne renonce délibérément à des recettes fiscales. Or les réalités budgétaires sont rapidement revenues sur le devant de la scène, tandis que la perspective d'un prix du pétrole orienté à la hausse impliquait un maintien sans limite de la TIPP à son niveau bas, sans lissage mais avec une perte permanente pour le budget.
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L'idée reste néanmoins périodiquement proposée, et repoussée. Thierry Breton, alors ministre de l'Économie, expliqua pour justifier la non reprise du système que cela avait coûté 2,7 milliards d'euros pour un avantage assez limité (1,5 centimes d’euro par litre) pour le consommateur[10]. C'est une "erreur" de Thierry Breton qui confond euros et francs, ce sont 2,7 milliards de francs qui ont amené une baisse de 1,5 centimes d'euro. Une somme de 2,7 milliards d'euros conduirait à une baisse de 7,61 centimes d'euros par litre (1/2 franc par litre)[11].
Le débat pour ou contre la TICPE
Contre la TICPE
Tous les impôts soulèvent des contestations, et la TICPE ne déroge pas à cette règle. D'autant qu'elle pèse lourd, puisqu'elle représente l'une des principales ressources du budget de l'État.
On lui reproche notamment :
- son niveau très élevé par rapport au prix de base du produit ; d'autant qu'il s'agit d'un produit de grande consommation, ce qui permet de comparer la TICPE à la gabelle.
- de peser lourdement sur les revenus les plus consommateurs à bas revenus, qui disposent souvent de véhicule anciens et peu économes en carburant ;
- de troubler la vérité des prix et fausser la concurrence entre les sources énergétiques (la TIPP ne pèse pas sur le gaz, le charbon et l'électricité, elle pousse donc les consommateurs vers ces énergies) ;
- d'être injuste et de créer des distorsions, par les nombreuses exonérations et réductions accordées à titre professionnel, ou inversement, du fait de l'absence d'exonération dans certaines circonstances où certains les estiment nécessaires.
Sur ce dernier point, notamment, la TICPE pèse aussi sur les biocarburants, alors qu'ils ne sont pas d'origine pétrolière ni ne participent, sur la totalité de leur cycle, à l'élévation du taux de CO2. Cela soulève l'indignation de plusieurs mouvances écologistes et d'agriculteurs (qui souhaiteraient, par exemple, utiliser dans leurs tracteurs l'huile produite dans leurs champs).
Des élus et des associations demandent le rétablissement de la TICPE flottante ou la baisse de cette taxe, afin d'alléger le poids de plus en plus lourd du carburant dans le budget des ménages. L'association "40 millions d'automobilistes" propose de signer une pétition en ligne pour la baisse des taxes sur l'essence.
Pour la TICPE
La TICPE a pour elle d'être une grosse source de rentrées budgétaire, pesant seulement sur un produit d'importation : il n'y pas de meilleur impôt pour les finances et l'économie nationale.
La consommation d'énergie d'une personne croît très fortement en fonction de son train de vie, sans réelle évasion fiscale possible. On retrouve donc là l'idée d'impôt sur l'énergie qualifié par Eugène Schueller de « plus juste de tous ».
La TIPP est une écotaxe, car elle permet d'internaliser les coûts environnementaux liés à l'usage du pétrole. Elle incite à réduire la consommation de pétrole et, ainsi, contribue à contenir l'effet de serre. Elle rend plus attractifs des modes de transports en commun ou doux (la marche, la bicyclette, etc.). Elle pousse fortement les constructeurs automobiles à proposer des véhicules économes en carburant, donc plus propres. En forçant les usagers à préférer des véhicules économes, elle les rend moins sensibles aux variations du cours du pétrole (une hausse de 10 centimes par litre à cause de la hausse du pétrole pèse beaucoup plus lourd dans le portefeuille quand on consomme 15 litres/100 km que quand on en consomme 5).
Elle a en outre l'avantage de constituer une recette fortement liée aux transports routiers (la TICPE sur les carburants est dix fois supérieure à celle sur le fioul domestique). Or ces transports :
- supposent des infrastructures, qui pourraient, voire devraient faire l'objet d'une redevance plutôt que d'un financement par l'impôt : la TICPE constitue un bon substitut à de telles redevances ;
- engendrent des nuisances (bruit, poussières et salissures de façades, dégradation du paysage, accidents, etc.), qui appellent contribution et réparation : là encore, la TICPE s'y substitue dans une certaine mesure.
Enfin, le pétrole est une source de frais spécifique pour la sécurisation militaire et diplomatique, et la TICPE est une façon de faire participer les consommateurs à ces frais.
Cependant, cette somme ne sert pas à indemniser les victimes des nuisances des carburants : c'est aux propriétaires qu'incombe légalement le ravalement décennal de leurs façades souillées par les suies d'échappement, et non aux automobilistes ; plus dramatiquement, c'est à la solidarité nationale, via l'assurance maladie, de prendre en charge les maladies et handicaps causés par la pollution de l'air par les sous-produits de la consommation pétrolière (poussières, oxydes d'azote, ozone, ...).
Notes et références
- ↑ Historique des Directions et des Services du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, p. 13
- ↑ Fiscalité des produits pétroliers dans la loi de finances initiale pour 2011 (LFI) et la loi de finances rectificative pour 2010 (LFR)
- ↑ Directive 2003/96/CE du Conseil de l'U.E. du 27 octobre 2003
- ↑ La fiscalité des hydrocarbures applicable au 1er janvier 2011 - Ce tarif inclut la part régionale de 0,0177 euro/litre
- ↑ Éléments chiffrés mensuels de la fiscalité sur les produits pétroliers - Douanes françaises, 23 avril 2008
- ↑ Les principales recettes fiscales en millions d'euros courants - De 1995 à 2005, site du ministère des finances
- ↑ En pratique, presque toutes les régions ont conservé le taux maximum. Cf. montant de la TIPP selon le carburant et selon les régions
- ↑ La fiscalité des produits pétroliers dans la loi de finances initiale pour 2009 - DGEMP-DIREM
- ↑ Douanes : La fiscalité sur les produits pétroliers
- ↑ Le blog auto : déclaration de Thierry Breton juin 2005
- ↑ Calcul : en 2004, la TIPP représentait 20,9 milliards d'euros (source : 4 pages du ministère des finances accompagnant la déclaration des revenus 2004), en faisant une simple règle de 3 avec les 0,5892 centimes d'euros par litre (chiffre cité plus haut pour la part de la TIPP dans un litre d'essence en 2004) on trouve 7,61 centimes d'euros : (2,7/20,9)*0,5892 = 0,0761 euros, CQFD