Thierry Paulin
- Wikipedia, 10/01/2012
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Thierry Paulin | |
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Information | |
Surnom(s) : | Le Monstre de Montmartre, Le Tueur de Vieille Dames |
Naissance : | 28 novembre 1963 Fort-de-France, (Martinique) |
Décès : | 16 avril 1989 (à 25 ans) Fresnes, (France) |
Cause du décès : | SIDA |
Meurtres | |
Nombre de victimes : | +18 |
Période : | 5 octobre 1984 - 25 novembre 1987 |
Pays : | France |
État(s) : | Paris |
Arrestation : | 25 novembre 1987 |
Thierry Paulin était un tueur en série français né le 28 novembre 1963 à Fort-de-France en Martinique et mort le 16 avril 1989. Il était surnommé le « Tueur de vieilles dames ». Entre octobre et novembre 1984, ce jeune martiniquais a étranglé huit femmes âgées dans le 18ème arrondissement de Paris. Entre décembre 1985 et juin 1986, il en a tué onze de plus. Paumé, dealer, magouilleur et pervers, il était serveur au Paradis Latin, puis a organisé des soirées privées "à thème" et flambait dans les boîtes de nuit. Il tuait en plein jour. La police ne l’a arrêté qu’en 1987. Il était séropositif et est décédé en 1989 avant d’avoir été jugé. Son amant et complice, Jean-Thierry Mathurin, a été reconnu coauteur de 9 des meurtres et condamné à la prison à perpétuité[1].
Sommaire |
Jeunesse
Thierry Paulin est né à Fort-de-France en Martinique. Sa mère, ayant 17 ans a sa naissance et son père s'étant envolé pour la France juste après sa naissance, elle aura bien du mal à s'occuper du bébé et le confie à sa mère avec qui Thierry Paulin vivra jusqu'à ses 10 ans. Durant cette période, sa grand-mère, accaparée par son restaurant sur une plage à côté des Trois Ilets ne consacrera que très peu de temps à l'enfant. Il manqua autant d'amour et d'affection que d'autorité.[réf. nécessaire]
En 1973, sa mère, ayant trouvé un nouveau mari, eut 2 autres enfants et s'étant installée au Lamentin, le reprit auprès d'elle. Il connut alors une courte période de bonheur, jouant avec ses demi-sœurs et jardinant. Cependant, sa scolarité fut difficile, il était difficile et très violent. Un jour, a 12 ans, il menaça son professeur avec un couteau de cuisine sous prétexte qu'il le "punissait trop". Il intercepta la lettre de l'école envoyée à sa mère pour l'informer de l'incident, et surtout, tapa une réponse à la machine à écrire qu'il signa en imitant la signature de sa mère. Il sut donc aussi, malgré tout, user de son intelligence. Sa mère ayant retrouvé la trace de son père en France, à Toulouse, décida d'envoyer Thierry en métropole, son père ayant accepté de le prendre avec lui. Lorsqu’il arriva à Toulouse, il eut du mal à s’intégrer à sa nouvelle famille. Son père, Gaby, qu’il n’avait jamais vu auparavant, était marié et avait deux enfants. Jusqu’à seize ans, Thierry Paulin alla au collège et passa tant bien que mal son Brevet. Il entreprit alors de préparer simultanément un CAP de coiffure et un autre de mécanique et électricité-auto, au centre de formation des apprentis de Bordelongue. Mais l’adolescent était plus préoccupé par ses virées à mobylette avec ses amis que par ses études. La bande traînait dans les cafés ou les boîtes de nuit, resquillait quand elle le pouvait, se bagarrait : elle fut vite connue. Il ne passa pas son CAP. Thierry Paulin était le seul Noir de la bande, mais il n’en souffrit pas : il se souvint de cette époque comme du "bon temps". Les rapports entre lui et son père se dégradèrent. Il se résolut à devancer l'appel du service militaire. Il fut affecté au salon de coiffure de la caserne de Pérignon. Il fut rejeté par les autres car il était homosexuel. Le 14 novembre 1982, alors qu’il était en permission, il cambriola une épicerie dont il était un client régulier, à Toulouse. Il y entra une première fois et engagea une conversation anodine avec l’épicière, âgée de 75 ans. Il ressortit et, dix minutes plus tard, refit irruption dans la boutique, le visage masqué par un foulard. Menaçant la vieille dame d’un couteau de boucher, il rafla le contenu de la caisse : 1400 francs (212€). Il avait à peine 19 ans. Il fut arrêté rapidement grâce au témoignage de l’épicière, qui l’avait bien évidemment reconnu, et fut interné une semaine en prison. Il fut dès lors fiché à l’identité judiciaire et jugé le 7 juin 1983 par le tribunal correctionnel de Toulouse. Il écopa de deux ans de prison avec sursis pour "vol avec violence". Il déclara au juge qu’il avait volé pour pouvoir s’acheter les vêtements qu’il désirait... Il fut renvoyé de l'armée définitivement pour plusieurs bagarres mais finit tout de même "matelot breveté". Entre temps, sa mère avait regagné la France et Paulin la rejoignit à Nanterre avec ses demi-sœurs. Il avait 21 ans et changé 3 fois de maison.
Arrivée à Paris
Il fut bientôt familier des milieux homosexuels parisiens et parvint à se faire embaucher comme serveur au Paradis Latin, un Night-club renommé pour ses spectacles de travestis. Là, il commence une carrière d'artiste, s'habillant en drag-queen en chantant les morceaux de son artiste favorite Eartha Kitt. Un jour, sa mère est invitée à venir voir le spectacle de son fils. Mais elle quitte le club précipitamment quelques secondes après le début du spectacle. Thierry Paulin pensa sans doute approcher son rêve : il pénétrait enfin un milieu qui l’acceptait. C’était alors un garçon athlétique, toujours vêtu à la dernière mode, un diamant à l’oreille, et il arborait une coupe de cheveux à la Carl Lewis. Il racontait à qui voulait l’entendre qu’il était "chef de rang", voir qu’il faisait partie de la troupe du spectacle. En fait, son travail consistait surtout à desservir les tables. Le fait le plus important est sa rencontre avec Jean-Thierry Mathurin, un toxicomane (comme Paulin, mais beaucoup plus sévèrement) qui travaillait également au Paradis Latin. Les deux hommes ressentirent une très forte attirance réciproque. Pendant la brève période où Paulin habita chez sa mère, ce ne fut que conflits et cris. Ne travaillant pas pendant la journée, il traînait à la maison, y amenait ses amis. La situation devint vite insupportable. Elle explosa le jour où il menaça sa mère de mort parce qu’elle refusait de lui signer un chèque pour une opération de chirurgie esthétique qui lui aurait permis d’effacer une cicatrice à la lèvre. Elle prévint la police. Il se retrouva donc à la rue en avril 1984, logeant chez des amis. Thierry Paulin et Jean-Thierry Mathurin décidèrent de vivre ensemble et s’installèrent dans une chambre d’hôtel à 275 francs (42€) la nuit. L’hôtel était situé rue Victor Massé, dans le 9e arrondissement, qui jouxte le 18ème. Pour trouver de l'argent, ils vendent de la drogue. Les deux fêtards passèrent leurs soirées en boîtes de nuits, buvaient du champagne, sniffaient de la cocaïne et dépensaient sans compter. Ce fut cependant une courte période de bonheur : À l'automne 1984, Paulin, jaloux, perdit son calme et fit une scène à Mathurin, explosant en plein restaurant, cassant verres et tables, hurlant qu'il allait lui "faire la peau". Ils furent immédiatement renvoyés du Paradis Latin. Ils durent se contenter d'une chambre moins chère et accentuèrent leur trafic de drogue.
Première vague de meurtres
- Le 5 octobre 1984, une vieille dame de 91 ans, Germaine Petitot, fut agressée chez elle par deux hommes. Dans son petit appartement de la rue Lepic, au bas de la butte Montmartre, elle fut ligotée, bâillonnée et battue avant d’être délestée de ses économies. La femme fut dans l’incapacité de donner une description de ses agresseurs. La police enregistra les faits et la déposition vint s’ajouter au dossier déjà volumineux qui concernait les attaques de personnes âgées dans le 18e arrondissement.
- Le même jour, dans le 9e, un arrondissement limitrophe, Anna Barbier-Ponthus eut moins de chance que Germaine Petitot. Cette dame de 83 ans vivait seule dans son modeste appartement de la rue Saulnier. En fin de matinée, elle rentra chez elle après avoir fait ses courses. Elle n’en ressortit plus. Selon toute vraisemblance, elle fut poussée à l’intérieur de chez elle au moment où elle ouvrait sa porte, puis elle fut battue et étouffée avec un oreiller. Son corps fut découvert peu de temps après, bâillonné et ligoté avec du cordon à rideau. On lui avait volé 200 ou 300 francs (30 ou 45 €), le peu que contenait son porte-monnaie.
- Le 9 octobre, les pompiers furent appelés sur les lieux d’un début d’incendie, à nouveau dans le 18e arrondissement. Dans l’appartement à moitié calciné, ils découvrirent le corps, pieds et mains liés, de Suzanne Foucault, 89 ans. La vieille dame avait été assassinée, étouffée par un sac plastique qui lui recouvrait la tête. On lui avait volé sa montre d’une valeur de 300 francs, et 500 francs en argent liquide. Pendant près d’un mois, la série sembla s’interrompre. Paulin se montrait encore et toujours en boîte de nuit.
- Le lundi 5 novembre, boulevard de Clichy, on trouva le corps de Ioana Seicaresco, une institutrice à la retraite âgée de 71 ans. Elle avait été battue à mort après avoir été bâillonnée et ligotée avec du fil électrique. Le décès remontait au samedi, mais ne fut découvert que deux jours plus tard, grâce aux enfants de la gardienne venus prendre un cours particulier avec la vieille dame. L’appartement était saccagé. Le ou les assassins avaient fait preuve d’une sauvagerie inouïe : la pauvre avait le nez et la mâchoire fracturés, et un foulard l’étranglait à moitié. L’autopsie révéla qu’elle avait toutes les côtes du côté droit brisées. La vieille dame, qui faisait ses courses invariablement tous les jours, vers 12h30, avait été suivie. Les assassins avaient ramassé 10.000 francs (1500€) en bons du Trésor que Ioana Seicaresco gardait chez elle.
- Deux jours plus tard, le 7 novembre, toujours dans le 18e arrondissement, on trouva une quatrième victime. Alice Benaïm fut découverte, deux heures à peine après son assassinat, par son fils André, qui venait, comme tous les jours, déjeuner avec sa mère. La vieille dame de 84 ans avait été frappée au visage, rouée de coups et torturée. Son ou ses meurtriers avaient fait preuve d’un rare sadisme : ils lui avaient fait avaler de la soude caustique, sans doute pour lui faire avouer où étaient cachées ses économies. La bouche et la gorge brûlées, Alice Benaïm avait été ligotée avec du fil électrique et jetée sur son lit, bâillonnée avec une serviette-éponge. Elle mourut étranglée. Selon son fils, le butin ne dépassait pas les 400 ou 500 francs (60 ou 75€). Cette fois, un voisin prévint la presse. En quelques heures, photographes et journalistes furent sur les lieux. L’affaire, dévoilée au public, prit une envergure nouvelle. La presse consacra de nombreux articles à cette série noire.
- Le lendemain, à une vingtaine de mètres à peine de la rue où habitait Alice Benaïm, c’est Marie Choy, 80 ans, qui trouva la mort. C’est l’infirmière qui venait soigner la vieille dame à domicile qui la trouva morte, étranglée. Le cadavre torturé, jeté sous le lit, était ligoté, avec du fil de fer cette fois, et bâillonné avec une serviette-éponge. L’autopsie montra, entre autres sévices, que Marie Choy avait eu la boîte crânienne défoncée. Les assassins n’avaient pu dérober que 200 ou 300 francs (30 ou 45 euros).
- le 9 novembre, toujours dans le 18e arrondissement, c’est Maria Mico-Diaz, 75 ans, qui mourut, pieds et poings liés, étouffée par un torchon. Son cadavre, portant des traces de coups de couteau, fut découvert par la police sur son lit. Le montant du vol n’excédait pas 200 ou 300 francs. C’était le sixième meurtre depuis le 5 octobre. Moins d’une semaine s’écoula et, le 12 novembre, on découvrit deux autres corps au cours d’une même journée : un dans le 18e et l’autre dans le 17e, un arrondissement tout proche. Mais ses crimes avaient été perpétrés respectivement six et huit jours auparavant. On trouva d’abord le corps de Jeanne Laurent, 82 ans, elle aussi ligotée avec du fil électrique. L’appartement avait été littéralement dévasté, mais seules des liquidités avaient été volées. La vieille dame habitait au dernier étage et son corps fut découvert par un ouvrier couvreur qui travaillait sur le toit de l’immeuble.
- Quatre heures plus tard, à 800 mètres de distance, le second cadavre de la journée fut découvert. Paule Victor, 77 ans, fut trouvée morte, la tête dans un sac en plastique, sous un oreiller. La police avait été alertée grâce à une jeune voisine qui, en allant aux toilettes communes, avait remarqué une forte odeur de putréfaction. Entre le 5 octobre et le 9 novembre 1984, en à peine un mois, il y eut donc huit meurtres de vieilles dames dans le 18e et dans des arrondissements contigus. Les journaux parlèrent d’un "tueur de vieilles dames du 18e", les hommes politiques commencèrent à s’émouvoir et les forces de police se mirent à quadriller le quartier. De leur côté, les enquêteurs firent des rapprochements. Les spécialistes réalisèrent que le mode opératoire était toujours le même.
Bref retour à Toulouse
Le 18e étant devenu un quartier à haut risque pour Paulin et son ami Jean-Thierry, tous deux avaient en effet décidé de quitter la capitale et de "se mettre au vert" pendant un moment dans la ville où Paulin avait passé une partie de son adolescence, Toulouse. Là, logeant provisoirement chez le père de Paulin, ils essayèrent de vivre "normalement". Paulin retrouva le quartier de son adolescence et renoua avec ses anciens amis. Mathurin et lui s’affichèrent dans les boîtes fréquentées régulièrement par les homos de Toulouse et dépensèrent avec ostentation de grosses sommes d’argent. Mais les années qui avaient passé n’avaient pas aidé à résoudre les querelles familiales. Les disputes reprirent de plus belle entre Paulin et son père, et l’homosexualité désormais manifeste de Paulin n’arrangea rien. Le couple qu’il formait avec Mathurin connut, lui aussi, des difficultés et se dégrada peu à peu. Ils finirent par se séparer. Mathurin rentra à Paris, Paulin continua seul sa vie de noctambule. Séduit depuis longtemps par le monde du spectacle, Thierry Paulin pensait de plus en plus à monter ses propres numéros musicaux. Il s’y employa activement. Il continua à soigner son image et, selon une méthode qu’il continua d’appliquer dans les soirées parisiennes, il offrit largement champagne et cocaïne pour s’attirer les sympathies. C’est à cette même époque que Paulin tenta de lancer la "Transforme Star", une agence de spectacles de travestis. Malgré ses efforts, l’entreprise échoua (Thierry Paulin avait même rencontré la chanteuse Line Renaud afin de demander conseil pour son entreprise.) Il semblait avoir changé et bouillonnait de projets.
Retour à Paris et deuxième vague de meurtres
Un an avait passé depuis le 12 novembre 1984, et les policiers du 36 Quai des Orfèvres s’égaraient dans de multiples hypothèses. La série de meurtres du 18e arrondissement s’était interrompue, et rien ne permettait aux enquêteurs de se mettre sur la trace du ou des meurtriers. - Le 20 décembre 1985, dans le 14e arrondissement cette fois, la découverte du corps d’une vieille dame de 91 ans, Estelle Donjoux, étranglée chez elle, relança l’affaire.
- Moins de quinze jours plus tard, le 4 janvier 1986, Andrée Ladam, 77 ans, subit le même sort à quelques mètres de là.
- Après une courte trêve de cinq jours, ce fut Yvonne Couronne, 83 ans, qui fut surprise et assassinée à son domicile, rue Sarrette.
Ces trois crimes furent perpétrés dans un rayon de 400 mètres autour de l’église d’Alésia, dans le 14e arrondissement. Chaque fois, le même scénario se répétait : la vieille dame était suivie depuis la rue jusqu’à son palier, puis poussée à l’intérieur de son appartement au moment précis où elle ouvrait la porte, pour être finalement étouffée ou étranglée. Ce rituel rappelait le cauchemar des vieilles dames du 18e, sans pour autant apporter la certitude qu’il s’agissait bien du même homme. Au contraire, la composante sadique caractéristique des meurtres du 18e, la violence gratuite dont faisait preuve le tueur jusque-là, semblait avoir disparu (Jean-Thierry Mathurin était peut-être le plus violent des deux). Dans cette nouvelle série, le meurtrier opérait avec moins de sauvagerie. Il ne torturait plus et procédait de façon plus rapide, étranglant immédiatement ses victimes ou les étouffant sous des édredons, des matelas ou des oreillers. Pourtant, l’ombre du "tueur du 18e" planait sur cette seconde série noire. - Au cours de la seule journée du 12 janvier 1986, deux femmes furent retrouvées mortes chez elles. Marjem Jurblum, 81 ans, rue Pelé, dans le 11e, et Françoise Vendôme, une veuve âgée de 83 ans, rue de Charenton, dans le 12e. Toutes deux étaient mortes étranglées. Après plus d’une soixantaine d’interpellations sans résultats dans les milieux suspects (toxicomanes, trafiquants, détraqués), les enquêteurs étaient au bord du découragement et le quai des Orfèvres, à force de comparaisons, se trouva devant autant de points communs que de divergences.
C’est pourtant vers la fin de ce mois de janvier 1986 que la police, pour la première fois depuis le début de l’affaire, fit un grand pas en avant. Le laborieux travail de comparaison d’empreintes digitales (qui, à l’époque, n’était pas encore informatisé) porta enfin ses fruits. Des empreintes relevées sur les lieux de plusieurs crimes commis en 1984 étaient bel et bien identiques à plusieurs autres séries d’empreintes relevées sur les lieux des derniers crimes. C’est ainsi que la police put assurer qu’un même homme au moins, sans préjuger des complices probables, avait été présent lors de trois agressions mortelles de 1984 (une dans le 19e, deux dans le 18e), une de 1985 (dans le 14e) et trois de 1986 (dans le 14e, le 11e et le 15e). Cette découverte bouleversa le cours de l’enquête. La police détenait à présent trois éléments : une série d’empreintes, un mobile (le vol d’argent liquide) et un mode opératoire bien défini. En dépit de la nouvelle panique qui s’emparait de la capitale, les enquêteurs reprirent confiance.
- Le 31 janvier 1986, Virginie Labrette, 76 ans, fut retrouvée morte dans son appartement, dans le 12e arrondissement. La police organisa alors une opération "coup de poing" à grande échelle dans la fourmilière du milieu interlope parisien. Les rafles et les contrôles dans les bars de Pigalle se multiplièrent. Pendant toute cette période, quand il n’était pas en train de "faire la fête", Thierry Paulin travailla dans une agence multiservice appelée Frulatti. Pour s’être fait connaître comme un garçon ayant des relations, Paulin était chargé de trouver des contrats aux photographes, mannequins et illustrateurs freelance de l’agence. Très vite, il devint l’homme à tout faire que son patron n’hésitait pas à envoyer chez les mauvais payeurs. Mais l’agence, créée par un étudiant d’une école de commerce inexpérimenté, fit faillite en mai 1986, après une soirée qui engendra d’énormes dettes. Paulin disparut dans la nature.
- Le 14 juin 1986, à nouveau dans le 14e arrondissement, un huitième meurtre mit les nerfs de la police à rude épreuve. Ludmilla Liberman, une veuve de nationalité américaine, avait été surprise et tuée par son agresseur, alors qu’elle rentrait chez elle.
Deux mois passèrent sans qu’aucun nouveau crime ne soit commis. La Brigade Criminelle était alors loin de se douter que celui qu’elle traquait depuis deux ans était déjà sous les verrous. En effet, en ce mois d’août 1986, mécontent parce qu’un sachet de cocaïne ne contenait pas la dose annoncée, Paulin s’était rendu à Alfortville chez le trafiquant qui la lui avait fournie. Il l’avait menacé à l’aide d’un pistolet d’alarme et l’avait battu avec une batte de base-ball. Le revendeur avait été si durement malmené qu’il avait porté plainte auprès de la police. Paulin avait été arrêté et condamné à 16 mois de prison pour "vol avec violence" et "infraction sur les stupéfiants". Avant d’être incarcéré à Fresnes, il fut fiché et ses empreintes digitales furent relevées. Certaines circonstances expliquent que les policiers n’aient pas fait le lien entre Paulin, arrêté comme un petit braqueur de banlieue, et l’assassin parisien des vieilles dames. Les moyens informatiques à disposition de la police étant à ce moment-là encore limités, la comparaison des empreintes se faisait fiche par fiche. Un travail excessivement long et méticuleux fut accompli sur 150 000 fiches, mais ce travail portait exclusivement sur des suspects fichés à Paris. Le recoupement n’était donc pas évident. Pendant plus d’un an, aucun autre meurtre portant la signature du tueur ne fut commis. Pourtant, Paulin n’eut pas à purger la totalité de sa peine : il quitta la prison de Fresnes au bout de 12 mois. Vers la fin de l’été 1987, fraîchement libéré, Paulin renoua avec ses anciennes connaissances et reprit sa vie de noctambule. Toujours décidé à organiser des soirées, il entreprit de mettre à jour son carnet d’adresses. Il se remit à fréquenter les discothèques et les bars homosexuels du quartier des Halles, apparaissant ici et là, plus exubérant que jamais. Paulin fréquenta assidûment "Le Palace", une boîte de nuit célèbre, située rue du Faubourg Montmartre, à Paris. Toujours charmant et poli, Paulin dépensa sans compter pendant ces soirées : il payait comptant et laissait de très gros pourboires. Parfois, il venait tous les soirs pendant une semaine, puis disparaissait pendant un mois pour resurgir plusieurs soirs de suite. Paulin ne tuait plus, mais dilapidait toujours de grosses sommes d’argent aux yeux de tous. Il n’avait d’ailleurs jamais volé à ses victimes les sommes nécessaires à un tel train de vie.
- Plusieurs mois passèrent et, brusquement, la série noire reprit. Le 25 novembre 1987, Rachel Cohen, 79 ans, fut assassinée à son domicile, dans le 10e arrondissement et, le même jour, à une centaine de mètres de là, Mme Finaltéri, 87 ans, fut laissée pour morte par son agresseur, étouffée sous un matelas.
- Deux jours plus tard, toujours dans le 10e, Geneviève Germont, 73 ans, étouffée puis étranglée, succomba au 22 rue Cail.
Portrait-robot et arrestation
Le week-end qui suivit ces violences, Paulin l’employa à fêter ses 24 ans. Le samedi 28 au soir, il régala fastueusement ses amis au "Tourtour", un établissement du quartier des Halles où il avait travaillé comme serveur en 1985. Les trois salles du restaurant furent réservées pour une cinquantaine de convives auxquels il avait adressé d’élégants cartons d’invitation. Le jeune homme n’avait négligé aucun détail et, grand seigneur, passa la soirée à tenter d’impressionner ses invités. Il avait convié son avocat (sic), maître Page, ainsi que toute la faune nocturne qu’il côtoyait désormais régulièrement. L’addition avait été réglée d’avance et en espèces. Le menu raffiné fut arrosé au champagne. Paulin fut, comme à son habitude, très élégant, en spencer noir, chemise blanche et cravate. Le lendemain soir, Paulin invita à nouveau une vingtaine de personnes dans un autre restaurant, à Pigalle cette fois, le "Minou Tango". Le lundi encore, il s’exhiba, dans un long manteau gris, au "New Copa", grande boîte africaine fréquentée par les diplomates noirs en poste à Paris. Il ignorait encore que cette nuit-là était la dernière qu’il passait en liberté. En effet, l’étrange ressemblance des derniers crimes avec les meurtres précédents n’avait pas échappé aux policiers. Sans attendre de comparer d’éventuelles empreintes digitales, le Quai des Orfèvres réagit en mobilisant tous les commissariats de quartier. La Brigade Criminelle disposait en effet d’un atout de taille : Madame Finaltéri avait survécu. Elle fournit, une fois rétablie, une excellente description de son agresseur : un grand garçon d’un mètre 90, métis, les cheveux décolorés et portant une boucle d’oreille. Le portrait-robot établi d’après ces renseignements fut immédiatement distribué dans tous les commissariats de Paris. Le mardi 1er décembre 1987, à une dizaine de mètres du commissariat de la porte Saint-Denis, dans le 10e arrondissement, le commissaire Jacob discutait avec quelques commerçants du quartier dans la rue, le portrait-robot du tueur en poche. Il était en pleine conversation quand son regard croisa celui d’un passant, un métis à l’allure sportive et aux cheveux décolorés. Il alla demander ses papiers d’identité au jeune homme. C’était Thierry Paulin. Il espéra sans doute s’en sortir une nouvelle fois, mais la photo de la carte d’identité qu’il présenta ne correspondait pas à sa physionomie actuelle et éveilla les soupçons du commissaire. Emmené dans les locaux du commissariat de la porte Saint-Denis pour une vérification de "routine", Thierry Paulin n’opposa pas de résistance. Persuadé qu’il était suspecté de se droguer, il montra ses bras, sur lesquels il n’y avait effectivement pas de traces de piqûres, et exigea de parler à son avocat. De son côté, le commissaire Jacob découvrit que son suspect avait déjà été arrêté pour infraction sur les stupéfiants. Il téléphona alors au chef de la Brigade de Répression du Banditisme, et au chef de la Brigade Criminelle, chargé du dossier du "tueur de vieilles dames". Les policiers de la BRB emmenèrent Paulin jusqu’aux locaux de l’Identité Judiciaire pour vérifier ses empreintes digitales et les comparer avec celles du meurtrier des vieilles dames. Rapidement, la responsabilité de Paulin, en ce qui concernait une partie au moins des meurtres, ne sembla plus faire de doute pour la police.
Aveux
Commencèrent alors les 48 heures de garde à vue à la Brigade Criminelle, au quai des Orfèvres. Pendant 43 heures, Paulin fut questionné sans relâche. Il avoua rapidement plus d’une vingtaine de meurtres aux 10 policiers de la BRB et de la Brigade Criminelle auxquels il devait faire face. Paulin raconta pèle-mêle les premiers crimes et tous ceux qui suivirent, confondant parfois les dates et les noms des victimes. Aucun remords, aucun trouble ne sembla l’effleurer, il était apparemment incapable de mesurer la terrible gravité des crimes qui lui étaient reprochés. Il n’hésita pas à expliquer en détail aux policiers la façon dont il opérait, repérant les vieilles dames au marché ou dans la rue, les suivant jusque chez elles, tentant parfois d’engager la conversation pour endormir leur méfiance. Très vite, Paulin dénonça Jean-Thierry Maturin comme étant son complice et donna son adresse. Celui-ci fut immédiatement arrêté, dans le 14e, au domicile d’un travesti rencontré alors qu’il travaillait au "Paradis Latin". Mathurin avoua sans trop de difficulté avoir participé aux meurtres du 18e arrondissement. Paulin puis Mathurin, quelques heures plus tard, furent déférés au Parquet, où bientôt commença l’instruction. L’instruction de ce dossier retint toute l’attention de l’opinion publique. Le juge Jeannin étudia dans les moindres détails les vies passées de Paulin et de son acolyte. Confrontés l’un à l’autre, les deux hommes refusèrent de se parler. Pour ne pas avoir à prononcer le nom de Paulin, Mathurin ne se référa à son ancien ami qu’en l’appelant "l’autre". Paulin, plutôt calme et souriant, tenta de faire endosser à Mathurin la plus grande part de responsabilité. Paulin fut incarcéré à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis. Il dut être isolé au quatrième étage d’un bâtiment récent où étaient enfermés les prisonniers que l’on souhaitait maintenir à l’écart des autres détenus, pour leur propre sécurité.
Incarcération à Fleury-Mérogis
En prison, Paulin ne pensa qu’à soigner son image, inconscient de la gravité des actes qui lui étaient reprochés. Comme par le passé, il cultiva savamment sa tenue vestimentaire. On lui avait coupé les cheveux et ôté sa boucle d’oreille, mais il avait pu conserver deux sacs de vêtements contenant plusieurs pantalons, un costume coupé comme un smoking, des chemises blanches et des nœuds papillon. Soucieux de les maintenir en bon état, il demanda même à sa mère de laver son linge pour lui. Enfin célèbre, Paulin sembla peu préoccupé par les tristes motifs de cette notoriété et se comporta en authentique vedette. Plongé dans la presse, il collectionna les articles le concernant, allant jusqu’à emprunter de l’argent à sa mère pour pouvoir tout acheter. À aucun moment, il ne pensa à organiser sa défense. Il commença par reprocher son enfance malheureuse à sa mère, puis retourna cette haine contre ses anciens amis qui, disait-il, l’avaient trahi. Il nia ce que la presse disait de lui, s’offusqua qu’on le traite de monstre, laissa entendre qu’on s’acharnait sur lui parce qu’il savait beaucoup de choses compromettantes sur bien des gens... C’est en de telles circonstances que Paulin renoua avec sa mère. Le 12 décembre, Monette et deux demi-sœurs de Paulin vinrent lui rendre visite au parloir de Fleury-Mérogis. Emu, il promit à sa mère de prier et de se procurer une bible. Pendant ce temps, Jean-Thierry Mathurin était incarcéré à la prison de la Santé. Il ne fut pas, lui, isolé, mais partagea sa cellule avec un autre détenu. Il lisait de nombreux contes pour enfants et sembla vouloir préparer son baccalauréat.
Maladie et décès
Quelques mois plus tard, Paulin fut atteint de dépression. Ce fut, du moins, le premier diagnostic. En fait, il s’avéra rapidement que Thierry Paulin était atteint du sida et que les premiers effets de la terrible maladie commençaient à se faire sentir. Son état empira brutalement un an après son arrestation. Peu après, le 10 mars 1989, Paulin fut amené d’urgence à l’Hôtel Dieu. Bientôt, il tomba dans le coma. Il fut transféré à l’hôpital Claude-Bernard de Paris. Soigné à l’aide d’antibiotiques, il lutta contre une tuberculose et une méningite, conséquences de son affaiblissement immunitaire. Thierry Paulin mourut des suites du sida dans la nuit du dimanche au lundi 16 avril 1989, à l’hôpital des prisons de Fresnes, où il avait finalement été transporté. Il était âgé de 26 ans. Paulin n’a jamais pu être jugé. Malgré ses aveux, il ne sera jamais que le "suspect n°1". Jean-Thierry Mathurin, lui, a été jugé en 1991, et a été reconnu coupable de neuf des meurtres de vieilles dames. Il a été condamné à la prison à perpétuité, avec une peine de sûreté de 18 ans. Il a été libéré en janvier 2009.
Personnalité et motivations
En ce qui concerne Paulin, on peut penser qu’il souffrit dès son plus jeune âge de carences affectives et éducatives qui le marquèrent profondément.[évasif] Jusqu’à son adolescence, il changea trois fois de "tutelle" : sa grand-mère d’abord, puis sa mère, puis son père. Chaque fois, le contexte socio-culturel fut différent. Thierry Paulin a donc eu le sentiment d’être privé d’amour parental et de modèles stables à imiter, modèles qui lui auraient permis de structurer positivement sa personnalité. Ce mauvais départ fut sans doute une des conditions de sa violence ultérieure. l semble d’ailleurs être toujours resté très immature, voire infantile. En particulier, il ne se développa chez lui aucun sens de la mort ni de la souffrance, infligée ou subie, conservant ainsi dans l’âge adulte cette cruauté un peu perverse que présentent souvent les jeunes enfants. Pendant les premiers interrogatoires, il ne se soucia jamais du destin de ses victimes après son passage. Mépris ou indifférence furent ses seuls sentiments manifestes. Son immaturité perce aussi dans son souci constant, narcissique, d’être le foyer unique de tous les regards, de toutes les attentions, tous les désirs. Loin de se terrer, de se soustraire prudemment à la vigilance de la police, il faisait en sorte que partout où il se produisait, on ne vît que lui et son argent. Lorsqu’il fut finalement incarcéré, son activité principale consista à collectionner avec passion tous les articles de presse le concernant. Il continua aussi à porter ses vêtements à la mode. En ce qui concerne Jean Thierry Mathurin, l’opinion de l’avocat général Philippe Berger, qui l’a fait condamner est : « C’était une personnalité fragile, déséquilibrée, falote… A l’évidence, c’était quelqu’un qui semblait prêt à se soumettre à la domination perverse et violente de quelqu’un qui exerçait une emprise sur lui. Il était pris entre une certaine fébrilité et une très grande violence, qui l’on conduit à ces crimes. (...) Il est indiscutable que Paulin était le personnage dominant dans ce dossier.Je serais même prêt, avec toutes les précautions et tous les risques que cela comporte, à avaliser la thèse selon laquelle sans Paulin, il est probable que Mathurin n’aurait pas pu commettre tous ces crimes ».
Filmographie
L'affaire a en partie inspiré Claire Denis pour son film J'ai pas sommeil.
Voir aussi
Liens internes
Notes et références
- ↑ Paulin, Thierry