Jacques Vergès
- Wikipedia, 29/01/2012
Jacques Vergès
Jacques Vergès au théâtre de la Madeleine à Paris (2008)
Naissance | 5 mars 1925 (1925-03-05) (86 ans) Ubon Ratchathani, Thaïlande |
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Nationalité | Algérienne Française |
Profession | Avocat |
Activité principale | Écrivain |
Formation | Faculté de droit |
Famille | Raymond Vergès (son père) Paul Vergès (son frère) |
Jacques Vergès est un avocat français[1], né d'un père réunionnais et d'une mère vietnamienne le 5 mars 1925 à Ubon Ratchathani au Siam[2] (actuelle Thaïlande). Il est célèbre pour ses convictions anticolonialistes, pour son passé d'ancien résistant, et pour avoir défendu des personnes ayant commis des crimes particulièrement graves, tel que l'auteur de crimes contre l'humanité, Klaus Barbie lors de son procès à Lyon en 1987.
Sommaire |
Enfance et adolescence
Fils de Pham Thi Khang, institutrice vietnamienne, et du docteur Raymond Vergès, consul de France à Ubon Ratchathani (Siam), Jacques Vergès est le frère jumeau de l'homme politique Paul Vergès.
À compter de la mort de leur mère survenue alors qu'il a trois ans, il vit à la Réunion, où une partie de ses ancêtres sont établis depuis la fin du XVIIe siècle et effectue parfois depuis cette île quelques brefs séjours à Madagascar. La famille s'installe d'abord à Saint-Denis, puis à Hell-Bourg et enfin à Saint-André.
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Raymond Vergès 1882 – 1957 |
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Jacques Vergès 1925 |
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Paul Vergès 1925 |
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Françoise Vergès 1952 |
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Laurent Vergès 1955 – 1988 |
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Pierre Vergès 1958 |
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Il est sensibilisé très tôt à la politique : à l'âge de douze ans, il participe avec son frère à un grand défilé du Front populaire qui le marquera, au Port. Sa jeunesse est en outre l'occasion de fréquenter de futurs dirigeants. Enfant, il a pour camarade de classe la future épouse de l'homme politique Pierre Lagourgue. Plus tard, il est scolarisé au lycée Leconte-de-Lisle dans la même classe que Raymond Barre, à qui il dispute la place de premier.
Il obtient son bac à seize ans et sa première année de droit l'année suivante. Il quitte la Réunion à 17 ans et demi pour s'engager dans la Résistance en 1942 puis passe en Angleterre, où il s'engage dans les Forces françaises libres (FFL) le 22 janvier 1943. Plusieurs fois médaillé, il se bat notamment en Algérie, au Maroc, en Italie puis en France avec le grade de sous-officier. Il reste toujours profondément gaulliste et attaché à la personne du Général, on parle même de gaullo-communisme pour le qualifier idéologiquement. Il ne revient à la Réunion en voyage qu'en 1961 puis 1984.
Engagement politique
Arrivé à Paris, Jacques Vergès adhère en 1945 au Parti communiste français, contre l'avis duquel il est élu en 1950, à Prague, membre du bureau du Congrès de l'Union internationale des étudiants. En 1952, il devient secrétaire du mouvement, toujours contre l'avis de son parti. Il reste sur place jusqu'en 1954. Il y obtient sa deuxième année de droit.
De retour en France, il obtient sa troisième année en 1955. La même année, il s'inscrit au Barreau de Paris après avoir passé le CAPA. L'année suivante, il se présente au Concours de la Conférence du barreau de Paris, appelé aussi Concours de la Conférence du stage où il rencontre Edgar Faure et Gaston Monnerville, entre autres.
Dans les années 1950, il fait connaissance avec les futurs chefs khmers rouges Saloth Sar (plus connu ensuite sous le nom de Pol Pot) et Khieu Samphan, dont il admet avoir « participé, dans un certain sens, à la politisation »[3].
Le jeune avocat anticolonialiste demande alors au PCF et au PSU de s'occuper d'affaires en Algérie. Il milite alors pour le FLN et défend leurs combattants, dont l'emblématique Djamila Bouhired, qui avait été capturée par les paras français, torturée puis jugée et condamnée à mort pour attentats à la bombe en Algérie notamment au Milk-Bar (5 morts, 60 blessés dont beaucoup de civils), sa cliente devient pour quelques années son épouse et ils ont deux enfants, Meriem et Liess Vergès (dont Fatima Nur Vergès-Habboub, sa petite fille venant de Meriem). Il quitte le PCF en 1957.
À l'indépendance de l'Algérie en 1962, Jacques Vergès s'installe à Alger et devient le chef de cabinet du ministre des Affaires étrangères. Il fonde alors une revue tiers-mondiste financée par le FLN, Révolution africaine. Jacques Vergès rencontre Mao Tsé-Tsoung en mars 1963 et se rallie très rapidement aux thèses maoïstes. Il est alors destitué de ses fonctions et doit rentrer à Paris. Au mois de septembre, il crée une nouvelle revue, Révolution, qui est alors le premier journal maoïste publié en France. En 1965, la destitution du président Ben Bella permet à Jacques Vergès de rentrer en Algérie. Il met fin alors à la revue Révolution. Il est avocat jusqu'en 1970 à Alger.
En janvier 2008, il apporte son soutien en personne à Tomislav Nikolic, dirigeant nationaliste du Parti radical serbe[4].
En décembre 2010, il se rend en Côte d'Ivoire avec Roland Dumas apporter son soutien à Laurent Gbagbo dont il est l'avocat, à la suite de l'élection présidentielle et la reconnaissance d'Alassanne Ouattara comme Président par la communauté internationale. Il est cependant écarté de la défense de l'ancien président et de son épouse, vraisemblablement pour avoir fait preuve de légèreté lors de son déplacement à Abidjan le 6 mai 2011 pour assister à la première audition de Laurent Gbagbo[5]. Il fut refoulé à l'aéroport pour n'avoir pas été au bénéfice d'un visa en règle[6]. Il aurait néanmoins touché 100 000 € avec Roland Dumas pour avoir assuré la défense politique de Laurent Gbagbo jusqu'à son arrestation[7], laquelle a compris la publication d'un livre, Crimes et fraudes en Côte d'Ivoire[8].
En mai 2011, il se rend à Tripoli avec Roland Dumas et s'y porte volontaire pour soutenir une plainte des familles des « victimes des bombardements de l'OTAN » contre le président Nicolas Sarkozy, dont le pays participe aux opérations de la coalition internationale en Libye. Il y dénonce une « agression brutale contre un pays souverain », et affirme qu'il serait prêt à défendre le colonel Mouammar Kadhafi au cas où il serait jugé par la Cour pénale internationale[9].
La disparition
De 1970 à 1978, Jacques Vergès disparaît. Il a toujours entretenu le mystère sur cette période.
Aux journalistes qui lui demandaient s'il était au Liban, à Moscou ou s'il travaillait pour les Khmers rouges chez Pol Pot, au Cambodge, il a répondu qu'il était « très à l'est de la France » et « avec des amis qui sont encore vivants, dont certains ont des responsabilités importantes ». « Les événements, ajoute-t-il, que nous avons vécus ensemble sont connus. C'est notre rôle qui ne l'est pas ; non pas réellement le mien, qui fut modeste, mais le leur. Il ne m'appartient pas d'en parler[10]. » Bernard Violet, un de ses biographes controversés, avance une affaire de gros sous au Katanga (qui n'est cependant pas « très à l'est de la France »). Le juge Thierry Jean-Pierre, qui a écrit un livre sur les frères Vergès, argue d'une fuite en avant : « À l'époque, il est mal. Michel Debré veut sa peau, et le Mossad veut le tuer, car il défend des Palestiniens. Il part du jour au lendemain, en Asie, agent des services secrets chinois. Ils l'utilisent au Cambodge et au Viêt Nam ». Dans le documentaire L'Avocat de la terreur, de Barbet Schroeder, il reconnaît avoir été ponctuellement présent à Paris de manière clandestine pendant cette période. Le cinéaste retient également la thèse d'un problème financier personnel comme seule cause de sa disparition.
Carrière d'avocat
Le premier dossier que Jacques Vergès a géré en tant qu'avocat concerne la Sonacotra. Il s'engage dans une défense de rupture (l'accusé se fait accusateur et prend l'opinion à témoin), plutôt que la défense de connivence qui était classiquement plaidée. La défense de rupture se distingue également de la "présence offensive" développée par Bernard Ripert. Depuis, au carrefour du politique et du judiciaire, Jacques Vergès a associé son nom à de nombreux procès médiatisés, notamment ceux des personnalités suivantes :
- Christian Poucet Président du CDCA européen
- Georges Ibrahim Abdallah
- Tarek Aziz
- Klaus Barbie Ancien chef de la section IV (Gestapo) surnommé « le boucher de Lyon »
- L'ex-capitaine Paul Barril, dans l'affaire des écoutes de l'Élysée
- Le préfet Bernard Bonnet
- Djamila Bouhired (Algérienne condamnée à mort pour terrorisme), qu'il épousa par la suite,
- Robert Boulin,
- Simone Weber,
- Le terroriste Carlos
- Le général congolais Norbert Dabira[11]
- Le ministre ivoirien Mohamed Diawara
- L'inspecteur Jean-Marc Dufourg[12] avec l'affaire du pasteur Joseph Doucé,
- Djaffar el-Houari, membre présumé du Front islamique du salut[13],
- Les acteurs d'Action directe, dont Max Frérot
- Roger Garaudy
- Khieu Samphan qui sera l'un des trois dirigeants khmers rouges jugés pour leurs crimes[14],
- Magdalena Kopp, compagne de Carlos
- Anis Naccache
- La famille du juge François Renaud (assassiné en 1975),
- Les protagonistes de l'affaire du sang contaminé,
- Camille Sudre,
- Bara Tall, entrepreneur sénégalais[15],[16]
- Omar Raddad en 1994,
- Louise-Yvonne Casetta (ex-trésorière occulte du RPR),
- Slobodan Milošević (mais celui-ci avait fini par ne pas le choisir comme avocat devant le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie - TPIY),
- Trois chefs d'États africains (Omar Bongo, Idriss Déby, Denis Sassou-Nguesso), qui avaient porté plainte pour offense contre le journaliste François-Xavier Verschave en 2000,
- Moussa Traoré, ancien président malien,
- Abdoulaye Wade, futur président sénégalais,
- La défense du chef d'État irakien déchu Saddam Hussein lui avait été proposée, mais la proposition n'a pas abouti car il voyait poindre un conflit d'avocats.
- L'affaire Frédy, uniquement demande de renvoi
- Charles Sobhraj
- Klaus Croissant
- La famille d'Ivan, enfant de douze ans, grièvement blessé lors d'une tentative d'interpellation de ses parents sans-papiers à Amiens en août 2007[17].
- Oscar Manutahi Temaru, Président de la Polynésie française.
- Laurent Gbagbo[18]
Il apparaît souvent mis en scène dans son bureau en bois de fer, véritable bric-à-brac décoré de nombreux objets africains et notamment de lithographies de Louis-Antoine Roussin. Il est par ailleurs collectionneur de jeux d'échecs.
Publications
- Pour Djamila Bouhired, avec Georges Arnaud, Éditions de Minuit, 1957.
- De la stratégie judiciaire, Éditions de Minuit, Paris, 1968.
- Pour les fidayine. La résistance palestinienne, Éditions de Minuit, Paris, 1969.
- Pour en finir avec Ponce Pilate, Le Pré aux clercs, 1er novembre 1983
- Beauté du crime, Plon, Paris 1988
- Je défends Barbie (préface de Jean-Edern Hallier), Jean Picollec, Paris 1988
- La Justice est un jeu, Albin Michel, 27 février 1992
- Lettre ouverte à des amis algériens devenus tortionnaires, Albin Michel, 28 octobre 1993
- Mon Dieu pardonnez-leur, Michel Lafon, 1er novembre 1995
- Intelligence avec l'ennemi, Michel Lafon, 1er janvier 1996
- Le Salaud lumineux, Michel Lafon, 1er janvier 1996
- J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans, Éditions 84, 6 mai 1999
- Un procès de la barbarie à Brazzaville (co-auteur avec Dior Diagne), Jean Picollec, 15 septembre 2000
- Les Sanguinaires : sept affaires célèbres, J'ai lu, 26 février 2001
- Omar m'a tuer - histoire d'un crime, J'ai Lu, 21 mars 2001
- L'Apartheid judiciaire, avec Pierre Marie Gallois, L'Âge d'homme, Lausanne 2002
- Le Suicide de la France, Olbia, 16 mars 2002
- Dictionnaire amoureux de la justice, Plon, coll. « Dictionnaire amoureux », 24 octobre 2002
- Les Erreurs judiciaires, Presses universitaires de France - PUF, 15 novembre 2002
- Justice pour le peuple serbe, L'Âge d'Homme, 1er mars 2003
- La Démocratie à visage obscène, La Table ronde, 7 octobre 2004
- Les Crimes d'État, Plon, 25 mars 2004
- Passent les jours et passent les semaines : Journal de l'année 2003-2004, Plon, 10 février 2005
- Jacques Vergès, l'anticolonialiste (entretiens de Jacques Vergès avec Philippe Karim Felissi). – Paris : le Félin, coll. « Histoire et sociétés », 2005. – 116 p., 24 cm. – ISBN 2-86645-584-3
- Crimes contre l'humanité massacres en Côte d’Ivoire, Pharos, 276p, avril 2006
- Que mes guerres étaient belles !, Éditions du Rocher, 5 avril 2007, (ISBN 978-2268060989)
- Journal : La passion de défendre, Éditions du Rocher, 17 avril 2008, (ISBN 978-2268065069)
- Justice et littérature, Presses Universitaires de France, 9 mars 2011, (ISBN 978-2130575382)
- "Crimes et fraudes" en Côte d'Ivoire, Édite, 2011 (ISBN : 978-2-84608-306-5)
- Sarkozy sous BHL, Éditions Pierre-Guillaume de Roux, 2011, 128 p., (avec Roland Dumas).
Notes et références
- ↑ AllAfrica.com, Me Jacques Vergès - "Je n'ai jamais perdu de procès", Propos Recueillis à Alger Par Alexandre Le Grand Rouamba, 15 Décembre 2010 [1]
- ↑ Cette date est celle de l'état-civil, ce qui fait de Jacques Vergès le jumeau de son frère Paul. Mais l'intéressé penche pour une naissance datée d'un an plus tôt, le 20 avril 1924, à Savannakhet dans l'actuel Laos, et a établi une déclaration conjointe une année plus tard avec son frère Cf. « Les mille et une vies de Me Vergès », L'Express, 28 février 2005.
- ↑ Dans le journal allemand Der Spiegel rapporté par le site Cambodge Soir, 25/11/2008
- ↑ À Belgrade, Vergès soutient le candidat ultranationaliste
- ↑ Sethkokofrance sur Over-blog.com
- ↑ LVDPG.com
- ↑ L'Express.fr
- ↑ Unblog.fr
- ↑ Le Monde.fr
- ↑ « Les mille et une vies de Me Vergès » et « Défendre Bush et Sharon ? Pourquoi pas ? », L'Express, 28 février 2005.
- ↑ [PDF] sur fidh.org
- ↑ Humanite.presse.fr
- ↑ Humanite.presse.fr
- ↑ Genocidewatch.org
- ↑ sur carapid.com
- ↑ sur blog.france2.fr
- ↑ « Les avocats de la famille d'Ivan demandent l'ouverture d'une information judiciaire », Le Monde, 14 août 2007.
- ↑ lemonde.fr (avec AFP), 28/10/2010 Pour Pierre Moscovici, la France n'a pas à "être en première ligne" en Côte d'Ivoire
Voir aussi
Articles connexes
- Avocat
- Empire colonial français
- Christopher Black, avocat canadien qui fut membre, avec Vergès, du Conseil de défense de Milosevic
Bibliographie
- Bernard Violet, Vergès, le maître de l'ombre, Fayard, 7 janvier 2000. Le 26 avril 2000, la Cour d'appel de Paris déboute Jacques Vergès de son action à l'encontre de cette biographie.
- Thierry Jean-Pierre, Vergès et Vergès, de l'autre côté du miroir, Médiaspaul, 6 avril 2000.
Documentaire
- 2007 : L'Avocat de la terreur, documentaire de Barbet Schroeder, sorti en France le 6 juin 2007. Ce film a été sélectionné dans la catégorie Un certain regard du 60e festival international du Film de Cannes 2007 et a remporté le César 2008 du meilleur documentaire.
Liens externes
- (fr) Son ascendance