Actions sur le document

Pas de réforme du traitement des litiges en matière sportive mais des ajustements techniques

K.Pratique | Chroniques juridiques du cabinet KGA Avocats - Eve Derouesne, 19/06/2015

Par le décret n° 2015 – 651 du 10 juin 2015 relatif au traitement des litiges en matière sportive publié au journal officiel du 12 juin 2015, applicable aux décisions prises à compter du 15 juin 2015, l’État procède à une amélioration du traitement de ces litiges un peu atypiques
Par amélioration, il faut entendre simplification et légère accélération du processus pré-contentieux et contentieux.


Quelles sont les modifications en cause ?

Une modification de tous les délais attachés à cette phase pré contentieux.
En effet, en matière sportive, il existe une procédure de recours préalable obligatoire administratif original devant le comité national olympique du sport français (CNOSF).

Celle-ci remplit une fonction de filtre utile et efficace.

Pour autant, lorsque cette phase obligatoire de conciliation n’aboutit pas, elle a pu être perçue comme contribuant à l’allongement des délais avant obtention d’une décision de justice.

A notre sens, cet allongement est surtout dû au fait que la saisine du CNOSF ne dispense pas et donc se cumule avec la phase de recours interne obligatoire devant les fédérations concernées (CE 26 juillet 2011, Ligue Corse de Football, n° 341199).

Quoiqu’il en soit, la modification des délais amont et aval pouvait utilement être regardée.

Ainsi, le décret concentre le temps de cette phase préalable en réduisant :

- tout d’abord, le délai imparti pour saisir le CNOSF (15 jours au lieu de deux mois auparavant). En effet, jusqu’à cette date, le délai de recours pour saisir le CNOSF était calé sur le délai de recours de droit commun pour saisir le juge administratif – article R. 141-15 code du sport) ;

- ensuite, le délai pour s’opposer à la mesure de conciliation (15 jours au lieu de un mois -– article R. 141-23 code du sport) ;

- enfin, le délai de recours contentieux lequel est porté à un mois au lieu du délai de droit commun deux mois (nouvel article R. 141-9-1 code du sport).

A noter également, pour être exhaustif, une mesure tendant à la modernisation des procédures de notification et de saisine devant le CNOSF puisque dorénavant la demande de conciliation de même que la décision d’opposition à la mesure de conciliation pourra également intervenir par télécopie ou courrier électronique avec demande d’avis de réception.


Une spécialisation de fait des juridictions administratives
En matière sportive, il existait une particularité quant à la détermination de la compétence territoriale de la juridiction administrative. En effet, en application de l’article R. 312-17 du code de justice administrative et 131-2 du code du sport, c’était le siège du requérant qui déterminait le tribunal administratif compétent.

En revenant à la compétence territoriale de droit commun, à savoir le siège de l’auteur de la décision, il est procédé à une spécialisation de fait de certains tribunaux administratifs qui vont voir se concentrer sur eux les litiges en matière sportive. C’est en particulier le cas pour le tribunal administratif de Paris puisqu’il sera amené à juger toutes les décisions en matière de football lorsqu’elles relèveront de la compétence du tribunal administratif et non du Conseil d’État.


L’on notera que cette entrée en vigueur intervient en fin de saison sportive, c’est-à-dire à point nommé pour être mis en œuvre lors des contestations – et il en a toujours – de fin de championnats et de début de championnats.

Ces mesures ne surprendront pas les professionnels du secteur puisque le ministère avait communiqué sur celles-ci dès la fin d’année 2014 (notamment lors du colloque organisé par KGA AVOCATS Rencontres sportives sur terrain juridique : la conciliation devant le CNOSF quel futur ? 4 décembre 2014).

Si ces mesures font consensus, l’on peut néanmoins regretter qu’une réforme plus ambitieuse n’ait pas été tentée afin d’assurer une meilleure articulation entre les recours administratifs préalables obligatoires et les recours internes aux fédérations et aux ligues, une concentration de la phase précontentieuse (le précédent de l’été dernier de Luzenac illustre comment un même club peut se retrouver plusieurs fois pour une même affaire devant le CNOSF) ou encore pour basculer de la conciliation vers des mesures décisoires.

Souhaitons donc qu’il s’agisse tout de même bien d’une première étape et non de la seule étape.



Retrouvez l'article original ici...

Vous pouvez aussi voir...